jeudi 2 septembre 2021

Dossier de rentrée : les jolies colonies de vacances

 



Le temps béni des colonies…

… de vacances !

Départ des colons, année 50 (FOL38)

You kaïdi aïdi aïda !

Au début du 20e siècle, le séjour en colonie est plus reconnu pour son action d’hygiène préventive que pour ses vertus pédagogiques pour les enfants. Les textes officiels soulignent que la colonie de vacances est la « première ligne de défense contre la tuberculose », « véritable croisade de paix et de rédemption », « œuvre patriotique et humanitaire … de salut public et d’intérêt général ». D’autres voix plus radicale prétendent qu’elle est le « remède au dépérissement de la race », « meilleure arme de guerre contre l’accroissement du prolétariat dégénéré ». Après la Grande Guerre, les objectifs auront changé, il s’agit d’éloigner les enfants des miasmes de la ville industrielle, de leur faire découvrir les bienfaits de l’air, de l’eau et du soleil par un séjour de trois à quatre semaines sur le littoral, à la campagne ou à la montagne, encadré par les nouveaux espaces socialisés de la colonie. En cette période de rentrée, retour sur ces colonies de vacances qui, promues par l'école, ouvrirent des horizons nouveaux à nombre d’écoliers. 



(Archives.morbihan.fr)

Au début du 19e siècle, la colonie est pénitentiaire. La « colonie pour enfants » est le moyen que l’on a trouvé pour lutter contre la délinquance infantile. La colonie pénitentiaire devient bientôt « agricole » et elle se définit comme un « établissement de bienfaisance destiné à recevoir des orphelins pauvres, des enfants coupables acquittés pour avoir agi sans discernement, que l’on emploie au défrichement des terres incultes ». De 1838 à 1850, une cinquantaine de colonies agricoles sont ouvertes en France et en Algérie (32 en métropole). La loi du 5 août 1850 sur l’éducation et le patronage des jeunes détenus vient confirmer cette expérience, les garçons mineurs doivent être rééduqués par le travail (1). Suivront les colonies maritimes et industrielles et la création d’établissements pour les filles qui, jusqu’alors, relevaient de colonies pénitentiaires privées dirigées par des congrégations religieuses (Congrégation du Bon-Pasteur, Notre-Dame de Charité du Refuge, Sœurs des prisons). Mais ne nous y trompons pas, ces colonies sont restées jusqu’entre les deux guerres, des « maisons de correction », véritables bagnes pour enfants.


(geneanet.org)

La période 1880-1914 : une œuvre d’hygiène préventive

Il faudra attendre les grandes lois scolaires de Jules Ferry pour voir la mise en place de véritables « colonies de vacances ». Ces dernières seront d’abord associées pendant l’été à l’« hôpital marin » qui pouvait fonctionner toute l’année (2), sanatorium construit pour l’accueil des enfants tuberculeux, anémiques ou rachitiques. Ces centres concerneront surtout les enfants de la région parisienne. Les choses évoluèrent avec le premier Congrès national des colonies de vacances de Bordeaux de 1906 et la création de la Fédération nationale des colonies de vacances et œuvres de grand air en 1912 (FNCV). Les colonies de vacances prennent leur indépendance par rapport aux établissements dits « curatifs » et se centrent sur l’hygiène préventive. Edmond Cottinet, Inspecteur des écoles, en fixe l’objectif : « offrir une cure d'air aidée par l'exercice naturel en pleine campagne, par la propreté, la bonne nourriture, la gaieté ». Ce sera l’avènement des préventoriums des années 20.


Départ des colons, année 50 (FOL38)

Progressivement, les enseignants s’impliquent dans l’organisation des colonies de vacances et y apportent une préoccupation pédagogique. Les colonies doivent être un lieu d’apprentissage qui prolonge le temps scolaire. Elles sont vite un enjeu pour les municipalités républicaines et les œuvres confessionnelles qui, exclues du système scolaire depuis 1905, y voient un nouveau moyen  d’agir pour la jeunesse. En 1906, environ 200 œuvres différentes proposent des séjours à 26 000 enfants dont 33 colonies scolaires pour 7614 « colons » et 106 œuvres privées pour 14717 enfants.


