Un quinquagénaire qui cache bien des trésors du
patrimoine local.
Par Michel Billard
Du
cours complémentaire de jeunes filles au collège St Ex
Le
collège Saint Exupéry a été construit pour ouvrir à la rentrée de 1970, il y a
donc eu cinquante ans cette année. Les travaux ont commencé en 1969 et il était
à peine terminé en septembre 1970 pour accueillir ses premiers élèves, ceux-ci
ont dû étudier le premier trimestre dans les locaux de l’ancien cours
complémentaire et petit à petit ils ont intégré les salles flambant neuves des
bâtiments « à peine secs » !
Avant d’aborder l’histoire
succincte de ce collège, revenons un petit peu sur l’histoire de ce bâtiment
devenu cours complémentaire de jeunes filles. En
1867 Victor DURUY, ministre de l’instruction, impose aux communes de plus de
cinq cents habitants l’ouverture d’une école de filles (en 1833, la loi
GUIZOT avait fait la même démarche pour les écoles de garçons). La
famille CHAGOT, respectueuse des institutions, après des recherches de fonds et
d’un emplacement satisfaisant, décida donc d’ouvrir la première école de filles
montcellienne en 1870 sur un terrain appartenant aux houillères et faisant le
pendant de l’hôpital des mines, sur un lieu-dit appelé « Le
Monceau ». La construction des bâtiments a été confiée à deux architectes
habitués à travailler avec la famille CHAGOT : Mrs SUISSE et GOICHOT. Ils
élaborèrent un plan que l’on retrouvera dans toutes les écoles de la mine
construites dans les différents quartiers de Montceau (il en reste un
exemplaire à peu près intact avec l’école des Oiseaux).
L’enseignement fut confié aux sœurs de Saint VINCENT de PAUL, il était réservé
aux filles de mineurs uniquement. La formation des jeunes filles en bonnes
mères de famille était la même que dans les autres quartiers de la ville et
elle les conduisait (ou pas) au certificat d’études primaires.
Très rapidement cette école
ajoutera à son programme celui de l’école primaire supérieure en vue de concurrencer
les deux écoles primaires supérieures publiques : pour les filles en rue
Centrale (Carnot) et pour les garçons place de l’hôtel de ville. L’enseignement
était assuré d’abord par des congréganistes aidées petit à petit par des
laïques qui sont restées seules après les grèves de 1900. Le programme
comportait sur trois ans la préparation au Certificat d’Etudes Supérieures, au
Brevet Elémentaire et parfois au Brevet Supérieur. Nous sommes dans un
enseignement de type élémentaire (primaire) qu’il faut distinguer de
l’enseignement secondaire dispensé dans les lycées.
En 1946, à la
nationalisation des houillères, il ne restait plus une seule enseignante
congréganiste mais que des enseignantes laïques à qui on demanda de passer un
C.A.P. pour validation d’acquis en quelque sorte. L’école devint Cours
Complémentaire de Jeunes Filles, elle sera publique, ouverte à toutes sur
concours d’entrée. Elle assura une formation complète préparant au B.E.P.C. et
aux concours d’entrée à l’école normale avec un certain succès. Les
enseignantes étaient réparties entre de jeunes diplômées sortant des écoles
normales et quelques « anciennes des houillères » titularisées dans
le publique. La dernière directrice logeant sur place fut Mme DEBERNARD.
En 1969 la loi Edgar FAURE
supprimant le concours d’entrée en sixième permit donc à tous les élèves de CM2
d’intégrer l’enseignement secondaire. Entre temps (1959) la scolarité avait été
prolongée de 14 à 16 ans, il a fallu absorber cet afflux d’élèves. On a donc
installé dans chaque groupe scolaire de quartier des G.O.D. (Groupe
d’orientation dispersé) qui accueillaient les élèves locaux au niveau de la
sixième et de la cinquième (après le CM2) les deux années de formation
devenaient le cycle 1 et il y avait effectivement un palier d’orientation à
l’issue. Le « Que-que » comme on disait à l’époque fut transformé en
C.E.G. (Collège d’enseignement général) et sa dernière directrice fut Jeanne
FOREST, elle assurera la transition avec l’étape suivante : l’ouverture du
Collège SAINT EXUPERY.
