lundi 15 février 2021

Collège Saint-Exupéry

 

Un quinquagénaire qui cache bien des trésors du patrimoine local.

Par Michel Billard

Du cours complémentaire de jeunes filles au collège St Ex

Le collège Saint Exupéry a été construit pour ouvrir à la rentrée de 1970, il y a donc eu cinquante ans cette année. Les travaux ont commencé en 1969 et il était à peine terminé en septembre 1970 pour accueillir ses premiers élèves, ceux-ci ont dû étudier le premier trimestre dans les locaux de l’ancien cours complémentaire et petit à petit ils ont intégré les salles flambant neuves des bâtiments « à peine secs » !


Avant d’aborder l’histoire succincte de ce collège, revenons un petit peu sur l’histoire de ce bâtiment devenu cours complémentaire de jeunes filles. En 1867 Victor DURUY, ministre de l’instruction, impose aux communes de plus de cinq cents habitants l’ouverture d’une école de filles (en 1833, la loi GUIZOT avait fait la même démarche pour les écoles de garçons). La famille CHAGOT, respectueuse des institutions, après des recherches de fonds et d’un emplacement satisfaisant, décida donc d’ouvrir la première école de filles montcellienne en 1870 sur un terrain appartenant aux houillères et faisant le pendant de l’hôpital des mines, sur un lieu-dit appelé « Le Monceau ». La construction des bâtiments a été confiée à deux architectes habitués à travailler avec la famille CHAGOT : Mrs SUISSE et GOICHOT. Ils élaborèrent un plan que l’on retrouvera dans toutes les écoles de la mine construites dans les différents quartiers de Montceau (il en reste un exemplaire à peu près intact avec l’école des Oiseaux). L’enseignement fut confié aux sœurs de Saint VINCENT de PAUL, il était réservé aux filles de mineurs uniquement. La formation des jeunes filles en bonnes mères de famille était la même que dans les autres quartiers de la ville et elle les conduisait (ou pas) au certificat d’études primaires.




Très rapidement cette école ajoutera à son programme celui de l’école primaire supérieure en vue de concurrencer les deux écoles primaires supérieures publiques : pour les filles en rue Centrale (Carnot) et pour les garçons place de l’hôtel de ville. L’enseignement était assuré d’abord par des congréganistes aidées petit à petit par des laïques qui sont restées seules après les grèves de 1900. Le programme comportait sur trois ans la préparation au Certificat d’Etudes Supérieures, au Brevet Elémentaire et parfois au Brevet Supérieur. Nous sommes dans un enseignement de type élémentaire (primaire) qu’il faut distinguer de l’enseignement secondaire dispensé dans les lycées.



En 1946, à la nationalisation des houillères, il ne restait plus une seule enseignante congréganiste mais que des enseignantes laïques à qui on demanda de passer un C.A.P. pour validation d’acquis en quelque sorte. L’école devint Cours Complémentaire de Jeunes Filles, elle sera publique, ouverte à toutes sur concours d’entrée. Elle assura une formation complète préparant au B.E.P.C. et aux concours d’entrée à l’école normale avec un certain succès. Les enseignantes étaient réparties entre de jeunes diplômées sortant des écoles normales et quelques « anciennes des houillères » titularisées dans le publique. La dernière directrice logeant sur place fut Mme DEBERNARD.



En 1969 la loi Edgar FAURE supprimant le concours d’entrée en sixième permit donc à tous les élèves de CM2 d’intégrer l’enseignement secondaire. Entre temps (1959) la scolarité avait été prolongée de 14 à 16 ans, il a fallu absorber cet afflux d’élèves. On a donc installé dans chaque groupe scolaire de quartier des G.O.D. (Groupe d’orientation dispersé) qui accueillaient les élèves locaux au niveau de la sixième et de la cinquième (après le CM2) les deux années de formation devenaient le cycle 1 et il y avait effectivement un palier d’orientation à l’issue. Le « Que-que » comme on disait à l’époque fut transformé en C.E.G. (Collège d’enseignement général) et sa dernière directrice fut Jeanne FOREST, elle assurera la transition avec l’étape suivante : l’ouverture du Collège SAINT EXUPERY. 