Départ des colons, année 50 (FOL38)

La période 1918-1945 : la prévention par le sport

Dès la fin de la Première Guerre mondiale, les vertus thérapeutiques des colonies de vacances refont surface avec la recrudescence de la tuberculose et le constat d’une jeunesse affaiblie par les privations. C’est l’Etat qui reprend alors la main en encadrant et subventionnant les camps de vacances. Les Caisses d’assurances sociales lui emboîtent le pas en mettant en place les premiers stages de formation de moniteurs. C’est dans ce contexte des années 30 que les municipalités vont acquérir des propriétés pour envoyer leurs colonies.


Départ des colons, année 50 (FOL38)

L’Union Française des Colonies de Vacances (UFCV) est reconnue d’utilité publique en 1934 et bientôt, la Ligue de l’Enseignement propose de fédérer les colonies laïques au sein d’une seule organisation, l’Union Fédérale des Œuvres de Vacances Laïques (UFOVAL).  En 1936, le Front Populaire et l’arrivée des congés payés vont changer la donne et c’est sous l’impulsion du sous-secrétaire d’Etat aux loisirs  et aux sports, Léo Lagrange que  seront votés les textes qui vont jeter les bases des colonies de vacances modernes : circulaire du 17 avril 1937, instructions du 18 mai 1937, décret-loi du 17 juin 1938.



Document cinématographique rare, 1936, cliquez pour  voir le film


Jean Zay entouré d'enfants orléanais partant en colonie de vacances aux Sables-d'Olonne, à la gare Montparnasse. Juillet 1937. (Archives nationales)

Enfin, en 1938, Georges Lapierre va créer la Fédération nationale des œuvres laïques de vacances d’enfants plus connue sous le nom de « Jeunesse en plein air ».



Campagne 1951 (collection musée)

Cette fédération va éditer des guides d’organisation des séjours en direction des municipalités et des cahiers de formation en direction des moniteurs et des encadrements.



Guide UFOVAL, édition 1951 (collection musée)

Une nouvelle association  se crée pour  organiser des stages de formation pour les membres de l’enseignement dès 1939 : l’Association des Centres de formation du personnel des colonies de vacances et des Maisons de campagnes des écoliers. Cette association marquera durablement de son empreinte le fonctionnement des colonies et prendra, en 1943, le nom de Centres d’Entraînement aux MEthodes  de pédagogie Active (CEMEA).


La période 1946-1964 : l’apogée des colonies de vacances laïques

A la libération, l’organisation des colonies de vacances est centrée sur des objectifs périscolaires et toutes les organisations laïques reprennent leur activité de concert après des temps très sombres pour elles (3). L’école est alors au centre de l’organisation :


Création des UFO (La Ligue de l’esnseignement)

 Les fédérations se reconstituent autour des départs en colonie : la Fédération nationale des œuvres laïques de vacances d’enfants et d’adolescents qui devient, en 1949, Confédération des œuvres laïques d’enfants et d’adolescents (Jeunesse en plein air) ; l’Union française des œuvres de vacances laïques (UFOVAL) ; la Section de la Ligue de l’enseignement regroupant en son sein les CEMEA, les Eclaireurs de France, les Francs et Franches camarades ; la Fédération générale des associations départementales des Pupilles de l’école publique ; le Comité protestant des Colonies de vacances (CPCV) ; l’Oeuvre des colonies de vacances et Auberge de la jeunesse de la Fédération sportive des jeunesses laïques et républicaines de France ; l’Union française des colonies de vacances (UFCV) ; l’Organisation centrale des camps et activités de jeunesse ; la Fédération de colonies de vacances familiales.


