mardi 10 octobre 2023

L'Ecole Normale d'Instituteurs de Mâcon en Saône-et-Loire (suite)

 

Aperçus historiques sur l’Ecole Normale d’Instituteurs de

Saône-et-Loire

Deuxième partie : période 1941-1991


Les « 4 années de malheur » du gouvernement dit de l’Etat Français (1940-1944) commençaient. C’est une troisième guerre que va subir L’Ecole Normale. Alors que le comte de Falloux l’avait asservie, un certain maréchal allait la tuer. Après la défaite de la France, en 1940, le gouvernement antirépublicain du Maréchal Pétain, voulant se montrer hostile aux instituteurs ainsi qu’aux institutrices, par la loi du 18 septembre 1940, supprima les Ecoles Normales comme celle de Mâcon, en n’en laissant subsister qu’une au chef-lieu d’Académie, Dijon, pour faire suivre aux élèves une quatrième année de formation professionnelle. A Mâcon, les normaliens étaient envoyés au lycée pour y préparer le baccalauréat, mais sans y recevoir la formation de naguère, spécifique des Ecoles Normales.


Collaboration et délation jusque dans les écoles

13 octobre 1941, discours de rentrée du Maréchal dans une classe de l’Allier : «  Je suis attristé en pensant que certains d’entre vous ne résistent pas à la tentation et qu’ils copient ou qu’ils trichent pour gagner quelques points. C’est une faute et je veux qu’elle cesse. Parmi vous, les plus nombreux ne copient pas. Je leur demande d’avoir le courage de leur opinion et d’arriver à empêcher les autres de le faire. On m’a expliqué que certains d’entre vous ont déjà agi, qu’ils ont organisé des ‘‘ligues de loyauté’’ qui ont eu beaucoup de succès. Je les en félicite. Je suis certain que vos maîtres et vos professeurs vous conseilleront et vous aideront dans cette voie. Adressez-vous à eux et surtout donnez le bon exemple à vos voisins » (5)


La IVe République commencé le 27 octobre 1946, dans ses premiers actes, rétablit la légalité républicaine, l’Ecole primaire publique redevenant laïque et les Ecoles Normales étant reconstituées. Après la Libération, Monsieur Blanc, dernier directeur avant la guerre finit sa carrière comme Inspecteur d’académie à Bourg-en-Bresse, ayant élu domicile à Mâcon. Il occupa sa retraite en prenant, pendant quelques années, la présidence de la Fédération de Saône-et-Loire des Œuvres Laïques. Il décéda à Mâcon en 1962.


Nécrologie, bulletin de l’Amicale n° 84 de 1963

 

La direction de Monsieur Albaric (1946-1948)

Monsieur Albaric, après avoir dirigé l’Eole Normale d’Ajaccio, présidera à la renaissance de l’Ecole Normale de Mâcon dans ses locaux enfin libérés. Il déclarera, dans le bulletin de l’Amicale de 1947 : « La préparation du baccalauréat à l’Ecole Normale représente une conquête de justice qu’il faut sauvegarder à tout prix. Et pour peu qu’on veuille y réfléchir, on s’aperçoit que les Ecoles Normales, ont devant elles un immense champ à labourer et qu’une immense responsabilité les attend. » Il restera deux ans à Mâcon, avant d’aller diriger l’Ecole Normale de Toulouse.

Réorganisées avec de nouveaux programmes, les Ecoles Normales conservaient la préparation du baccalauréat et la formation professionnelle de la 4e année d’études. A l’Ecole Normale d’Instituteurs de Mâcon, il avait fallu reprendre possession des locaux, abandonnés l’année scolaire 1941-42, à l’armée allemande. Quand ils furent restaurés, réaménagés, à la rentrée de 1946, ils purent accueillir quatre promotions, soit une soixantaine d’élèves. Une rénovation pédagogique était engagée à l’Ecole Normale, avec « foi » et « enthousiasme » pour un personnel enseignant que rajeunissait la venue de professeurs, anciens élèves de l’Ecole dans « l’immédiate avant-guerre », parmi lesquels Gruère, Vautrey, Vitte, Rolland et Fenouillet.


Ce dernier, surnommé le « planteur », était d’ailleurs chargé de l’enseignement agricole et, même si la modernité pédagogique pointait à l’Ecole, la paire de sabots était toujours au trousseau d’entrée des Normaliens. André Fenouillet était chargé de motiver ces derniers sur les métiers de l’agriculture : « Pourquoi cela ? Parce que la grande majorité des Instituteurs étaient nommés à des postes en milieu rural, où ils auraient à côtoyer et vivre avec les agriculteurs et leurs enfants. (..) Mais en plus, nombre d’entre eux ont été amenés à organiser des cours du soir, des cours agricoles. Ce fut pour l’époque, une grande évolution où l’on vit des enseignants aider les paysans dans leur métier et tout ça aura marqué d’une manière indélébile le rôle joué par les Instituteurs en milieu rural sur la mise en place de l’Enseignement Agricole public. Pour ce qui est des sabots dans le trousseau, nous les avons mis quelques fois pour jardiner, planter, semer les haricots, salades, pommes de terre dans la parcelle qui nous était réservée car le reste du jardin, avec un jardinier, fournissait une partie des légumes consommés dans nos repas du restaurant. » Témoignage de Roland Cottin, promotion 1952-1956.   

