Le temps béni des colonies…
… de vacances !
Départ
des colons, année 50 (FOL38)
You kaïdi aïdi aïda !
Au début du 20e siècle, le séjour en
colonie est plus reconnu pour son action d’hygiène préventive que pour ses
vertus pédagogiques pour les enfants. Les textes officiels soulignent que la
colonie de vacances est la « première ligne de défense contre la
tuberculose », « véritable croisade de paix et de
rédemption », « œuvre patriotique et humanitaire … de salut
public et d’intérêt général ». D’autres voix plus radicale prétendent qu’elle
est le « remède au dépérissement de la race »,
« meilleure arme de guerre contre l’accroissement du prolétariat
dégénéré ». Après la Grande Guerre, les objectifs auront
changé, il s’agit d’éloigner les enfants des miasmes de la ville industrielle, de
leur faire découvrir les bienfaits de l’air, de l’eau et du soleil par un
séjour de trois à quatre semaines sur le littoral, à la campagne ou à la
montagne, encadré par les nouveaux espaces socialisés de la colonie. En cette
période de rentrée, retour sur ces colonies de vacances qui, promues par l'école, ouvrirent des
horizons nouveaux à nombre d’écoliers.
(Archives.morbihan.fr)
Au début du 19e
siècle, la colonie est pénitentiaire. La « colonie pour enfants » est
le moyen que l’on a trouvé pour lutter contre la délinquance infantile. La
colonie pénitentiaire devient bientôt « agricole » et elle se définit
comme un « établissement de bienfaisance destiné à recevoir des
orphelins pauvres, des enfants coupables acquittés pour avoir agi sans
discernement, que l’on emploie au défrichement des terres incultes ». De 1838 à 1850, une cinquantaine de
colonies agricoles sont ouvertes en France et en Algérie (32 en métropole). La
loi du 5 août 1850 sur l’éducation et le patronage des jeunes détenus vient
confirmer cette expérience, les garçons mineurs doivent être rééduqués par le
travail (1). Suivront les colonies maritimes et industrielles et la
création d’établissements pour les filles qui, jusqu’alors, relevaient de
colonies pénitentiaires privées dirigées par des congrégations religieuses (Congrégation
du Bon-Pasteur, Notre-Dame de Charité du Refuge, Sœurs des prisons). Mais ne
nous y trompons pas, ces colonies sont restées jusqu’entre les deux guerres,
des « maisons de correction », véritables bagnes pour enfants.
(geneanet.org)
La
période 1880-1914 : une œuvre d’hygiène préventive
Il faudra attendre les
grandes lois scolaires de Jules Ferry pour voir la mise en place de véritables
« colonies de vacances ». Ces dernières seront d’abord associées
pendant l’été à l’« hôpital marin » qui pouvait fonctionner toute
l’année (2), sanatorium construit pour l’accueil des enfants
tuberculeux, anémiques ou rachitiques. Ces
centres concerneront surtout les enfants de la région parisienne. Les choses évoluèrent avec le premier Congrès national des colonies
de vacances de Bordeaux de 1906 et la création de la Fédération
nationale des colonies de vacances et œuvres de grand air en 1912 (FNCV). Les colonies de vacances prennent leur
indépendance par rapport aux établissements dits « curatifs » et se
centrent sur l’hygiène préventive. Edmond Cottinet, Inspecteur des écoles, en
fixe l’objectif : « offrir une
cure d'air aidée par l'exercice naturel en pleine campagne, par la propreté, la
bonne nourriture, la gaieté ». Ce sera l’avènement des préventoriums
des années 20.
Départ des
colons, année 50 (FOL38)
Progressivement,
les enseignants s’impliquent dans l’organisation des colonies de vacances et y
apportent une préoccupation pédagogique. Les colonies doivent être un lieu
d’apprentissage qui prolonge le temps scolaire. Elles sont vite un enjeu pour
les municipalités républicaines et les œuvres confessionnelles qui, exclues du
système scolaire depuis 1905, y voient un nouveau moyen d’agir pour la jeunesse. En 1906, environ 200
œuvres différentes proposent des séjours à 26 000 enfants dont 33 colonies
scolaires pour 7614 « colons » et 106 œuvres privées pour 14717
enfants.