Départ des colons, année 50 (FOL38)

Les Trente Glorieuses vont être l’âge d’or des colonies de vacances qui ont gagné la confiance des parents et surtout des autorités académiques : « La recherche des éléments les plus favorables en vue de doter les enfants d’une santé florissante, le souci constant  de réaliser les conditions optima de sécurité joints à la volonté d’offrir aux enfants de vraies vacances sont des préoccupations permanentes des responsables de l’organisation et du fonctionnement des colonies de vacances » Etienne Bécart, Inspecteur général, in Organisation et fonctionnement des colonies de vacances, 1954. Le nombre des colons explose passant de 100 000 en 1913 à 400 000 en 1948, atteint 1 million en 1955 puis 4 millions au milieu des années 60. Ils sont encadrés depuis 1946 par des directeurs et des moniteurs diplômés d’Etat. Les municipalités prendront une grande part dans cette réussite, appuyant financièrement l’organisation des colonies : aide aux familles, location des établissements, organisation logistique des départs.


Peu à peu, les collectivités locales vont faire appel à des prestataires spécialisés. Les organisations, rigides jusqu’alors, évoluent : mixité, prise en compte des tranches d’âge, séjour à thème. Avec le décret du 8 février 1973, les colonies de vacances deviennent des « centres de vacances » et à partir des années 80, les coûts augmentent tandis que la demande diminue, il n’y aura plus que 800 000 colons en 2016. Les règles en tout genre se durcissent  forçant les collectivités et les associations à se débarrasser du patrimoine qu’elles avaient acquis pour leurs colonies, devenu trop coûteux et ne répondant plus aux normes (4). A partir des années 2000, les séjours en centre de vacances voient leur nombre décroître au profit des centres aérés – qui prendront plus tard le nom de centres de loisirs – plus proches, plus souples, pouvant servir d’accueil péri-scolaire durant toute l’année scolaire et financés par les Conseils départementaux.


Cliquez pour voir le film : les colos, 1960

 https://www.youtube.com/watch?v=aJvbUgLSQN0

Les colonies UFOVAL en Saône-et-Loire

Florilège de documents UFOVAL envoyés sous couvert de M.l’Inspecteur d’académie dans chaque école du département, à charge des directeurs d’organiser les inscriptions dans leur établissement.












Documentation UFOVAL 1951, 1952, 1953 (collection musée)

La colonie sanitaire UFOVAL de Crusille/Lons-le-Saunier, 1952



Lettre d’information en direction des écoles, pour information, M. Debrois était instituteur à l’école du Centre (actuelle J. Jaurès-site du musée) (collection musée)


C’est aux directeurs d’école qu’incombait la gestion des dossiers. Lettre de M. Joly, directeur de l’école du Centre à la FOL, 1952 (collection musée)








Dossier d’inscription tranmis aux parents par le directeur de l’école, M. Joly (collection musée)

Les colons montcelliens des années 50

Comme beaucoup de commune en France, la ville de Montceau-les-Mines avait des accords avec la Fédération des œuvres laïques et l’Inspection académique de Saône-et-Loire afin d’organiser une colonie de vacances municipale. Une nouvelle fois, les maîtresses et les maîtres étaient mis à contribution pour organiser au mieux les départs… et souvent les encadrements de ces colonies, car ils avaient,  pour beaucoup, passé l’examen du Brevet d’aptitude aux fonctions de directeur de colonies de vacances et de centres aérés créé en 1946. En 1972, ce premier brevet est remplacé par le BAFD (Brevet d’aptitudes aux fonctions de directeur en accueils collectifs de mineurs) et un module spécial de formation est créé dans les Ecoles normales pour les instituteurs. Pour mémoire, ce module consistait en une semaine banalisée de stage de formation dans un centre de vacances  (en l’occurrence au centre FOL des Houches, dans les années 70, pour l’Ecole normale de Mâcon). Stage à l’issue duquel les normaliennes et normaliens recevaient leur BAFD. Quoi qu’il en soit, c’est aux enseignants que revenait la lourde tâche de promouvoir les colonies de vacances. Voici quelques correspondances qui mettent en avant les multiples sollicitations :




Courrier du Maire de Montceau et réponse de M. Joly, directeur de l’école du Centre


Lettre des services sociaux émargées par les maîtres de l’école du Centre après information auprès des élèves (collection musée)


