Le sergent Paul Constant Moutardier
Ecolier du Magny (Montceau-les-Mines)
Elève-maître à l’Ecole Normale
De Mâcon
Promotion 13/16
Dite « Promotion sacrifiée »
L’exemple d’un destin
brisé
Dans ce
groupe, où se trouvent cinq conscrits, reconnaissables à la cocarde qu’ils
arborent fièrement au plastron, figure Paul Constant Moutardier (debout au
centre), assis devant lui se tient son frère Charles, de trois ans plus jeune.
Paul est né le 28 août 1895 à Montceau-les-Mines et a vécu sa jeunesse à
Rouvrat où ses parents tenaient un café, près du quartier du Magny où il alla à
l’école.
Exposition itinérante « Des
bataillons scolaires aux tranchées »
ECLA
Saint-Vallier du 22/09 au 30/09
Médiathèque
de Blanzy du 06/10 au 14/10
Mairie de
Tournus du 20/10 au 28/10
Embarcadère à
Montceau du 03/11 au 11/11 (exposition complète)
D’un milieu modeste mais d’une intelligence
sûre, après des études à l’Ecole Primaire Supérieure de Montceau-les-Mines, il
passa le Brevet Supérieur à Mâcon. Sa mère, Hélène, racontait volontiers qu’en
revenant de l’examen par le train, il s’inquiétait d’une possible erreur dans sa rédaction.
Ses craintes dissipées, Il intégra l’Ecole
Normale, où il logea chez Madame Morandet, 39 quai Nord. Cette dame avait fait
l’éloge de Paul à sa mère car il « prenait grand soin de ses habits et de ses affaires
et n’oubliait pas de cirer ses souliers ». Sa promotion, la 1913/1916,
dite « Promotion sacrifiée » du fait du peu de temps qu’elle passa en
formation (un an), avait vu tous ses normaliens versés dans les écoles
primaires du département, en 1914, en remplacement des maîtres mobilisés.
Paul Constant fut nommé instituteur
intérimaire à l’école de la Coudraie, au Bois-du-Verne (Montceau). Comme le rappelait
sa maman en riant, longtemps après encore, à la suite de cette affectation de
Paul non loin de son quartier, un jeudi, quelques-uns de ses élèves étaient
passés par Rouvrat, ils ne manquèrent pas de lui dire le lendemain qu’ils
l’avaient vu en sabots !
Paul sera mobilisé, à son tour, en 1915, au
29e Régiment d’Infanterie à Autun.
Le départ pour la guerre
Sur cette photo de famille,
on trouve (de haut en bas et de gauche à droite) : le cousin Maurice,
Hélène la maman de Paul, la tante Marie, Charles son frère, Pierre son papa et
Paul en costume de Normalien.
Dans la deuxième moitié du
XIXème siècle, la redingote et la casquette ont peu à peu remplacé le frac et
le chapeau haut de forme comme attributs des normaliens. Un peu avant 1900, la
Roupane (nom donné à la redingote) est embellie de deux palmes d'or brodées sur
le col. La Roupane donna alors son surnom à l'Ecole Normale et à ses élèves :
les "Roupanards". En 1910, un nouvel uniforme remplace la redingote.
En effet le port de celle-ci, pour des jeunes en pleine croissance, présentait
de nombreux inconvénients. Elle fut remplacée par une tunique dont les huit
boutons étaient en cuivre doré (toujours avec palmes d’or brodée sur le col
comme on peut le voir sur la photographie). La casquette à visière était
également inscrite au trousseau obligatoire.
Paul est souvent photographié en tenue
militaire (assis au centre), notamment sur les cartes postales qu’il poste du
front. Ce cliché est pris peu de temps après son incorporation au 29ème
Régiment d’Infanterie d’Autun. L’uniforme définitif des « poilus »
n’est pas encore de mise, les soldats ne portent déjà plus les pantalons
amarante de la guerre de 1870 mais ont toujours capotes et képis de cette
époque.
Voici une photographie de Paul Constant
Moutardier, réalisée dans un studio de Montceau. Il était courant que les
soldats se fassent « tirer le portrait », comme on disait à l’époque,
lors d’une permission afin de laisser un souvenir à leurs proches. En
l’occurrence, il porte l'uniforme avec ses galons de sergent.
Nouvel uniforme pour les soldats à partir de
fin 1915, couleur discrète, calots, vareuses, toujours les traditionnelles
bandes molletières pour la troupe et les guêtres en cuir pour les gradés. Paul
Constant Moutardier est assis sur le banc (troisième en partant de la gauche).