Départ des
colons, année 50 (FOL38)
La période 1918-1945 : la prévention par le
sport
Dès la fin de la Première
Guerre mondiale, les vertus thérapeutiques des colonies de vacances refont
surface avec la recrudescence de la tuberculose et le constat d’une jeunesse
affaiblie par les privations. C’est l’Etat qui reprend alors la main en encadrant
et subventionnant les camps de vacances. Les Caisses d’assurances sociales lui
emboîtent le pas en mettant en place les premiers stages de formation de
moniteurs. C’est dans ce contexte des années 30 que les municipalités vont
acquérir des propriétés pour envoyer leurs colonies.
Départ des
colons, année 50 (FOL38)
L’Union Française des Colonies de
Vacances (UFCV) est reconnue d’utilité publique en 1934 et bientôt, la Ligue de l’Enseignement
propose de fédérer les colonies laïques au sein d’une seule organisation,
l’Union Fédérale des Œuvres de Vacances Laïques (UFOVAL). En 1936, le Front Populaire et l’arrivée des
congés payés vont changer la donne et c’est sous l’impulsion du sous-secrétaire
d’Etat aux loisirs et aux sports, Léo
Lagrange que seront votés les textes qui
vont jeter les bases des colonies de vacances modernes : circulaire du 17
avril 1937, instructions du 18 mai 1937, décret-loi du 17 juin 1938.
Document cinématographique rare, 1936, cliquez pour voir le film
Jean Zay
entouré d'enfants orléanais partant en colonie de vacances aux Sables-d'Olonne,
à la gare Montparnasse. Juillet 1937. (Archives nationales)
Enfin, en 1938, Georges Lapierre va créer la Fédération nationale des œuvres laïques de
vacances d’enfants plus connue sous le nom de « Jeunesse en plein
air ».
Campagne 1951 (collection musée)
Cette fédération va éditer des guides d’organisation des
séjours en direction des municipalités et des cahiers de formation en direction
des moniteurs et des encadrements.
Guide UFOVAL, édition 1951 (collection musée)
Une nouvelle association
se crée pour organiser des stages
de formation pour les membres de l’enseignement dès 1939 : l’Association des Centres de formation du
personnel des colonies de vacances et des Maisons de campagnes des écoliers.
Cette association marquera durablement de son empreinte le fonctionnement des
colonies et prendra, en 1943, le nom de Centres d’Entraînement aux
MEthodes de pédagogie Active (CEMEA).
La période 1946-1964 : l’apogée des
colonies de vacances laïques
A la libération, l’organisation des colonies de vacances est
centrée sur des objectifs périscolaires et toutes les organisations laïques reprennent
leur activité de concert après des temps très sombres pour elles (3). L’école est alors au centre de l’organisation :
Création des UFO (La Ligue de l’esnseignement)
Les fédérations se
reconstituent autour des départs en colonie : la Fédération nationale des œuvres laïques de vacances d’enfants et
d’adolescents qui devient, en 1949, Confédération
des œuvres laïques d’enfants et d’adolescents (Jeunesse en plein air) ;
l’Union française des œuvres de vacances
laïques (UFOVAL) ; la Section de
la Ligue de l’enseignement regroupant en son sein les CEMEA, les Eclaireurs
de France, les Francs et Franches camarades ; la Fédération générale des associations départementales des Pupilles de
l’école publique ; le Comité
protestant des Colonies de vacances (CPCV) ; l’Oeuvre des colonies de vacances et Auberge de la jeunesse de la
Fédération sportive des jeunesses laïques et républicaines de France ; l’Union française des colonies de vacances
(UFCV) ; l’Organisation centrale des
camps et activités de jeunesse ; la Fédération de colonies de vacances familiales.
