« Petite histoire d’un écolier
d’autrefois expliquée aux enfants d'aujourd’hui »
CHAPITRE III
« Les
petits aussi »
Muni de son équipement,
évidemment bien moins lourd que le pesant fardeau que véhiculent les enfants
d’aujourd’hui, Jules cheminait jusqu’à l’école… à pied, bien sûr. Comme il
était le plus âgé, il passait de maison en maison tous les matins, ramassant au
passage les plus jeunes afin de les conduire à l’école maternelle. En effet, depuis
1837, c'est dans les salles d'asile, établissements charitables, qu'étaient
réunis les petits enfants du peuple que leurs mères ne pouvaient garder au
foyer.
C’est l'Ordonnance du 22 décembre 1837 qui
institue ces classes qui portent le nom de "salles d'asile" pour les
enfants de moins de 6 ans. Le personnel qui prend en charge les enfants échappe
à toute formation et à tout contrôle officiel, il peut être religieux, comme ce fut le cas à
Montceau-les-Mines dans le système scolaire patronal de la Mine, ou bien laïque :
"Que n'est-il pas donné à toutes les
communes d'être dotées comme vient de l'être Plombières! Dans un village
obscur, une fille modeste, touchée de voir tant de mères gémir de la
douloureuse alternative de renoncer au travail des champs et de la fabrique ou
à la garde de leurs enfants, Louise Cheppler offrit à son vénérable maître, le
pasteur du Ban de la Roche, de s'en charger elle-même s'il voulait lui bâtir un
abri pour les recevoir. Les larmes aux yeux, Oberlin écouta ce que la charité
lui inspirait : il éleva le refuge et ouvrit, sous le patronage de cette femme
excellente, un asile qui réunissait encore plus d'un demi-siècle après, les
petits enfants d'une commune voisine de l'arrondissement de Saint-Dié, sous sa
garde tutélaire... L'Académie Française décerna en 1829, le prix des bonnes
actions à cette simple villageoise qui avait trouvé dans son cœur la pensée des
asiles". (Extrait d'un discours prononcé par Monsieur Malgras,
Inspecteur d'Académie, lors de l'ouverture d'une salle d'asile à Plombières, le
29 octobre 1860.)
La loi du 30 octobre 1886 met ces classes au
rang d'établissement d'enseignement primaire et elles prennent le nom
"d'écoles maternelles". Le rôle de ces écoles est ainsi défini : ce
sont "des établissements de première
éducation où les enfants des deux sexes reçoivent en commun les soins que
réclame leur développement physique, moral et intellectuel". Elles ne
sont pas obligatoires et accueillent les élèves à partir de 2 ans. Les classes
enfantines, d’autre part, sont des classes annexées à une école primaire de par
la faiblesse de leurs effectifs. "Dès
que l'Etat prend des enfants sous sa tutelle, il leur doit plus qu'un abri, il
leur doit une éducation." (P.Kergomard, 1848).
Les
écoles maternelles peuvent être ouvertes, à l'origine, dans les communes d'au
moins 2000 habitants et le bâtiment doit comprendre :
- un vestibule d'entrée formant salle d'attente
pour les parents qui sont obligés de venir chercher leurs enfants à l'école,
- un ou plusieurs vestiaires,
- une salle de récréation,
- une salle de repos séparée des classes par
une cloison vitrée permettant la surveillance, munie de lits pliants et de
chaises de repos,
- un petit local d'isolement couvert avec des
sanitaires à la taille des jeunes enfants,
- une ou plusieurs salles de classe,
- un préau accessible à partir des classes par
un passage abrité et muni d'une armoire pour les jouets et d'une fontaine d'eau
potable,
- une auge à sable et des bancs en bois.
Le mobilier devait comporter :
- des petites chaises en bois et à dossier,
- des tables individuelles adaptées à la taille
des enfants,
- de grandes tables arrondies pour 4 ou 5
enfants,
- une collection de jouets.
Aucun animal domestique ne doit être en contact
avec les enfants et "l'école sera
tenue dans un état de salubrité et de propreté". Pour l'admission de
leurs enfants, les parents doivent présenter un certificat constatant que
l'enfant n'est atteint d'aucune maladie contagieuse et qu'il est vacciné. Un
enfant malade n'est pas reçu. "L'école
maternelle est un abri destiné à sauver les enfants des dangers de la rue,
comme des dangers de la solitude dans un logis malsain. (..) Tous les exercices
de l'école maternelle doivent aider au développement des diverses facultés de
l'enfant sans fatigue, sans contrainte, sans excès d'application".
Les programmes comprennent, par ordre
d'importance : des jeux, des mouvements gradués accompagnés de chants, des
exercices manuels, les premiers principes d'éducation morale, les connaissances
usuelles, des exercices de langage, des récits, des contes, les premiers
éléments du calcul, du dessin et de l'écriture, de la lecture pour les enfants
de plus de 5 ans. "Un exercice très
profitable à l'enfant, c'est la lecture d'images, lecture qui le fera pénétrer
dans le monde des idées. Cette lecture doit avoir pour objet d'attirer
l'attention des enfants sur les scènes présentées, sur les faits et gestes des
personnages et les sentiments que trahit la pose de chacun : on fait appel à la
réflexion et à l'imagination. Il faut toujours que le bon goût préside au choix
des images, au choix des couleurs..." Extrait de la conférence faite à
l'Ecole Normale de Mâcon, le 3 juillet 1906, par Mademoiselle Brès, Inspectrice
Générale des écoles maternelles. (Bulletin de l'Instruction Primaire n. 296,
septembre 1906).
A
suivre…
P.P
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