La loi d’orientation d’EDGAR FAURE ministre de l’éducation nationale prévoyait l’ouverture d’un collège dès que la population d’une commune atteignait cinq mille habitants. En ce qui concerne Montceau, le collège JEAN MOULIN récemment construit, devenait déjà insuffisant, il fallait envisager d’en élever un deuxième. La décision de principe fut prise en conseil municipal et les négociations avec le département commencèrent pour décider de la construction et surtout de son implantation. Compte tenu des prévisions d’accroissement de la population, il fallait envisager un établissement suffisamment grand et ce ne fut pas en vain car le collège accueillera jusqu’à mille deux cents élèves. Mais son emplacement donnera lieu à beaucoup de discussions : agrandir les bâtiments du cours complémentaire n’était pas réaliste, la place n’étant pas suffisante et il fallait transformer certaines salles ; il fut donc décidé de construire un ensemble de bâtiments neufs à côté du C.E.G. Les plans furent confiés à l’architecte départemental Mr PALAZZI qui reprit le schéma classique des constructions scolaires départementales mais avec des matériaux plus traditionnels, il fallait éviter les critiques engendrées par l’incendie du collège Pailleron.



Mais, avant de commencer les constructions, il fallait faire place nette. En effet, l’avenue de l’hôpital tournait à droite au ras du CEG pour aboutir à des barrières gardées permettant de franchir la voie ferrée et de rejoindre la rue du Château. A gauche de cette rue, il y avait des habitations utilisées par les infirmiers de l’hôpital et leurs jardins ainsi que la ferme « du Monceau », celle-là même qui a donné son nom à la ville minière. Ces habitations n’étant pas en bon état, on relogera les habitants et on démolira tout cet ensemble faisant fi des traces du patrimoine local. Le mur de clôture du CEG a été également démoli mais on a eu la bonne idée de garder un local au fond de la cour qui servait de gymnase aux filles du collège mais surtout de lieu d’entraînement au club de gymnastique féminine : Montceau Femina. C’est en effet dans ces deux salles que furent formées celles qui firent connaître le nom de la ville dans toute la France et même au-delà. Monique ROSSI, Denise BROSSARD, Anne Marie BADET, Jacqueline BRISEPIERRE, Annie BOBIN, Nicole BOURDIAU et bien d’autres par la suite ont répété leurs gammes sur du matériel qui ferait fuir les gymnastes d’aujourd’hui. Elles ont donné au club ses lettres de noblesse et ont contribué à la notoriété de la ville. Quel dommage que ce haut lieu de la gymnastique montcellienne et nationale soit aujourd’hui menacé de démolition !



Le collège s’est construit normalement à partir de l’hiver 1970, il comporte un grand bâtiment en L délimitant à l’intérieur une cour de récréation. D’un côté, toutes les salles de cours sur trois étages et de l’autre, un préau couvert surmonté par une cantine pouvant accueillir deux cents personnes à la fois par tables de quatre, une cuisine super équipée et des salles servant d’ateliers, une pour le bois l’autre pour le fer. Au croisement du L : tous les bureaux administratifs et la loge du concierge qui habitait sur place. Une fois les bâtiments scolaires terminés, ce fut le tour des logements de fonction et le gymnase (COSEC) fut installé à l’emplacement même de la ferme du Monceau. Ensuite, il a fallu reconstruire l’avenue de l’Hôpital qui a désormais fait le tour de tout cet ensemble en incluant une zone réservée à l’arrêt des bus scolaires.



L’ouverture au 15 septembre 1970 fut problématique, les travaux n’étant pas terminés à temps, c’est donc dans le bâtiment du CEG que les premiers cours ont eu lieu, surveillés par une administration qui, elle aussi, avait été obligée de s’installer dans ces mêmes locaux. La directrice nommée pour ouvrir cet établissement : Alice BESSEYRIAS fut remarquablement aidée par Jeanne FOREST qui termina sa carrière comme principale adjointe du collège (avec une prime substantielle pour mettre en place progressivement un enseignement de qualité). Le personnel enseignant était composé d’anciennes enseignantes du CEG qui ne reconnaissaient que l’autorité de Jeanne FOREST leur « patronne », et de nouveaux professeurs nommés pour l’ouverture et qui eux se référaient à l’autorité officielle de la principale. Cette situation a donné parfois lieu à des quiproquos assez savoureux ! Mais petit à petit, tout le monde fonctionna au mieux, la retraite de Jeanne FOREST et l’augmentation du nombre d’enseignants professeurs ou PEGC mit finalement tout le monde d’accord.