Départ
des colons, année 50 (FOL38)
Les Trente Glorieuses vont être l’âge d’or des colonies de
vacances qui ont gagné la confiance des parents et surtout des autorités
académiques : « La recherche des
éléments les plus favorables en vue de doter les enfants d’une santé florissante,
le souci constant de réaliser les
conditions optima de sécurité joints à la volonté d’offrir aux enfants de
vraies vacances sont des préoccupations permanentes des responsables de
l’organisation et du fonctionnement des colonies de vacances » Etienne Bécart, Inspecteur général, in Organisation et fonctionnement des colonies
de vacances, 1954. Le nombre des colons explose passant de 100 000 en
1913 à 400 000 en 1948, atteint 1 million en 1955 puis 4 millions au
milieu des années 60. Ils sont encadrés depuis 1946 par des directeurs et des
moniteurs diplômés d’Etat. Les municipalités prendront une grande part dans
cette réussite, appuyant financièrement l’organisation des colonies : aide
aux familles, location des établissements, organisation logistique des départs.
Peu à peu, les collectivités locales vont faire appel à des
prestataires spécialisés. Les organisations, rigides jusqu’alors,
évoluent : mixité, prise en compte des tranches d’âge, séjour à thème.
Avec le décret du 8 février 1973, les colonies de vacances deviennent des
« centres de vacances » et à partir des années 80, les coûts
augmentent tandis que la demande diminue, il n’y aura plus que 800 000
colons en 2016. Les règles en tout genre se durcissent forçant les collectivités et les associations
à se débarrasser du patrimoine qu’elles avaient acquis pour leurs colonies,
devenu trop coûteux et ne répondant plus aux normes (4). A partir des années
2000, les séjours en centre de vacances voient leur nombre décroître au profit
des centres aérés – qui prendront plus tard le nom de centres de loisirs – plus
proches, plus souples, pouvant servir d’accueil péri-scolaire durant toute
l’année scolaire et financés par les Conseils départementaux.
Cliquez pour voir le film : les colos, 1960
https://www.youtube.com/watch?v=aJvbUgLSQN0
Les colonies UFOVAL en Saône-et-Loire
Florilège de documents UFOVAL envoyés sous couvert de
M.l’Inspecteur d’académie dans chaque école du département, à charge des
directeurs d’organiser les inscriptions dans leur établissement.
Documentation UFOVAL 1951, 1952, 1953 (collection musée)
La colonie sanitaire UFOVAL de
Crusille/Lons-le-Saunier, 1952
Lettre d’information en direction des écoles, pour
information, M. Debrois était instituteur à l’école du Centre (actuelle J.
Jaurès-site du musée) (collection musée)
C’est aux directeurs d’école qu’incombait la gestion des
dossiers. Lettre de M. Joly, directeur de l’école du Centre à la FOL, 1952
(collection musée)
Dossier d’inscription tranmis aux parents par le directeur de
l’école, M. Joly (collection musée)
Les colons montcelliens des années 50
Comme beaucoup de commune en France, la ville de
Montceau-les-Mines avait des accords avec la Fédération des œuvres laïques et
l’Inspection académique de Saône-et-Loire afin d’organiser une colonie de
vacances municipale. Une nouvelle fois, les maîtresses et les maîtres étaient
mis à contribution pour organiser au mieux les départs… et souvent les
encadrements de ces colonies, car ils avaient, pour beaucoup, passé l’examen du Brevet
d’aptitude aux fonctions de directeur de colonies de vacances et de centres
aérés créé en 1946. En 1972, ce premier brevet est remplacé par le BAFD (Brevet
d’aptitudes aux fonctions de directeur en accueils collectifs de mineurs) et un
module spécial de formation est créé dans les Ecoles normales pour les
instituteurs. Pour mémoire, ce module consistait en une semaine banalisée de stage
de formation dans un centre de vacances
(en l’occurrence au centre FOL des Houches, dans les années 70, pour
l’Ecole normale de Mâcon). Stage à l’issue duquel les normaliennes et
normaliens recevaient leur BAFD. Quoi qu’il en soit, c’est aux enseignants que
revenait la lourde tâche de promouvoir les colonies de vacances. Voici quelques
correspondances qui mettent en avant les multiples sollicitations :
Courrier du Maire de Montceau et réponse de M. Joly,
directeur de l’école du Centre
Lettre des services sociaux émargées par les maîtres de
l’école du Centre après information auprès des élèves (collection musée)
Lettre de confirmation de départ à transmettre aux parents
(collection musée)
Envoi des fiches d’inscription par l’Inspection académique,
1953 (collection musée)
Bordereau d’inscription de 10 colons pour une colonie rédigé
par M. Joly, Directeur del’école du Centre, 1952 (collection musée)
Réclamation de M. Joly et renvoi d’insignes par l’UFOVAL,
1952 (collection musée)
Dossier de départ d’un colon pour la colonie d’Evian, 1952
(collection musée)
Une
colonie de vacances pour les enfants des anciens Prisonniers de guerre
Témoignage
de Jean Gaumet (Secrétaire-adjoint du musée)
A Génelard, au
Pôle culturel et touristique (Centre d’interprétation de la Ligne de
Démarcation) s’était tenue une exposition très intéressante qui faisait revivre
une page un peu oubliée de notre histoire : « Les Prisonniers de guerre 1940-1945 ». Des
millions de jeunes français ont passé 5 années derrière les barbelés des camps
allemands, non pas comme déportés mais comme prisonniers de guerre et on
découvre leurs conditions de vie, diverses, mais toujours difficiles et qui les
ont marqués pour la vie.