Encore une de ces photographies « à prix réduits » du front, tirée à
plusieurs exemplaires puis envoyée à différentes personnes !
Edmond, oncle de Paul, mobilisé aussi, bien
que plus âgé. Il sera renvoyé dans ses foyers fin 1916 à l’âge de 36 ans.
Au dos de cette
photographie, adressée aux parents Moutardier, l’oncle Edmond (frère de la mère Moutardier) écrit en 1916 :
« Sur celle-ci, je lève un peu la tête et
je ris un peu trop aussi. On ne peut pas toujours être triste.
Edmond »
Paul Constant participera aux combats des
Eparges et de l’Argonne en 1917. Malheureusement, il sera tué dans la dernière
année de la guerre, le 9 juin 1918, il recevra la médaille militaire à titre
posthume, comme l’officialise sa dernière citation.
Une
fin tragique
Cet arrêté ministériel du 8 février 1921
porte attribution de la médaille militaire à la mémoire du sergent Paul
Constant Moutardier, matricule 14651, 13ème régiment d'infanterie. Le texte de
la citation qui, au journal officiel accompagne la décoration, "Croix de
guerre avec étoile d'argent", est le suivant "Sous-officier brave
et résolu. Tué glorieusement à la tête de ses hommes au cours d'une
contre-attaque en avant de Ployron le 9 juin 1918" ».
Paul est tué près de
Rubescourt dans la Somme, durant l’offensive allemande vers Compiègne. Son acte
de décès porte la mention « Mort pour la France ». Il avait auparavant été cité à l’Ordre de la
Brigade le 25 septembre 1915, pour s’être « porté sous un fort
bombardement et sous les balles ennemies au secours de ses camarades ensevelis.
Croix de Guerre Etoile de Bronze ».
L’offensive allemande vers
Compiègne, du 1er au 12 juin 1918, fait suite à l’offensive du
« Chemin des Dames » du 27 mai au 1er juin 1918, les
allemands visent Paris :
« (..) Il y eut un
temps d’accalmie, puis le 8, à 23 heures 45, l’artillerie allemande commença
une préparation de trois heures quarante-cinq, entre Montdidier et Noyon, où la
XVIIIème Armée de Von Hutier allait lancer 18 Divisions d’infanterie, dont 6 en
réserve, sur un front de 30 kilomètres. Notre armée, commandée par le Général
Humbert, opposait 7 Divisions d’infanterie sur le front d’attaque et 2 à l’est
de l’Oise, dans le massif de Carlepont ; elle avait 5 Divisions
d’infanterie en réserve et, cette fois, les chars seront à portée
d’intervention. Les divisions en ligne s’échelonnent sur trois positions assez
sommaires qui offrent une profondeur de 3 à 6 kilomètres. (..) La bataille sera
livrée, en principe, sur la seconde position. (..) Du 9 au 11 juin, les
divisions du centre de la 8ème Armée, mal échelonnées, furent
emportées. La XVIIIème Armée allemande, remontant la vallée du Matz, traversa
les trois positions. Ce faisant, elle étendait son flanc droit et mission fut
donnée au général Maugin de contre-attaquer dans ce flanc entre Rollot et
Tournay-sur-Aronde. »
Histoire de la
Premire Guerre mondiale , Général F. Gambiez.
« (..) Le 3 juin, dernière
et puissante attaque entre Aisne et Ourcq de trois divisions fraîches (..) A
trois heures du matin, nos unités de première ligne, engagées depuis trois
jours et épuisées, étaient dans le désordre de la relève, quand une grêle
d’obus s’abattit sur elles. C’était un roulement continu et formidable…A 4
heures, l’infanterie ennemie débouche en masse. Notre 11ème Corps,
les 2ème ,3ème et 6ème divisions de cavalerie,
troupes d’élite, reçoivent bravement le choc. Dans la région de Troesnes, la
première ligne de tranchées est submergée. Mais tout le monde se bat avec
acharnement, troupes de relève, troupes relevées, génie, cuisinier, hommes des
convois. Après un violent corps à corps, l’ennemi est arrêté le soir, après des
gains insignifiants, malgré son écrasante supériorité numérique, ses avions,
ses obus toxiques et ses sacrifices sanglants. La forêt de Villers-Cotterets
demeure inviolée. (..) Or, instruit par l’expérience des récentes ruées
allemandes et se souvenant de Verdun, le
Général Pétain avait décidé d’inaugurer ici une nouvelle tactique. C’est un
fait que les obus de l’ennemi écrasent toujours nos premières lignes, de sorte
que la première vague d’assaut, fort dense d’ailleurs, suffit pour la
submerger.
