jeudi 20 octobre 2022

Les illustrations de Dascher-chapitre 9

 

Les illustrations de Georges Dascher

Chapitre 9

Le sport


Quand la mythique Sparte secoue les bancs de la Convention

Sous la Convention (21 septembre 1792-26 octobre 1795), les législateurs définissent les bases de l’éducation des jeunes citoyens et, notamment, leur éducation physique obligatoire, seul moyen de « régénérer » les jeunes corps selon eux. Les guerres révolutionnaires, puis napoléoniennes, qui avaient impressionné l’Europe entière par la résistance physique des soldats français, renverront aux calendes grecques ce remarquable élan. Il faudra attendre la défaite de 1870 pour voir se développer le sport à l’école.



La défaite de Waterloo et les 55 années de paix qui suivirent, sonnèrent le glas de la présumée vitalité du peuple français. Le premier coup de semonce vint du désastre de 1870. La supériorité de l’éducation allemande fut mise en avant et l’école française fut le bouc-émissaire de la défaite. La nouvelle Troisième République du 4 septembre 1870 vit alors sa revanche possible dans l’application du rapport Condorcet  de 1792 (1) et en développant, entre autres, l’éducation physique à l’école. Dès 1880, les exercices militaires, dont les filles étaient évidemment exclues, en sont la traduction. Ces dernières attendront 1882 pour voir leur développement physique pris en compte.


La naissance du sport

Les activités physiques, plus que l’éducation physique sont donc devenues obligatoires, non sans arrière-pensée nationaliste, mais l’évolution du sport en général viendra d’autres cieux, surtout d’Angleterre, où le sport est très organisé entre athlétisme et jeux collectifs, et un peu de Suède pour la gymnastique. En cette fin de 19e siècle, la France s’inspire donc du modèle anglais que les élites étudiantes et aristocratiques ont façonné dans leurs clubs sportifs. En 1887 est créée l’Union des sociétés françaises des sports athlétiques qui regroupe la plupart des sports nés en Angleterre. Il faudra attendre 1912 pour qu’apparaisse notre identité sportive « nationale » qui se construira autour de la méthode dite « naturelle » de Georges Hébert, chargé de l’instruction de la gymnastique à l’Ecole des Fusiliers Marins et farouche opposant à la méthode suédoise.


En attendant, les leçons s’exécutent dans la cour de l’école, caractérisées par une succession de mouvements mécaniques des enfants, guidés par un maître à la formation à l’EPS souvent sommaire. 


Quelques agrès vinrent cependant agrémenter les leçons dans les écoles les plus équipées, mais les écoles de campagne en restèrent longtemps au grimper de corde sous le préau de la cour de récréation et à la leçon de natation, « à sec » dirons-nous, avec des mouvements appris à plat ventre sur un banc (méthode militaire) !



Apprentissage de la natation au régiment

Apprentissage de la natation à l’école

Quoiqu’il en soit, c’est grâce au Français Pierre de Coubertin que les Jeux Olympiques sont de retour en 1896, ce qui, à terme, donnera une impulsion décisive à l’éducation sportive. Les Jeux de la première olympiade (Ολυμπιακοί Αγώνες en grec) eurent lieu, comme il se doit, à Athènes. 240 athlètes s’affrontèrent dans 42 épreuves. Les sportifs de la délégation française, au nombre de 13, remporteront 11 médailles dont 5 en or. C’est à Paris que les jeux suivants furent organisés en 1900, année de l’Exposition universelle (2). La France sortit vainqueur de ces jeux avec 102 médailles dont 27 en or et, pour la première fois, on nota la participation de 22 femmes (dont 9 françaises), contre près d’un millier d’hommes… Ces dernières ne concoururent que dans 5 épreuves : le tennis, la voile, le croquet, l’équitation et le golf. Hélène Prévost ramena une médaille d’argent en tennis, dans le simple dame, première médaille féminine française.  Toutefois, l’immense majorité des participants à ces jeux appartenaient à l’élite sociale car le sport en général était encore pratiqué majoritairement par des hommes, occidentaux et fortunés, une évidence.