Peu après leur
retour, une colonie de vacances pour les enfants des anciens Prisonniers a été
organisée, pendant de longues années à Narbonne mais au début elle était
implantée à Beausoleil, ville qui se trouve juste au-dessus de Monte-Carlo. Pendant
trois années consécutives, j’ai participé comme moniteur à cette Colo qui était
dirigée par M. et Mme GAIN, enseignants à Gueugnon. Le séjour durait un mois en
août. Pour moi, ce fut en 1953, en 1954 et en 1955. J’ai retrouvé deux photos
de groupe et peut-être que certains lecteurs du département s’y reconnaîtront.
Chaque jour,
nous allions nous baigner sur une plage de galets et notre itinéraire nous
amenait à longer le Casino ; nos tenues contrastaient avec l’image de carte
postale que donnait l’établissement de jeux.
Autre
souvenir : chaque matin, lever des couleurs avec un chant dont je me souviens
le début : « Dans les cieux sont montées les couleurs, pour la joie de nos yeux
pour la joie de nos cœurs. Beausoleil est encore un pays où dès l’éveil on
salue sa patrie …. »
Les colons Saône-et-Loiriens
à la colonie de Beausoleil, 1953 (debout à gauche : Jean Gaumet)
Dépaysement
garanti pour l’époque !
Cliquez pour voir la vidéo :
Les Jolies Colonies de
Vacances - YouTube
Sources :
-
Archives musée
-
Archives Jean Gaumet
-
https://laliguenormandie.org/wp-content/uploads/2017/12/livret-50%C3%A8me-anniversaire-FOL-50.pdf
- https://journals.openedition.org/insitu
- http://www.retro-colo.fr/cartes.php
(1) : Un
exemple de colonie agricole au 19e siècle :
« LES
ILES D’OR : Trois îles situées au large d’Hyères et du Lavandou, les îles d’Or,
appelées ainsi à cause des micaschistes qui scintillent au soleil omniprésent,
sont les joyaux de la Méditerranée. Le comte de POURTALÈS,
propriétaire de l’une d’elles depuis 1857, l’île-du-Levant, est autorisé à
ouvrir officiellement et suivant la loi de 1850 (citée dessous), la colonie
agricole de Sainte-Anne, le 8 janvier 1861. Avant
d’être un lieu de villégiature apprécié des vacanciers, « le paradis »
des naturistes bien connu de nos jours, l’Île-du-Levant a donc été un bagne
pour enfants. Les premiers arrivèrent le 23 mars 1861.
La
colonie agricole Sainte-Anne tenait son nom de la patronne des marins et des
îles d’Hyères. Les jeunes condamnés étaient enfermés à Sainte-Anne jusqu’à
l’âge de 16, 18 ou 20 ans, selon la gravité des faits qui leur étaient
reprochés. Ils étaient le plus souvent des vagabonds, des maraudeurs, des
orphelins, de petits voleurs.