Cette vague pousse droit
devant elle, allant le plus loin possible, jusqu’à ce qu’elle soit à bout de
souffle. D’autres vagues interviennent, qui dépassent la première et poussent
de l’avant (..) Donc, il ne faut laisser en première ligne que les éléments
strictement nécessaires pour obliger l’ennemi à executer sa préparation
d’artillerie et son déploiement. Le gros de nos force, bien à l’abri dans la
deuxième position renforcée, n’ayant pas eu à souffrir de la préparation
d’artillerie, arrêtera la vague d’assaut disloquée. A ce moment un renfort
puissant, tenu soigneusement en réserve, à l’abri des émotions de la lutte,
surgira à l’improviste et foncera sur les réserves de l’ennemi. (..) Le 9
juin, à minuit, sur un front de 40 kilomètres, de Montdidier à Noyon,
l’artillerie allemande déchaîne son ouragan de fer et de gaz asphyxiants. A 4
heures 30, l’infanterie de Hutier se lance à l’assaut. Il s’agit, cette fois,
d’enlever Compiègne et Estrées-Saint-Denis. A midi, après quatorze charges
infructueuses, les masses ennemis ont arraché le mont Renaud et la Plémont à
l’héroïsme des cuirassiers à pieds ; mais les progrès des allemands sont
lents dans la « Petite Suisse » et coûtent cher. A gauche, la
résistance des nôtres est vive et les succès de l’assaillant encore plus
réduits.
Ses colonnes d’assaut
viennent s’écraser sur nos deuxièmes positions et subissent des pertes
terribles devant Rubescourt et le Frétoy. »
« La Grande
Guerre vécue, racontée, illustrée par les Combattants » Aristide Quillet.
Entre le 27 mai et 15 juin,
les français perdront 140 000 hommes, dont Paul Constant Moutardier, mort ce
sinistre 9 juin 1918. Dans son avant-dernière lettre datée du 1er
juin, il annonçait sa remontée en ligne dès le lendemain, après huit jours de
repos.
Paul est dans un premier temps porté disparu
ou supposé prisonnier. Charles, son frère, mobilisé à son tour, envoya une
carte aux parents le 20 novembre 1918, dans laquelle il disait qu’il reviendrait
pour une permission de 20 jours le 1er décembre et qu’il pensait
qu’il aurait des nouvelles de Paul car les prisonniers commençaient à être
libérés.
Texte intégral de la
carte :
« Mercredi 20 novembre
1918
Chers parents. Deux mots
pour vous dire que ça va très bien et j’espère qu’il en est de même pour vous.
J’ai reçu aujourd’hui une lettre d’Edmond, il me dit qu’ils vont mieux et il a
joint dix francs à sa lettre. J’ai aussi reçu des nouvelles de l’oncle Emile
avant-hier, il me dit qu’il va lieux lui aussi et qu’il m’envoie 5 francs, je
pense que c’est un mandat-carte car je ne les ai pas encore reçu aussi
maintenant j’en ai assez pour attendre ma perme car j’ai reçu le mandat de 25
francs et celui du 12 de 20 francs. Pour ma perme elle sera un peu plus longue
car à partir du 1er décembre nous avons 20 jours et je compte être
dans les 1ers décembre à Montceau. Chers parents j’espère que
maintenant nous ne tarderons pas d’avoir des nouvelles de notre cher Paul car
maintenant suivant les journaux ils seront libérés. Aussitôt que vous aurez
quelque chose vous me le ferez savoir. Je n’en mets pas plus je vous embrasse
tous bien des fois.
Charles
Vous rangerez la carte car
ce sera un souvenir. J’ai été visiter le château de Fontainebleau dimanche
dernier et j’ai acheté quelques cartes. »
Ce
n’est que le 3 avril 1919 qu’arrivera l’Avis de Décès officiel et le 27 janvier
1921 que le tribunal de Chalon-sur-Saône rendra un jugement déclaratif de
décès. Jusqu’à la tragique nouvelle, la famille garda l’espoir que Paul fut en
effet prisonnier. Comme ces derniers revenaient peu à peu après l’armistice et
regagnaient leur foyer, chaque soir, à l’heure d’arrivée du train, les parents
Moutardier allaient jusque sur le puits « Jules Chagot », sur le
chemin qu’aurait dû prendre Paul pour venir de la gare… Ils l’attendirent en
vain.
