mardi 7 mars 2017

l'histoire de Jules, écolier de 1900 (V)


« Petite histoire d’un écolier d’autrefois  expliquée aux enfants d’aujourd’hui »

Cour de récréation vers 1900 (collection privée)

CHAPITRE V
 « Nous y voilà ! »


La joyeuse bande étant arrivée à bon port, Jules rejoint la cour des « grands » et sa journée de classe commence par son installation au pupitre qui lui est dédié, non loin du poêle qui diffuse sa douce chaleur. Un Règlement pour la construction et l'ameublement des maisons d'école a été édité en 1880 et stipulait :
"La classe sera de forme rectangulaire. L'éclairage unilatéral sera adopté toutes les fois que les conditions suivantes pourront être réunies :
- possibilité de disposer d'un jour suffisant.
- proportion convenable entre la hauteur des fenêtres et la largeur de la classe.
- le jour viendra nécessairement de la gauche.



(..) Que la classe soit éclairée d'un côté ou de plusieurs côtés, par une baie unique ou par plusieurs fenêtres, les dimensions de ces ouvertures devront être calculées de façon que la lumière éclaire toutes les tables".


Règlement de 1880 pour la construction des école (collection musée)


Ce règlement précisait évidemment que l'appui des fenêtres serait élevé de 1,20 m au-dessus du sol... rien ne devant détourner l'attention des écoliers!

Il sera complété par Les Instructions du 30 août 1949 qui donnent la liste du matériel à fournir par les communes:
- des tables et des sièges pour les maîtres,
- des tables et des sièges en nombre suffisant pour les élèves en fonction de leur taille,
- des tableaux noirs,
- le matériel nécessaire à l'enseignement (cartes, planisphère, etc.), ainsi que le matériel de travail manuel et des arts ménagers,
- différentes armoires et une ou plusieurs prises de courant.


Tableau noir (collection musée)


La loi de 1953 apporte quelques changements : 2 tableaux noirs ou de couleur, une table longue pour les travaux pratiques, un meuble à archives, un panneau d'affichage et un cadre à glissières pour exposer les gravures.
Si au début l’éclairage artificiel se composait de lampes à pétrole dans les campagnes et quelques fois de lampes à gaz dans les villes, avec l'usage courant de l'électricité apparaissent les "globes", suspensions de verre accrochées à une tige métallique qui doivent assurer une bonne diffusion de la lumière directement au-dessus des élèves. Ces "globes" seront plus tard remplacés par des tubes à "néon" suspendus eux aussi, au-dessus des élèves. Une nouveauté sera l'apparition d'un éclairage propre pour les tableaux (à base de tubes lui aussi).


Globe d'éclairage (détail de la salle 1950 du musée)


Mais revenons en 1881. l'Etat prend en mains le mobilier scolaire. La table-banc de 8 à 10 places avec le banc sans dossier lié à la table, sans souci de la taille des enfants est couramment utilisée. En outre, les instructions précisent la composition du matériel scolaire :
- un bureau de maître avec estrade de 0,30 m à 1,32 m de hauteur,
- une armoire bibliothèque où les livres seront rangés,
- des tableaux et des cartes,
- un compendium métrique
- des agrès, appareils de gymnastique et fusils scolaires,
- une armoire pour ranger les objets indispensables à la propreté de l'école.


Meuble bibliothèque (collection musée)


Dès 1887 des Instructions spéciales réglementent la construction des pupitres. Les différentes inclinaisons de ces derniers varient de 0° à 20°, bien que la grande majorité d'entre-elles se situent de 8° à 9°. « Cette inclinaison moyenne est suffisante pour bien offrir le livre aux regards tout en évitant son glissement ». Chaque pupitre est muni d’un encrier en faïence ou porcelaine blanche, leur remplissage hebdomadaire incombait à l'enseignant ou, dans les grandes classes, aux élèves. Par roulement ou comme une récompense, ceux-ci s'acquittaient de cette tâche importante avec sérieux ! Pour éviter une évaporation trop rapide, donc dans un souci permanent d'économie, les élèves couvraient leur encrier, souvent avec un gros bouton ou un bouchon de tube de médicament. Une petite collerette en tissu placée sous l'encrier servait à protéger la table et à essuyer la plume.
Le nettoyage de ces encriers annonçait de façon très claire l'arrivée des vacances scolaires d'été. Chaque classe mettait un point d'honneur à "récurer" le plus parfaitement possible sa série d'encriers.
Plus tard, avec de nouveaux bureaux, apparurent les encriers en plastique vert, munis d'un système de fermeture. Conservateurs, les maîtres stockèrent encore longtemps les vieux encriers dans les bas de placard ! Moins jolis, moins fragiles, le nouveau matériel fut l'objet de moins de soin de la part des élèves. Devenus inutiles à l'arrivée du stylo à bille, les encriers disparurent petit à petit des tables d'écoliers.


Aquarelle-plan d'un pupitre par l'architecte Dulac (collection Pirou), voir dans la rubrique "Histoires d'école"


Peu à peu, la naissance d'une  pédagogie tournée vers la manipulation de documents et de petit matériel, tels que les jetons ou les bûchettes pour le calcul par exemple, fait évoluer les pupitres vers le plan horizontal. On assiste alors à des rectifications artisanales de la pente de ceux-ci par introduction de coin de bois sous les plateaux, ainsi ramenés à l'horizontale. On trouve dans le commerce les pupitres inclinés jusqu'en 1936 (catalogue SUDEL, page 26). Les Instructions du 30 août 1949 veulent instaurer un nouveau mobilier scolaire, de préférence individuel, avec une table horizontale (munie d'une rainure pour les porte-plumes et d'un trou destiné à recevoir l'encrier) pour chaque enfant et une chaise. Ce matériel doit être facilement transportable par l'enfant lui-même.
Les tables et les sièges seront de couleur claire, y compris le dessus de la table. En aucun cas le mobilier ne sera fixé au sol. En 1950, on préconise des tables réglables avec des tubes d'acier.


Poêle de la salle 1950 (collection musée)


Chaque classe était équipée, à la ville comme à la campagne, d'un poêle en fonte (souvent de marque GODIN), alimenté au charbon pour les premiers ou au bois pour les seconds. L'honneur d'assurer la corvée d'allumage revenait le plus souvent à l'élève le plus méritant (ou le plus dégourdi) qui, après avoir froissé un journal et disposé de menus morceaux de bois, enflammait le tout avant de "charger" en charbon au moyen d'un seau ou en bûches. Le manque de moyen dans les écoles de campagne poussait souvent le maître à demander aux élèves d'apporter chacun une bûche le matin, afin d'assurer le chauffage de la journée. C'est ainsi que les écoliers arrivaient munis de leur cartable, de la bûche et le plus souvent de leur gamelle pour leur repas de midi. Le poêle servait alors de cuisinière pour réchauffer la "soupe", pendant que chacun attendait autour de la grille. Après les moyens de chauffage précaires utilisés jusqu'au milieu du siècle, la loi de 1953 apporte des précisions sur les moyens à utiliser pour chauffer les classes, elle recommande l'emploi d'appareils à bois, à anthracite ou l'utilisation du "calorifère irlandais à ailettes". Mais peu à peu, les communes équipent leurs écoles d'un  chauffage central, activé et entretenu par un personnel municipal, souvent au charbon dans les années 1960. Ensuite, d'autres énergies sont utilisées (gaz, fuel...).


A suivre…


P.P










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