Il
existait 32 colonies en France dans la seconde moitié du XIXème siècle et seule
celle d’Ajaccio (Saint-Antoine) avait la vocation de colonie disciplinaire, où
furent placés les plus mauvais éléments. Sa durée de vie fut de 11 ans, de
janvier 1855 à juin 1866. A partir du 28 septembre 1866, soixante-cinq jeunes
détenus de ladite colonie arrivèrent au LEVANT, ce qui porta le nombre total de
colons à 248.
A
peine débarqués, les conditions de vie et alimentaires s’aggravèrent, d’où la
terrible révolte du 9 octobre 1866.
Extraits
du Code pénal de 1810, article 66-N° 2342 de la loi sur l’éducation et le
patronage des jeunes détenus, articles des 13 juin, 3 juillet et 5 août 1850,
adoptée par l’Assemblée Nationale :
« Les jeunes détenus acquittés en vertu de l’article
66 du Code pénal de 1810, comme ayant agi sans discernement, mais non remis à
leurs parents, sont conduits dans une colonie pénitentiaire, ils y sont élevés
en commun, sous une discipline sévère, et appliquée aux travaux de
l’agriculture, ainsi qu’aux principales industries qui s’y rattachent. Il est
pourvu à leur instruction élémentaire.
Les colonies pénitentiaires reçoivent également les
jeunes détenus condamnés à un emprisonnement de plus de six mois et qui
n’excède pas deux ans.
Les colonies pénitentiaires sont des établissements
publics ou privés. Les établissements publics sont ceux fondés par l’Etat, et
dont il institue les directeurs. Les établissements privés sont ceux fondés et
dirigés par des particuliers, avec l’autorisation de l’Etat.
Dans les cinq ans qui suivront la promulgation de la
présente loi, les particuliers ou les associations qui voudront établir des
colonies pénitentiaires pour les jeunes détenus, formeront, auprès du ministre
de l’Intérieur une demande en autorisation, et produiront à l’appui les plans,
statuts et règlements intérieurs de ces établissements.
Le ministre pourra passer avec ces établissements,
dûment autorisés, des traités pour la garde, l’entretien et l’éducation d’un
nombre déterminé de jeunes détenus.
A l’expiration de cinq années, si le nombre total des jeunes détenus n’a pu
être placé dans les établissements particuliers, il sera pourvu, aux frais de
l’Etat, à la fondation de colonies pénitentiaires.
Toute colonie pénitentiaire privée est régie par un directeur
responsable, agréé par le Gouvernement et investi de l’autorité des directeurs
des maisons de correction. »
En
autorisant les bagnes privés pour « mineurs agissant sans
discernement », l’Empereur Napoléon III entendait débarrasser les villes
et les campagnes des innombrables gavroches, vagabonds et orphelins qui les
peuplaient…
En réalité, ces jeunes travaillaient
plus de 12 heures par jour, étaient mal nourris, subissaient des brimades, des
mauvais traitements, des sévices, des maladies (avec précarité des soins) et
certains en mouraient. Les tentatives d’évasion furent nombreuses ainsi que
les révoltes. La maison d’éducation correctionnelle du Levant fut ouverte 19 ans.
La principale révolte, la
plus terrifiante, fut celle du 2 octobre 1866 qui fit quatorze victimes.
Le 2
octobre 1866, les jeunes détenus de la colonie pénitentiaire de l’île du Levant
se révoltent et provoquent la mort d'une douzaine d’entre eux, enfermés et
brûlés vifs. L’affaire va passionner les journaux de l’époque.
Quelques exemples pour le
souvenir :
BLANC
Jules : Né le 25 août 1856 à
St-Pierre d’Argençon, . Son père et sa mère sont décédés. Sans domicile. Il n’a
plus que son grand-père paternel. Coupable de délit de vagabondage. Entré en
prison le 9 octobre 1869, âgé de 14 ans : « Cet enfant se livrait
depuis longtemps au maraudage et au vagabondage. Sa conduite en prison a été
satisfaisante, il a été occupé à trier de la paille ». Condamné jusqu’à
l’âge de 18 ans. A été transféré dans la voiture cellulaire n°22 le 14 novembre
1869. Décédé le 27 juin 1872 à l’âge de 16 ans.
ROSSIGNOL
Paul Félix : Né le 13 novembre 1858
à GAP – Sa mère est veuve, peu fortunée, d’une moralité douteuse. Entré en
prison le 1er avril 1871, âgé de 12 ans –inculpé de vols –condamné jusqu’à
l’âge de 16 ans. Doit apprendre le métier de cordonnier. Remis au gardien
comptable de la voiture cellulaire n°12 le 30 juin 1871. Décédé le 25 janvier 1872 à l’âge de 14 ans.
