dimanche 30 octobre 2022

Le creuset intellectuel de la France sacrifié

 

Les promotions de la Grande Guerre

Promotions de l’Ecole Normale de Mâcon

 de  la 1911/1914 à la 1916/1919

Promotion 1912-1915, la plus décimée : 12 morts pour la France sur 30 élèves

Le creuset intellectuel de la France sacrifié

 

La Grande Guerre de 1914-1918 vint perturber au plus haut point la vie des normaliens et du personnel enseignant. Les élèves de l’Ecole normale de Mâcon, comme leurs collègues dans toute la France, furent successivement mobilisés en 6 promotions, depuis celle de 1911-1914, jusqu’à celle de 1916-1919 incluses. Ils subirent des pertes comparables à celles des anciens normaliens mobilisés des 20 autres promotions concernées par l’âge de départ à la guerre. 25 % des effectifs appelés périrent, extrême sacrifice d’instituteurs de bonne volonté, force vive de la Nation, obligés de défendre la cause de la liberté qui leur était si chère.

 

Voir la vidéo en fin d'article


Déménagée dès le début du conflit, l’Ecole Normale de Mâcon fut occupée par un hôpital militaire, pourvu en matériel de couchage avec celui des dortoirs des élèves. Quand ces derniers continuèrent provisoirement à suivre les cours incomplets de professeurs encore non mobilisés, ils durent séjourner pour cela dans des locaux de fortune. Appelés, suivant leur tour, à assurer l’intérim dans les écoles primaires  ou à partir pour la zone de combat, ils ne virent aucune de leur promotion arriver complète au terme de leurs trois années d’études.

 

Ce ne fut qu’en avril 1920, que L’Ecole Normale évacuée par les autorités militaires, puis réparée et assainie, put reprendre ses locaux. Devenus anciens combattants, les jeunes élèves-maîtres dont les études avaient été interrompues, n’acceptèrent guère d’être disciplinés comme des adolescents ! Beaucoup refusèrent de retourner sur les bancs de l’école tandis que d’autres, atteints par des troubles dus aux horreurs de la guerre, ne réintégrèrent pas. Des mesures d’assouplissement du régime normalien furent prises par le Recteur pour maintenir les effectifs. Toutefois, l’Ecole Normale souffrit d’une décroissance du recrutement des élèves entre 1914 et 1919. Aussi, devant ces pertes d’effectifs dues à ce faible recrutement et devant les lourdes pertes dues à la guerre, Monsieur Laurencin, alors Directeur, fut amené à dire, devant l’assemblée générale de l’Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole Normale, réunie le 2 septembre 1920 : « Plus que jamais, l’Ecole laïque, l’Ecole de la République a besoin de serviteurs actifs et dévoués. C’est un devoir pour nous tous de les lui fournir. » Il souhaita aussi que les normaliens ou les ex-normaliens, morts à la guerre, fussent honorés à l’aide de plaques commémoratives à apposer dans le hall de l’Ecole Normale (1).

 

Le 1e septembre 1921, l’Amicale, secondée financièrement par la promotion 1913-1916, réalisa ce vœu en hommage aux 101 disparus. Deux plaques de marbre blanc rappellent depuis leurs noms. Notons que la promotion 1913-1916 fit abandon de sa caisse de voyage de fin d’études « pour la réalisation de cette œuvre de souvenir ». (2)

Diaporama : « Les morts pour la France des promotions de la guerre »

L’Hymne des Normaliens

Dans l’après-guerre immédiate, le chant l’« Hymne des Normaliens » fut composé par deux ex-normaliens de la promotion 1914-1918 : Claude Pariat dit « Claudius » (3) pour la musique et Roger Boeufgras, appelé par la suite Roger Denux, sous un pseudonyme d’écrivain, pour les paroles. Malgré leurs années de combat et de souffrance, ils étaient restés d’enthousiastes jeunes normaliens et leur œuvre fut adoptée par l’Ecole Normale. Sur un rythme plein d’entrain, les paroles nous paraissent, aujourd’hui, un brin désuètes, plus émouvantes qu’humoristiques : elles exaltent la fraternité entre « les bons normaux » de « la vieille école », depuis ceux de la plus ancienne promotion, jusqu’à ceux de la plus jeune, sans oublier « ceux de nos frères »… « morts dans cette guerre »… « pour nous donner plus de bonheur », sans oublier même les « Normaliennes » qu’on évoque, peu discrètement du reste, comme les futures épouses des Normaliens ! Un autre temps, pour sûr…





Sources :

-       Documentation musée et collections du musée.

-       Aperçus historiques sur les Ecoles Normales de Saône-et-Loire, Pierre Gillot, archiviste du musée.

-       Bulletin de l’Amicale n° 48, année 1920, collection musée.

-       Bulletin de l’Amicale n° 49, année 1921, collection musée.

 

(1) : Extraits du Bulletin n°48 de l’Amicale des Anciens Elève de l’Ecole Normale de Mâcon, année 1920 :

 



Discours de M. Laurencin, Directeur de l’Ecole Normale





Discours de M. Point, Président de l’Amicale






Liste provisoire des maîtres Morts pour la France



Les années de guerre à l’Ecole Normale




(2) : Extraits du Bulletin n°49 de l’Amicale des Anciens Elève de l’Ecole Normale de Mâcon, année 1921 : 


Discours de M. Point, Président de l’Amicale et discours de M. Laurencin, Directeur de l’Ecole Normale







(3) : Voir les articles du blog sur Claudius Pariat et la Fanfare des Ecoles Laïques de Montceau : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2021/06/claudius-pariat-defenseur-de-la-cause.html#more et https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2021/06/la-fanfare-des-ecoles-laiques-de.html#more  

 

 

Patrick PLUCHOT


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