Lettre de confirmation de départ à transmettre aux parents (collection musée)



Envoi des fiches d’inscription par l’Inspection académique, 1953 (collection musée)



Bordereau d’inscription de 10 colons pour une colonie rédigé par M. Joly, Directeur del’école du Centre, 1952 (collection musée)



Réclamation de M. Joly et renvoi d’insignes par l’UFOVAL, 1952 (collection musée)





Dossier de départ d’un colon pour la colonie d’Evian, 1952 (collection musée)

Une colonie de vacances pour les enfants des anciens Prisonniers de guerre

Témoignage de Jean Gaumet (Secrétaire-adjoint du musée)

A Génelard, au Pôle culturel et touristique (Centre d’interprétation de la Ligne de Démarcation) s’était tenue une exposition très intéressante qui faisait revivre une page un peu oubliée de notre histoire :   « Les Prisonniers de guerre 1940-1945 ». Des millions de jeunes français ont passé 5 années derrière les barbelés des camps allemands, non pas comme déportés mais comme prisonniers de guerre et on découvre leurs conditions de vie, diverses, mais toujours difficiles et qui les ont marqués pour la vie.

Peu après leur retour, une colonie de vacances pour les enfants des anciens Prisonniers a été organisée, pendant de longues années à Narbonne mais au début elle était implantée à Beausoleil, ville qui se trouve juste au-dessus de Monte-Carlo. Pendant trois années consécutives, j’ai participé comme moniteur à cette Colo qui était dirigée par M. et Mme GAIN, enseignants à Gueugnon. Le séjour durait un mois en août. Pour moi, ce fut en 1953, en 1954 et en 1955. J’ai retrouvé deux photos de groupe et peut-être que certains lecteurs du département s’y reconnaîtront.

Chaque jour, nous allions nous baigner sur une plage de galets et notre itinéraire nous amenait à longer le Casino ; nos tenues contrastaient avec l’image de carte postale que donnait l’établissement de jeux.

 Autre souvenir : chaque matin, lever des couleurs avec un chant dont je me souviens le début : « Dans les cieux sont montées les couleurs, pour la joie de nos yeux pour la joie de nos cœurs. Beausoleil est encore un pays où dès l’éveil on salue sa patrie …. »


Les colons Saône-et-Loiriens à la colonie de Beausoleil, 1953 (debout à gauche : Jean Gaumet)


Dépaysement garanti pour l’époque !


Cliquez pour voir la vidéo :

Les Jolies Colonies de Vacances - YouTube



Sources :

-       Archives musée

-       Archives Jean Gaumet

-       https://laliguenormandie.org/wp-content/uploads/2017/12/livret-50%C3%A8me-anniversaire-FOL-50.pdf

-       https://journals.openedition.org/insitu

-       http://www.retro-colo.fr/cartes.php

(1) : Un exemple de colonie agricole au 19e siècle :

« LES ILES D’OR : Trois îles situées au large d’Hyères et du Lavandou, les îles d’Or, appelées ainsi à cause des micaschistes qui scintillent au soleil omniprésent, sont les joyaux de la Méditerranée. Le comte de POURTALÈS, propriétaire de l’une d’elles depuis 1857, l’île-du-Levant, est autorisé à ouvrir officiellement et suivant la loi de 1850 (citée dessous), la colonie agricole de Sainte-Anne, le 8 janvier 1861. Avant d’être un lieu de villégiature apprécié des vacanciers, « le paradis » des naturistes bien connu de nos jours, l’Île-du-Levant a donc été un bagne pour enfants. Les premiers arrivèrent le 23 mars 1861.

La colonie agricole Sainte-Anne tenait son nom de la patronne des marins et des îles d’Hyères. Les jeunes condamnés étaient enfermés à Sainte-Anne jusqu’à l’âge de 16, 18 ou 20 ans, selon la gravité des faits qui leur étaient reprochés. Ils étaient le plus souvent des vagabonds, des maraudeurs, des orphelins, de petits voleurs. 