La loi d’orientation d’EDGAR
FAURE ministre de l’éducation nationale prévoyait l’ouverture d’un collège dès
que la population d’une commune atteignait cinq mille habitants. En ce qui
concerne Montceau, le collège JEAN MOULIN récemment construit, devenait déjà
insuffisant, il fallait envisager d’en élever un deuxième. La décision de
principe fut prise en conseil municipal et les négociations avec le département
commencèrent pour décider de la construction et surtout de son implantation.
Compte tenu des prévisions d’accroissement de la population, il fallait envisager
un établissement suffisamment grand et ce ne fut pas en vain car le collège
accueillera jusqu’à mille deux cents élèves. Mais son emplacement donnera lieu
à beaucoup de discussions : agrandir les bâtiments du cours complémentaire
n’était pas réaliste, la place n’étant pas suffisante et il fallait transformer
certaines salles ; il fut donc décidé de construire un ensemble de
bâtiments neufs à côté du C.E.G. Les plans furent confiés à l’architecte
départemental Mr PALAZZI qui reprit le schéma classique des constructions
scolaires départementales mais avec des matériaux plus traditionnels, il
fallait éviter les critiques engendrées par l’incendie du collège Pailleron.
Mais, avant de commencer les
constructions, il fallait faire place nette. En effet, l’avenue de l’hôpital
tournait à droite au ras du CEG pour aboutir à des barrières gardées permettant
de franchir la voie ferrée et de rejoindre la rue du Château. A gauche de cette
rue, il y avait des habitations utilisées par les infirmiers de l’hôpital et
leurs jardins ainsi que la ferme « du Monceau », celle-là même qui a
donné son nom à la ville minière. Ces habitations n’étant pas en bon état, on
relogera les habitants et on démolira tout cet ensemble faisant fi des traces
du patrimoine local. Le mur de clôture du CEG a été également démoli mais on a
eu la bonne idée de garder un local au fond de la cour qui servait de gymnase
aux filles du collège mais surtout de lieu d’entraînement au club de
gymnastique féminine : Montceau Femina. C’est en effet dans ces deux
salles que furent formées celles qui firent connaître le nom de la ville dans
toute la France et même au-delà. Monique ROSSI, Denise BROSSARD, Anne Marie
BADET, Jacqueline BRISEPIERRE, Annie BOBIN, Nicole BOURDIAU et bien d’autres
par la suite ont répété leurs gammes sur du matériel qui ferait fuir les
gymnastes d’aujourd’hui. Elles ont donné au club ses lettres de noblesse et ont
contribué à la notoriété de la ville. Quel dommage que ce haut lieu de la
gymnastique montcellienne et nationale soit aujourd’hui menacé de
démolition !
Le collège s’est construit
normalement à partir de l’hiver 1970, il comporte un grand bâtiment en L
délimitant à l’intérieur une cour de récréation. D’un côté, toutes les salles
de cours sur trois étages et de l’autre, un préau couvert surmonté par une
cantine pouvant accueillir deux cents personnes à la fois par tables de quatre,
une cuisine super équipée et des salles servant d’ateliers, une pour le bois
l’autre pour le fer. Au croisement du L : tous les bureaux administratifs
et la loge du concierge qui habitait sur place. Une fois les bâtiments
scolaires terminés, ce fut le tour des logements de fonction et le gymnase
(COSEC) fut installé à l’emplacement même de la ferme du Monceau. Ensuite, il a
fallu reconstruire l’avenue de l’Hôpital qui a désormais fait le tour de tout
cet ensemble en incluant une zone réservée à l’arrêt des bus scolaires.
L’ouverture au 15 septembre 1970 fut problématique, les travaux n’étant pas terminés à temps, c’est donc dans le bâtiment du CEG que les premiers cours ont eu lieu, surveillés par une administration qui, elle aussi, avait été obligée de s’installer dans ces mêmes locaux. La directrice nommée pour ouvrir cet établissement : Alice BESSEYRIAS fut remarquablement aidée par Jeanne FOREST qui termina sa carrière comme principale adjointe du collège (avec une prime substantielle pour mettre en place progressivement un enseignement de qualité). Le personnel enseignant était composé d’anciennes enseignantes du CEG qui ne reconnaissaient que l’autorité de Jeanne FOREST leur « patronne », et de nouveaux professeurs nommés pour l’ouverture et qui eux se référaient à l’autorité officielle de la principale. Cette situation a donné parfois lieu à des quiproquos assez savoureux ! Mais petit à petit, tout le monde fonctionna au mieux, la retraite de Jeanne FOREST et l’augmentation du nombre d’enseignants professeurs ou PEGC mit finalement tout le monde d’accord.
