Qui
suis-je ?
Ma sépulture au cimetière du
Père-Lachaise où ma dépouille fut ramenée en 1817
Je
naquis en 1621, il y a tout juste 400 ans…
Admirateur d’Esope et
d’Hippocrate, inspirateur d’Yvan Krylov, je fus un homme affable. « En
vers » et contre tous, j’ai brocardé les grands et même celui qui
m’anoblit en 1664. Fouquet, mon maître et protecteur, m’entraîna dans sa
déchéance, le soleil devenu roi lui ayant brûlé les ailes. En 1684, j’entrai
tout de même à l’Académie française, un an après mon ami Boileau. Depuis, bien
des écoliers ont visité mon bestiaire et 335 écoles portent mon nom…
« Je chante les héros dont Esope est le père,
Troupe de qui l’histoire, encor que mensongère,
Contient des vérités qui servent de leçons.
Tout parle en mon ouvrage, et même les poissons :
Ce qu’ils disent s’adresse à tous tant que nous sommes.
Je me sers d’animaux pour instruire les hommes. »
Jean de La Fontaine, par Hyacinthe Rigaud (© château de Versailles)
Les
premiers livres de fables d’après
Ésope de Jean de La Fontaine sont publiés en 1668 sous le titre Les Fables choisies mises en vers par
Monsieur de La Fontaine (1). La
série de ces livres, numérotés de I à IV était dédiée au Dauphin Louis de France, fils de
Louis XIV, alors âgé de sept ans. Malgré les apparences, ses écrits ne
s’adressent cependant pas aux enfants, ses intentions sont satiriques, inhérentes
au genre de la fable et elles donnent lieu à une critique à peine déguisée du
pouvoir de l’époque.
Les morales
de ses fables, quelquefois ambiguës et sujettes à interprétation feront dire à
Jean-Jacques Rousseau qu’elles n’étaient pas « à donner à lire aux enfants » et « n’étaient pas de nature à leur permettre, à leur âge, de
distinguer le bien du mal, et relativisaient paradoxalement la valeur morale
des fables (..) elles risquaient d’encourager les mauvaises mœurs en valorisant
des exemples discutables ». Il n’empêche qu’avec l’avènement de
l’école de Jules Ferry, l’école a popularisé l’œuvre du fabuliste par le biais
de la fameuse récitation, tant et si bien que ses écrits constituent encore, de
nos jours, le principal patrimoine poétique commun à toutes les générations,
tous milieux confondus !
Si les
fables furent transposées dans tous les genres : BD, album,
enregistrements sonores, films, elles furent, dès l’origine, une source
inépuisable d’inspiration pour les illustrateurs. On note la permanence de l’inscription
de La Fontaine dans la liste des œuvres proposées par les ministères successifs.
On a même vu un recueil de cet auteur, édité par Canopé, distribué aux élèves
de CM2 dans le cadre de l’opération « Un livre pour les vacances »
depuis 2017(2).
La
tradition séculaire d’étude, de lecture ou de « récitation » des
fables de La Fontaine perdure donc et au-delà de l’école primaire (3).
Mais aurait-il pu imaginer que la « réclame » s’emparerait de son
image dans les années 60 ?
Buvards et protège-cahiers
Les fables de La Fontaine dans les manuels
Les fables de La Fontaine en images d’Epinal
Image d’Epinal®, GallicaBnF
(1) :
(2) : L'opération « Un livre pour les
vacances » s'inscrit dans le cadre de la mobilisation en
faveur du livre et de la lecture, avec pour objectif d'encourager la lecture personnelle des élèves. Un recueil composé d'une sélection de 25 fables de
La Fontaine, illustré par Emmanuel Guibert et édité par Canopé,
est remis aux élèves de CM2. Le choix
d'un autre illustrateur contemporain, après Sfar et Voutch, rappelle combien
les Fables de La Fontaine trouvent un écho dans notre société. La remise du
livre aux élèves est organisée par les professeurs dans le respect des règles
sanitaires. Avant les congés d'été, en classe ou à distance et selon les
modalités qui paraîtront les plus appropriées et compatibles avec la situation, un temps de présentation
de l'ouvrage est prévu pour susciter l'intérêt et l'envie de lire de chaque
écolier. Adaptée à l'âge
et aux capacités de lecture des enfants, cette opération leur donne accès à une
œuvre majeure du patrimoine littéraire à lire durant l'été. Dès la rentrée, les
professeurs de collège (français, enseignement moral et civique, arts
plastiques notamment) peuvent exploiter cette lecture estivale en s'appuyant
sur les ressources mises à leur disposition.