Une évidence, en effet. L’époque n’était pas à l’émancipation des classes laborieuses, mais plutôt à la colonisation des races « inférieures », à l’image des Jeux olympiques de 1904, organisés à Saint-Louis, dans le Missouri (auxquels la France ne participa pas du fait de l’éloignement et du coût du voyage). L’Exposition universelle ayant lieu là-bas, en même temps que les jeux, certains anthropologues avisés organisèrent des Jeux « anthropologiques », mettant à l’épreuve des « indigènes » exhibés dans les différents pavillons coloniaux, afin de démontrer l’infériorité physique et probablement intellectuelle des « peuples de race non-blanche ». Pendant plusieurs jours, un large public assistera à ces épreuves humiliantes.



L’éducation physique à l’école, enfin ?

L’éducation physique naît officiellement le 22 décembre 1904 par un décret signé de la main d’Emile Loubet, Président de la République, en personne. Nul doute que cette éducation reste toujours toute militaire puisqu’il est question d’en appliquer les principes dans « les manuels de guerre, l’instruction publique et les sociétés de gymnastique ». Du reste, la commission ministérielle mixte qui travailla sur le projet était composée de spécialistes du sport scolaire dans le pays, mais aussi d’un général d’armée, commission mixte ne voulant pas dire que des femmes y participaient.



Extrait du Manuel général de l’Instruction publique, 1906 (education.persee.fr)

En définitive, jusqu’aux années 1930, l’éducation physique restera le parent pauvre de l’éducation. Il faudra attendre l’avènement du Front populaire, puis la triste époque de Vichy pour qu’elle y trouve sa place (3).

Le sport vu par Georges Dascher

Série de couvertures de cahier vers 1900











Collection La Foire au pain d’Epice ou le sport spectacle

Editeur Camille Charrier, illustration Georges Dascher, 1895




Sources :

-       Iconographie et documentation musée.

-       https://www.les-sports.info/calendrier-sport-1900-p0-61900.html

-       Aide à l’illustration :  reseau-canope.fr ; gdascher.jimdofree.com

 

Patrick PLUCHOT

(1) :


Marie-Jean-Antoine-Nicolas Caritat, marquis de Condorcet (© Bibliothèque de l'Assemblée nationale)

Rapport et projet de décret relatif à l’organisation générale de l’Instruction publique. Présentation à l’Assemblée législative, le 20 et 21 avril 1792. Texte intégral sur :

https://www.assemblee-nationale.fr/histoire/7ed.asp

 

« La gymnastique ne sera point oubliée ; mais on aura soin d'en diriger les exercices de manière à développer toutes les forces avec égalité, à détruire les effets des habitudes forcées que donnent les diverses de travaux. Si l'on reproche à ce plan de renfermer une instruction trop étendue, nous pourrons répondre qu'avec des livres élémentaires bien faits et destinés à être mis entre les mains des enfants, avec le soin de donner aux maîtres des ouvrages composés pour eux, où ils puissent s'instruire de la manière de développer les principes, de se proportionner à l'intelligence des élèves, de leur rendre le travail plus facile, on n'aura point à craindre que l'étendue de cet enseignement excède les bornes de la capacité ordinaire des enfants. Il existe, d'ailleurs, des moyens de simplifier les méthodes, de mettre les vérités à la portée des esprits les moins exercés ; et c'est d'après la connaissance de ces moyens, d'après l'expérience, qu'a été tracé le tableau des connaissances élémentaires qu'il était nécessaire de présenter à tous les hommes, qu'il leur était possible d'acquérir. »


(2) : Revoir l’article du blog, Dascher et l’Exposition universelle de 1900 : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2021/10/les-illustrations-de-georges-dascher.html#more

 

 (3) : Revoir l’article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2022/04/de-jean-zay-au-regime-de-vichy.html#more


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