Photographie le JSL-Martine
Victorof
Pendant cinquante ans,
l’équipe éducative a formé pas loin de cinquante mille élèves garçons et filles
venant de la ZUP du Plessis, du Bois du Verne et de Blanzy. Certains sont
devenus célèbres pour des raisons musicales, artistiques ou sportives, citons pèle-
mêle : Jean Paul FOUCHECOURT, Christophe ALEVEQUE, Guillaume WARMUZ, et
bien-sûr les sœurs AUDIN Nadine et Martine. Mais ce que nous retiendrons
principalement ce sont les travaux des enseignants et des élèves qui ont abouti
à des réalisations qui ont largement dépassé le cadre du collège.
Photographie le JSL-Martine
Victorof
En 1975, Suzanne REIGNER,
professeur d’histoire et de géographie eut l’idée de faire travailler deux
classes dans le cadre du centenaire des lois de Jules FERRY. Ce travail dont
nous passerons les détails, a abouti à une exposition sur l’école des anciens
installée dans le gymnase du collège. Cette exposition admirée par un groupe de
professeurs italiens a concouru à la Biennale de Venise où elle fut primée. De
retour à Montceau elle sera à l’origine de ce qui est aujourd’hui « La
Maison d’Ecole » le seul musée sur le territoire de la commune.
Photographie musée
C’est Dany PERNETTE,
professeur d’arts plastiques qui eut l’idée de monter un atelier danse moderne
avec les filles volontaires du collège. Cet atelier fonctionnait dans le
gymnase du collège les mercredis et samedis après-midi et donnait une
représentation en fin d’année scolaire. Mais, les filles grandissant, elles se
sont retrouvées au lycée et l’atelier s’est ouvert à d’autres venant
d’établissements scolaires voisins. Ce groupe a comporté jusqu’à une
quarantaine d’individus (il y avait très peu de garçons) et le spectacle de fin
d’année devenait impressionnant. Il eut lieu dans la grande salle de
l’Embarcadère pleine à chaque représentation. Nathalie PERNETTE a continué le
travail commencé par son père, elle a monté sa propre compagnie de danse avec
le succès qu’on lui connait actuellement.
Photographie musée
Bien-sûr, à l’intérieur du
collège, des actions éducatives ont vu le jour pratiquement tous les ans :
le projet « Petit Prince » animé par Georges GUIDARD à la tête d’une
équipe pluridisciplinaire a permis à toute une classe de prendre un baptême de
l’air ; le challenge de la classe la plus sportive a permis tous les ans à
une classe de cinquième et de troisième de découvrir des activités sportives de
pleine nature ; mais le projet sans doute le plus novateur a été conduit
par Jacques PROST animant une équipe composée de Roland MARTINET, Jean Pierre
BESSEYRIAS et Annie BONNARD. Il consistait à emmener les classes de CPA et de
CPPN passer une semaine mixte travail scolaire et ski dans le Jura, on peut
dire qu’à l’époque on sollicitait très peu ces classes dites défavorisées pour
ce genre d’action. C’est en 2005 que sous l’impulsion d’une professeure d’EPS
nommée prof. principale qu’une classe de sixième a travaillé toute l’année sur
le thème des jeux olympiques, ce projet pluridisciplinaire a conduit les élèves
au Musée Olympique de Lausanne et l’année s’est terminée par la rencontre avec
Adrien HARDY champion olympique d’aviron l’année précédente à Athènes. On
redécouvre 15 ans après ce genre de travail qui est pompeusement baptisé
« classes olympiques » et qui est bien-sûr assorti de subventions substantielles
alors qu’à l’époque on utilisait l’argent de l’établissement.
Photographie musée
Aujourd’hui on peut dire que
notre quinquagénaire se porte plutôt bien, mais ce qui est remarquable c’est
aussi la bonne tenue du bâtiment d’origine qui en cent cinquante ans a vu
passer toutes les réformes de l’enseignement sur ce haut lieu du patrimoine
montcellien. Nous regretterons que le bâtiment qui a vu s’épanouir les
meilleures gymnastes françaises de l’époque ne soit pas conservé au titre du
passé, déjà que le gymnase de la Montcellienne, berceau des gammes de Henri
BOERIO, n’existe plus sous cette appellation, il est devenu un atelier
municipal …….
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