Un sac fut rendu à la famille, il contenait les affaires trouvées auprès ou sur
Paul quand son corps a été découvert, accompagné d’un bordereau-inventaire
succinct (manuscrit) de l’armée. Il déclare que le sac contient un mandat poste, une plaque matricule, une
pièce de 1 franc, 3 pièces de 0.10 franc, un porte-monnaie « à ½
pourri ». Cette dernière indication laisse présumer que le corps avait
séjourné un certain temps sur le champ de bataille avant d’être retrouvé.
Le corps du sergent Paul Constant Moutardier
est retrouvé au Ployron. Il y fut enterré une première fois dans le cimetière
du lieu avant que la dépouille ne fut déplacée, à Tricot vraisemblablement, et
enfin rapatrié à Montceau, le mardi 22 mars 1921.
Les enfants de l’école du village étaient
chargés d’entretenir les tombes des soldats. C’est Alice Dupoty qui entretenait
la tombe de Paul comme le prouve la carte qu’elle envoya aux parents Moutardier.
Ces derniers se rendirent à Ployron après la guerre, ils passèrent par l’école
et c’est Alice qui les conduisit au cimetière. Le contact resta vif entre eux
et Alice vint plusieurs fois à Montceau.
Texte d’une carte envoyée par
Alice Dupoty aux parents Moutardier :
« Cher Monsieur et Madame,
Je vous envoie deux mots pour
vous faire savoir que l’on est en train d’exhumer les soldats qui sont au
cimetière du Ployron pour les transporter au Tronquoy maintenant il y a des
familles qui les font transporter au Tricot.
Je pense que ma carte vous trouvera
en bonne santé, chez nous ça va à peu près pour le moment.
Recevez, cher Monsieur et
Madame mes meilleurs baisers ;
Alice Dupoty »
Après le transfert à Tricot, une autre
personne fut chargée de l’entretien de la tombe de Paul. La tâche fut assumée par
une veuve, Madame Gervois, domiciliée dans la localité, peut-être sous le
couvert du Souvenir Français qui relayait sur place la volonté des autorités
d’honorer les sépultures. Elle apporta, elle aussi, un peu de réconfort à la
famille. On notera dans sa carte postale, la mention d’une tierce personne qui
continue de fleurir la tombe : Alice.
texte de la carte de la
veuve Gervois à Madame Moutardier :
« Chère Madame,
Soyez sans inquiétude, je
suis allée sur la tombe de votre cher fils planter des fleurs et quand je suis
retournée la seconde fois, une personne était venu en planter aussi je ne sais
qui mais je suppose peut-être la jeune fille de Ployron. Chère Madame tant que
je serai à Tricot il ne sera pas oublié je vous le promets chère Madame. Je suis
assez hzureuse de vous voir prévenue assez tôt J’allais vous écrire au moment
que j’ai reçu votre lettre que vous étiez au courant chère Madame c’est en
terminant que je me permets de vous embrasser et toute votre famille, mes
meilleures amités.
Veuve Gervois. »
Dès le début du conflit, des familles
touchées par le deuil demandèrent le droit d’exhumer et de transporter, dans le
cimetière familial, la dépouille du feu soldat. Entre le 4 août et le 19
novembre 1914, devant le vide juridique, le Décret du 27 avril 1889 s’applique,
des autorisations de rapatriement sont données, aux frais des familles.
Mais rapidement, les transferts de corps
furent officiellement interdits dans la zone des armées. Le 19 novembre 1914,
le général Joffre, commandant en chef de l’armée française prit cette décision
qu’il justifia dans une note : une telle mesure permettait, selon lui « d’assurer
l’égalité entre les familles plus ou moins fortunées », le transfert
étant évidemment fort coûteux. A cette raison « morale »,
s’ajoutaient surtout des raisons matérielles : le transport des corps et
les restitutions auraient nécessité un besoin en hommes (présence exigée d’un
médecin, d’« exhumateurs », de manutentionnaires) et en matériel importants
(cercueils, voiture, camions, charrettes, trains manquant déjà aux transports
de troupes, pelles…).
En conséquence, et avant même la fin du
conflit, dans les zones où il n’y a plus de combats, les autorités militaires
commencent à regrouper des tombes et des cimetières sont créés. Ces derniers
ont pour objectif de recenser les sépultures disséminées et d’offrir aux poilus
morts, une localisation qui se veut définitive. Aucun rapatriement des corps
des soldats tombés pendant le conflit n’est désormais réellement envisagé.