Il existait 32 colonies en France dans la seconde moitié du XIXème siècle et seule celle d’Ajaccio (Saint-Antoine) avait la vocation de colonie disciplinaire, où furent placés les plus mauvais éléments. Sa durée de vie fut de 11 ans, de janvier 1855 à juin 1866. A partir du 28 septembre 1866, soixante-cinq jeunes détenus de ladite colonie arrivèrent au LEVANT, ce qui porta le nombre total de colons à 248.

A peine débarqués, les conditions de vie et alimentaires s’aggravèrent, d’où la terrible révolte du 9 octobre 1866.

Extraits du Code pénal de 1810, article 66-N° 2342 de la loi sur l’éducation et le patronage des jeunes détenus, articles des 13 juin, 3 juillet et 5 août 1850, adoptée par l’Assemblée Nationale :

« Les jeunes détenus acquittés en vertu de l’article 66 du Code pénal de 1810, comme ayant agi sans discernement, mais non remis à leurs parents, sont conduits dans une colonie pénitentiaire, ils y sont élevés en commun, sous une discipline sévère, et appliquée aux travaux de l’agriculture, ainsi qu’aux principales industries qui s’y rattachent. Il est pourvu à leur instruction élémentaire.

Les colonies pénitentiaires reçoivent également les jeunes détenus condamnés à un emprisonnement de plus de six mois et qui n’excède pas deux ans.

Les colonies pénitentiaires sont des établissements publics ou privés. Les établissements publics sont ceux fondés par l’Etat, et dont il institue les directeurs. Les établissements privés sont ceux fondés et dirigés par des particuliers, avec l’autorisation de l’Etat.

Dans les cinq ans qui suivront la promulgation de la présente loi, les particuliers ou les associations qui voudront établir des colonies pénitentiaires pour les jeunes détenus, formeront, auprès du ministre de l’Intérieur une demande en autorisation, et produiront à l’appui les plans, statuts et règlements intérieurs de ces établissements.

Le ministre pourra passer avec ces établissements, dûment autorisés, des traités pour la garde, l’entretien et l’éducation d’un nombre déterminé de jeunes détenus.
A l’expiration de cinq années, si le nombre total des jeunes détenus n’a pu être placé dans les établissements particuliers, il sera pourvu, aux frais de l’Etat, à la fondation de colonies pénitentiaires.

Toute colonie pénitentiaire privée est régie par un directeur responsable, agréé par le Gouvernement et investi de l’autorité des directeurs des maisons de correction. »

En autorisant les bagnes privés pour « mineurs agissant sans discernement », l’Empereur Napoléon III entendait débarrasser les villes et les campagnes des innombrables gavroches, vagabonds et orphelins qui les peuplaient…

En réalité, ces jeunes travaillaient plus de 12 heures par jour, étaient mal nourris, subissaient des brimades, des mauvais traitements, des sévices, des maladies (avec précarité des soins) et certains en mouraient. Les tentatives d’évasion furent nombreuses ainsi que les révoltes. La maison d’éducation correctionnelle du Levant fut ouverte 19 ans.

La principale révolte, la plus terrifiante, fut celle du 2 octobre 1866 qui fit quatorze victimes.

Le 2 octobre 1866, les jeunes détenus de la colonie pénitentiaire de l’île du Levant se révoltent et provoquent la mort d'une douzaine d’entre eux, enfermés et brûlés vifs. L’affaire va passionner les journaux de l’époque.

Quelques exemples pour le souvenir :

BLANC Jules : Né le 25 août 1856 à St-Pierre d’Argençon, . Son père et sa mère sont décédés. Sans domicile. Il n’a plus que son grand-père paternel. Coupable de délit de vagabondage. Entré en prison le 9 octobre 1869, âgé de 14 ans : « Cet enfant se livrait depuis longtemps au maraudage et au vagabondage. Sa conduite en prison a été satisfaisante, il a été occupé à trier de la paille ». Condamné jusqu’à l’âge de 18 ans. A été transféré dans la voiture cellulaire n°22 le 14 novembre 1869. Décédé le 27 juin 1872 à l’âge de 16 ans.