(3) : « Tous les niveaux de la scolarité
tirent profit de cette richesse d’imagination et de pensée, et offrent
l’occasion d’un travail sur la compréhension des textes, sur l’esprit critique,
sur les pouvoirs de la fiction, de l’imaginaire et de l’humour.
Aux
cycles 2 et 3
La
lecture et l’étude de quelques fables invitent à une approche par la lecture
orale, à la faveur d’un déchiffrage accompagné et progressif tout au long des
deux cycles.
Si
la dimension vivante et plaisante des fables rend accessible leur
représentation et nourrit l’imagination, le genre permet aussi d’accéder à la
dimension symbolique du récit, à la perception de l’humour et à la
compréhension de l’implicite.
Le
travail peut se centrer sur les personnages et leurs valeurs, la perception de
la tonalité, à travers la mise en voix, la récitation, l’illustration, la mise
en scène du récit ou le débat sur la conduite de tel ou tel personnage.
Au
cycle 3, différentes entrées du programme de français (« Héros /héroïnes et
personnages », « La morale en questions », « Imaginer, dire et célébrer
le monde », « Résister au plus fort… ») sont autant de moments
privilégiés pour développer la connaissance de La Fontaine.
Les
professeurs peuvent exploiter les éditions 2018, 2019 et 2020 du « Livre pour les vacances », sélections de fables de La
Fontaine, illustrées respectivement par Joann Sfar, Voutch et Emmanuel Guibert.
L’édition 2020 est accessible en ligne et libre de droits.
Au
cycle 4
Les
mêmes activités peuvent conduire à une étude plus approfondie au cycle 4, qui
permet notamment de passer de la morale individuelle aux enjeux sociaux, par
une prise en compte des contextes, et d’approcher ainsi toutes les richesses de
la satire.
Diverses
entrées du programme de français constituent autant d’occasions d’aller plus
loin dans la réflexion proposée par La Fontaine avec ses Fables : ainsi, en 5e,
avec « Vivre
en société, participer à la société », « Avec autrui : familles,
amis, réseaux », ce qu’interrogent de nombreuses fables, ou
avec le questionnement complémentaire « L’homme est-il le maître de la nature ? » ; en
4e, c’est en contrepoint du programme que les fables peuvent jouer, parce
qu’elles ouvrent de nouvelles perspectives sur « Individu et société –
confrontation de valeurs », voire sur « La fiction pour interroger le réel » ; enfin,
en 3e, on retrouve La Fontaine parmi les possibles de « Dénoncer les travers de la
société ». Les projets pédagogiques peuvent trouver dans le
dialogue des disciplines un cadre particulièrement propice.
Au
lycée
L’ambiguïté
et la subtilité des fables offrent un terrain d’exploration qu’il convient
d’adapter à la maturité intellectuelle des élèves. Leur portée philosophique
peut désormais être étudiée pleinement, qu’il s’agisse de la rencontre de
l’Autre, de la Nature, de la question de la Cité, du statut de l’animal, ou des
débats épistémologiques qui travaillent les textes, de manière souterraine ou
explicitement.
Dans
les classes de premières générales et technologiques, les programmes nationaux
d’œuvres pour l’enseignement du français, renouvelables, peuvent être propices
à un tel travail. C’est le cas en 2020-2021, par la présence de plusieurs
livres des Fables dans l’objet d’étude « La Littérature d’idées du XVIe au XVIIIe
siècle ». Mais la richesse des Fables est telle qu’elles
peuvent éclairer bien d’autres objets d’enseignement et ne doit pas cantonner
le travail aux seules classes de première. Ainsi, en seconde générale et
technologique par exemple, l’objet d’étude « La poésie du Moyen Âge au XVIII siècle »
et les exercices d’expression orale et écrite recommandés par les programmes
constituent une entrée particulièrement pertinente. » (https://eduscol.education.fr/2362/en-2021-fetons-la-fontaine,
année scolaire 2020-2021)
P.P
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