Ceux-ci sont enterrés au plus proche de l’endroit où ils sont tombés, dans des
cimetières qui sont pris en charge momentanément par autorités locales (comme
ce fut le cas avec les écoliers de Ployron ou la veuve Gervois). Cependant, un
vif débat a lieu à la fin du conflit sur le devenir des corps des soldats
inhumés dans ces cimetières. Certains sont partisans de laisser les combattants
enterrés aux côtés de leurs camarades sur les champs de bataille où ils sont
tombés. D’autres souhaitent le retour des corps aux familles. Finalement, un compromis
est adopté, le 31 juillet 1920, le gouvernement français décide la création des
cimetières nationaux et, par le décret du 20 septembre 1920, il autorise
parallèlement les familles qui le souhaitent à rapatrier le corps de leur
disparu aux frais de l’Etat.
C’est ainsi que la dépouille de Paul fut
rendu à sa famille. Il a été inhumé le jour même de l’arrivée du convoi, le 21
mars 1921, au cimetière du Bois-Garnier (Montceau) : « Mon oncle a été inhumé le jour même de l’arrivée du convoi, le
21 mars 1921, au cimetière du Bois-Garnier [Montceau]. Mes grands-parents avaient
demandé et obtenu que la tombe soit la première au bord de l’allée du Carré
Militaire. Ils ont alors acheté la concession face à cette tombe, sur l’autre
bord de l’allée, où ils reposent maintenant près de lui. » Témoignage de Paul Moutardier, fils de
Charles, neveu de Paul Constant, 2015.
Son nom est gravé dans la pierre du Monument
aux Morts de Montceau.
Une correspondance
censurée
On peut s’étonner, à la lecture de la
correspondance de Paul Constant Moutardier à ses proches, de la somme de bonnes
nouvelles que les lettres contiennent : aucun problème grave, aucune
allusion aux combats.
Il suffit de lire
l’avertissement noté en marge de cette lettre du 8 septembre 1916 pour
comprendre que la censure est sévère et préserve le moral des troupes et des
populations de l’arrière en interdisant toute communication d’informations
alarmantes ou trop précises sur la situation. Ceci est une première
explication.
On peut supposer, d’autre
part, que Paul Moutardier, comme la plupart de ses camarades sûrement, ne
voulait pas alarmer sa famille en se plaignant de ses conditions de vie. Il
suffit d’ailleurs, pour s’en convaincre, de comparer ses correspondances et les
notes secrètes de son carnet personnel (notamment le poème « Non !
Vous ne saurez pas ! » dans lequel l’auteur avoue « Car
vous mentir ainsi, c’est encore le devoir ! »).
La réalité du front, la souffrance des poilus
Malgré la volonté qu’il met
à rassurer ses proches à chaque missive, force est de constater le changement
de ton entre 1915 et 1918, notamment dans les dernières lettres où s’installent
incidieusement lassitude et nostalgie traduisant peut-être la crainte d’un non
retour.
Sur ce dessin retrouvé dans un carnet que
Paul tenait pendant la guerre, la maison représentée ressemble fort au café de
ses parents à Rouvrat, avec dans son prolongement, à gauche, la salle de bal.
Comme l’indique la date qui figure sur ce
dessin, Paul Constant Moutardier l’a fait le 29 août 1917, vraisemblablement le
témoignage d’un des lieux où il a combattu.
En bon Normalien, Paul était féru d’art et de
littérature, Il consignera, dans son carnet personnel : ses dessins, les
poèmes qu’il a écrits, des poèmes classiques, ainsi que les textes d’autres
soldats, notamment d’Arthus, sur les conditions de vie dans les tranchées.
Ce poème « A
l’heure du rêve » écrit par Paul est-il une allusion au film muet
français réalisé par Léonce Perret (réalisateur de films patriotiques pendant
la guerre), sorti en 1915 ?
En plus de poèmes personnels, Paul Constant
Moutardier a recopié des textes de ses auteurs préférés. Tous traduisent le
mal-être des soldats et les horreurs de la guerre.
On y retrouve le poème de Charles-Marie
Leconte de Lisle : Le Cœur de Hialmar. Paul a dû écrire ce poème de
mémoire car on note quelques mots échangés : Une nuit froide plutôt qu’Une
nuit claire, Mon épaule est trouée plutôt que Mon armure est trouée.
Il a transcrit les textes d’autres soldats,
parmi lesquels Arthus, qui, comme lui, a participé aux combats des Eparges et
qui décrit les difficiles conditions de vie dans les tranchées.
Artus, soldat du 13ème de ligne
comme Paul, composera la chanson du front « Aux
Epargnes ! » dans laquelle il évoque une lettre à son frère, lui
racontant les terribles épreuves qu’il endure.
Les textes intégraux des nombreuses correspondances de Paul
Constant sont proposés dans la brochure « Défendre la Patrie !
Période 1914-1918 » en vente au musée.
P.P
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