ROSSIGNOL Paul Félix : Né le 13 novembre 1858 à GAP – Sa mère est veuve, peu fortunée, d’une moralité douteuse. Entré en prison le 1er avril 1871, âgé de 12 ans –inculpé de vols –condamné jusqu’à l’âge de 16 ans. Doit apprendre le métier de cordonnier. Remis au gardien comptable de la voiture cellulaire n°12 le 30 juin 1871. Décédé le 25 janvier 1872 à l’âge de 14 ans.

GUIGOU Joseph : Né le 25.09.1851 à Saint-André de Rosans – entré en prison le 15 juillet 1867, âgé de 15 ans. Inculpé de coups et blessures. Condamné le 1er août 1867 pendant 2 ans. Doit être conduit à l’Ile du LEVANT le 2 décembre 1867. Décédé le 21 novembre 1868 à l’âge de 17 ans.

MEYER-FAURE Jean : Né le 1er Mars 1864 à l’Argentière la Bessée. Entré en prison le 24 mai 1864, âgé de 13 ans. Accusé d’incendie volontaire. Durée de la peine non précisée. Remis au gardien de la voiture cellulaire n°12 pour être transféré à l’île du Levant. Décédé le 24 juillet 1864 (4 mois après son arrivée sur l’île ).

SARROBERT Jean : Né le 25.12.1846 à l’EPINE. Entré en prison le 25 janvier 1861 âgé de 15 ans. Accusé de vol. Condamné à être détenu jusqu’au 25 décembre 1864. Décédé le 16 octobre 1861
(3ème adolescent à décéder depuis l’ouverture de la Colonie). Dans l’acte retranscrit dans les registres d’état civil de L’EPINE, on peut lire : « SARROBERT Jean François Noé décédé le seize octobre à midi, profession de jeune détenu à la maison correctionnelle de l’île du Levant ».

le 3 octobre 1878, après le décès de M. Pourtales en 1876, le Ministre de l’Intérieur ordonna la fermeture de la colonie, fermeture qui intervint le 23 novembre. Les héritiers Pourtales se défirent alors de l’île et les deux cents détenus furent placés dans d’autres colonies agricoles.

Les détenus passés par la colonie Saint-Anne furent au nombre de 1 057. 99 y sont morts et enterrés entre 1861 et 1876. Une stèle leur rend hommage sur place.

En autorisant les bagnes privés pour mineurs, en 1850, personne ne se doutait que peu à peu, cette loi serait dévoyée, favorisant des malversations, des profits au détriment de ces jeunes garçons.

D’après un article de Janine Lopez-Beaume. Sources : M. Claude GRITTI : Les enfants de l’Ile du LEVANT, Archives Départementales des Hautes-Alpes, M. Prosper DESPINE :  Témoignages et faits relatés, Marie Rouanet : Les enfants du bagne.



(2) : Voir l’article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2017/03/la-lutte-contre-la-tuberculose.html#more

(3) : Voir l’article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2018/06/lecole-sous-vichy.html#more

(4) : Le centre le plus emblématique de la Fédération des Œuvres laïques, touché par ce problème, se situe à Jard-sur-Mer, au sud de la Vendée. Il s'agit de l'ensemble de colonies de vacances « Porte Océane » situé dans la forêt de l'Abbaye et qui était géré par cinq fédérations différentes (Rhône, Drôme, Marne, Saône-et-Loire et Vendée). Construites entre 1957 et 1961 par l'architecte Jean Debarre, les colonies ont globalement le même ordonnancement.  

Centre actuel géré par la FOL de la Drôme 



Camp UFOVAL de Saône-et-Loire, la Porte Océane-Jard sur mer, années 60 ? (retro-colo.fr)

Aujourd'hui, la colonie de la Marne a disparu, celle de la Vendée est fermée depuis 2007, La Drôme est toujours en activité, tandis que le centre appartenant à la FOL du Rhône est fermé depuis 2005 et a fait l'objet d’un projet de rachat par la ville de Lyon.

Patrick PLUCHOT


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