Photographie le JSL-Martine Victorof


Pendant cinquante ans, l’équipe éducative a formé pas loin de cinquante mille élèves garçons et filles venant de la ZUP du Plessis, du Bois du Verne et de Blanzy. Certains sont devenus célèbres pour des raisons musicales, artistiques ou sportives, citons pèle- mêle : Jean Paul FOUCHECOURT, Christophe ALEVEQUE, Guillaume WARMUZ, et bien-sûr les sœurs AUDIN Nadine et Martine. Mais ce que nous retiendrons principalement ce sont les travaux des enseignants et des élèves qui ont abouti à des réalisations qui ont largement dépassé le cadre du collège.


Photographie le JSL-Martine Victorof


En 1975, Suzanne REIGNER, professeur d’histoire et de géographie eut l’idée de faire travailler deux classes dans le cadre du centenaire des lois de Jules FERRY. Ce travail dont nous passerons les détails, a abouti à une exposition sur l’école des anciens installée dans le gymnase du collège. Cette exposition admirée par un groupe de professeurs italiens a concouru à la Biennale de Venise où elle fut primée. De retour à Montceau elle sera à l’origine de ce qui est aujourd’hui « La Maison d’Ecole » le seul musée sur le territoire de la commune.



Photographie musée


C’est Dany PERNETTE, professeur d’arts plastiques qui eut l’idée de monter un atelier danse moderne avec les filles volontaires du collège. Cet atelier fonctionnait dans le gymnase du collège les mercredis et samedis après-midi et donnait une représentation en fin d’année scolaire. Mais, les filles grandissant, elles se sont retrouvées au lycée et l’atelier s’est ouvert à d’autres venant d’établissements scolaires voisins. Ce groupe a comporté jusqu’à une quarantaine d’individus (il y avait très peu de garçons) et le spectacle de fin d’année devenait impressionnant. Il eut lieu dans la grande salle de l’Embarcadère pleine à chaque représentation. Nathalie PERNETTE a continué le travail commencé par son père, elle a monté sa propre compagnie de danse avec le succès qu’on lui connait actuellement.


Photographie musée


Bien-sûr, à l’intérieur du collège, des actions éducatives ont vu le jour pratiquement tous les ans : le projet « Petit Prince » animé par Georges GUIDARD à la tête d’une équipe pluridisciplinaire a permis à toute une classe de prendre un baptême de l’air ; le challenge de la classe la plus sportive a permis tous les ans à une classe de cinquième et de troisième de découvrir des activités sportives de pleine nature ; mais le projet sans doute le plus novateur a été conduit par Jacques PROST animant une équipe composée de Roland MARTINET, Jean Pierre BESSEYRIAS et Annie BONNARD. Il consistait à emmener les classes de CPA et de CPPN passer une semaine mixte travail scolaire et ski dans le Jura, on peut dire qu’à l’époque on sollicitait très peu ces classes dites défavorisées pour ce genre d’action. C’est en 2005 que sous l’impulsion d’une professeure d’EPS nommée prof. principale qu’une classe de sixième a travaillé toute l’année sur le thème des jeux olympiques, ce projet pluridisciplinaire a conduit les élèves au Musée Olympique de Lausanne et l’année s’est terminée par la rencontre avec Adrien HARDY champion olympique d’aviron l’année précédente à Athènes. On redécouvre 15 ans après ce genre de travail qui est pompeusement baptisé « classes olympiques » et qui est bien-sûr assorti de subventions substantielles alors qu’à l’époque on utilisait l’argent de l’établissement.


Photographie musée


Aujourd’hui on peut dire que notre quinquagénaire se porte plutôt bien, mais ce qui est remarquable c’est aussi la bonne tenue du bâtiment d’origine qui en cent cinquante ans a vu passer toutes les réformes de l’enseignement sur ce haut lieu du patrimoine montcellien. Nous regretterons que le bâtiment qui a vu s’épanouir les meilleures gymnastes françaises de l’époque ne soit pas conservé au titre du passé, déjà que le gymnase de la Montcellienne, berceau des gammes de Henri BOERIO, n’existe plus sous cette appellation, il est devenu un atelier municipal …….


Photographie 150 ans du collège


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