GUIGOU
Joseph : Né le 25.09.1851 à
Saint-André de Rosans – entré en prison le 15 juillet 1867, âgé de 15 ans. Inculpé
de coups et blessures. Condamné le 1er août 1867 pendant 2 ans. Doit être
conduit à l’Ile du LEVANT le 2 décembre 1867. Décédé le 21 novembre 1868 à
l’âge de 17 ans.
MEYER-FAURE
Jean : Né le 1er Mars 1864 à
l’Argentière la Bessée. Entré en prison le 24 mai 1864, âgé de 13 ans. Accusé
d’incendie volontaire. Durée de la peine non précisée. Remis au gardien de la
voiture cellulaire n°12 pour être transféré à l’île du Levant. Décédé le 24
juillet 1864 (4 mois après son arrivée sur l’île ).
SARROBERT
Jean : Né le 25.12.1846 à l’EPINE. Entré
en prison le 25 janvier 1861 âgé de 15 ans. Accusé de vol. Condamné à être
détenu jusqu’au 25 décembre 1864. Décédé le 16 octobre 1861
(3ème adolescent à décéder depuis l’ouverture de la Colonie). Dans l’acte
retranscrit dans les registres d’état civil de L’EPINE, on peut lire :
« SARROBERT Jean François Noé décédé le seize octobre à midi, profession
de jeune détenu à la maison correctionnelle de l’île du Levant ».
le 3 octobre 1878, après le
décès de M. Pourtales en 1876, le Ministre de l’Intérieur ordonna la
fermeture de la colonie, fermeture qui intervint le 23 novembre. Les héritiers Pourtales
se défirent alors de l’île et les deux cents détenus furent placés dans
d’autres colonies agricoles.
Les détenus passés par la
colonie Saint-Anne furent au nombre de 1 057. 99 y sont morts et enterrés
entre 1861 et 1876. Une stèle leur rend hommage sur place.
En autorisant les bagnes
privés pour mineurs, en 1850, personne ne se doutait que peu à peu, cette loi
serait dévoyée, favorisant des malversations, des profits au détriment de ces
jeunes garçons.
D’après un article de Janine Lopez-Beaume. Sources : M. Claude
GRITTI : Les enfants de l’Ile du LEVANT, Archives Départementales des Hautes-Alpes, M. Prosper DESPINE :
Témoignages et faits
relatés, Marie Rouanet : Les
enfants du bagne.
(2) :
Voir l’article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2017/03/la-lutte-contre-la-tuberculose.html#more
(3) : Voir
l’article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2018/06/lecole-sous-vichy.html#more
(4) : Le
centre le plus emblématique de la Fédération des Œuvres laïques, touché par ce
problème, se situe à Jard-sur-Mer, au sud de la Vendée. Il s'agit de l'ensemble
de colonies de vacances « Porte Océane » situé dans la forêt de l'Abbaye et qui
était géré par cinq fédérations différentes (Rhône, Drôme, Marne,
Saône-et-Loire et Vendée). Construites entre 1957 et 1961 par l'architecte Jean
Debarre, les colonies ont globalement le même ordonnancement.
Centre actuel géré par la
FOL de la Drôme
Camp UFOVAL de
Saône-et-Loire, la Porte Océane-Jard sur mer, années 60 ? (retro-colo.fr)
Aujourd'hui, la colonie de
la Marne a disparu, celle de la Vendée est fermée depuis 2007, La Drôme est
toujours en activité, tandis que le centre appartenant à la FOL du Rhône est
fermé depuis 2005 et a fait l'objet d’un projet de rachat par la ville de Lyon.
Patrick PLUCHOT
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