D’autre part, dès 1945, sur la demande insistante du Ministère de l’Education Nationale, le projet de construction d’un internat avait été commencé par les services de la Préfecture et le Conseil Général. Même « pleine de désagréments », une installation provisoire d’internat était faite, à l’Ecole et alentour, dans les dortoirs de l’Hospice départemental de vieillards.


Photographies du bâtiment d’internat en construction prise par un normalien de la promotion 1949-1953 qui logeait pour la dernière année dans l’« Hospice Départemental des vieillards et incurables », 1950 (AAEENM)

Ce fut le 16 mai 1848, en présence du Président de la République Vincent Auriol lui-même, que la première pierre du nouvel édifice était posée, et que l’on rendit hommage aux 22 disparus de la dernière guerre, morts au combat ou en déportation, normaliens ou anciens normaliens, par l’apposition, dans le hall de l’Ecole, d’une plaque sur l’initiative de l’Amicale et portant leurs noms. Décès moins nombreux que ceux de la Première Guerre mondiale, fort heureusement, mais dus, pour les deux cinquièmes environ, aux persécutions commises par les allemands en Saône-et-Loire, ils rappelaient qu’entre 1939 et 1945, la mort avait frappé ainsi de nombreux civils. Une plaque érigée encore par l’Amicale, remémorait l’assassinat du professeur Jean Bouvet par la Milice française, le 28 juin 1944, victime civile regrettée par de nombreux enseignants ou sympathisants, pour sa personnalité attrayante, généreuse et éprise, à l’extrême, de liberté : « Le 16 mai 1948 devait avoir lieu à l’Ecole une cérémonie jusque-là unique dans ses annales. Le président de la République Vincent Auriol, M. Edouard Lepreux, Ministre de l’Education Nationale, accompagné de M. Beslais, directeur de l’enseignement primaire et de M. Allix, Recteur de l’Académie de Lyon, honorent l’Ecole de leur visite afin de procéder à l’inauguration de la plaque apposée à la mémoire de nos vingt-deux morts de la dernière guerre et à la pose de la première pierre du nouvel internat de l’Ecole. Cette première pierre posée, les autres suivront rapidement, et la construction se trouva achevée dès 1950. Le nouvel édifice était conçu pour recevoir 120 élèves. Cette fois, on avait vu grand, et c’était nécessaire car avec la nouvelle organisation de la formation professionnelle, l’Ecole devait recevoir non plus trois promotions, mais quatre. » Extrait du Bulletin de l’Amicale, 1949. (6)


La direction de Monsieur Barbier (1948-1960)

Monsieur Barbier fut, auparavant, Inspecteur primaire au Blanc. Il devait assumer la direction de l’Ecole Normale de Mâcon pendant douze années, avant son retour au pays natal, à la direction de la toute nouvelle Ecole Normale de Nevers.

En 1950, la rentrée scolaire eut lieu dans l’Ecole pourvue du nouvel internat, à peine achevé. Il était conçu pour recevoir 120 élèves, effectif maximum qu’on croyait avoir largement calculé. Cependant, à cause de la pénurie du personnel enseignant primaire, un recrutement accéléré d’élèves-maîtres conduisit à dépasser ce chiffre et, dès 1954, il fallut « externer » quelques élèves.

Le Directeur tenait à donner aux normaliens une éducation libérale dans une école heureuse. Il voulut l’ouvrir sur la ville, d’où l’éclosion d’une vie associative, l’organisation d’un bal annuel, la représentation de pièces de théâtre grâce à la collaboration même d’élèves-maîtres et d’élèves-maîtresses. Orchestres et troupes de théâtre de la « maison » se succédèrent sur la scène de la salle des fêtes et valurent des triomphes à l’Ecole. Toutes ces manifestations attiraient la foule des amis de la « Roupane ».

L’Amicale ne fut pas en reste et organisa diverses commémorations à partir de 1953 : « Le 5 septembre 1957, l’Amicale célébrait une commémoration dont elle avait été l’instigatrice dès 1953.Elle honorait solennellement deux anciens et éminents professeurs de l’Ecole, Jean Bouvet et Ernest Hugonnier, en attribuant leurs noms à deux salles de l’Ecole où chacun d’eux avait enseigné, celle d’histoire et celle de sciences physiques. Pour conférer à cette cérémonie toute l’ampleur qui convenait, on avait invité notamment M. Dirand, chef de cabinet du Ministre de l’Education Nationale, M. le Préfet, M. l’Inspecteur d’académie, M. le Maire de Mâcon, Mme Hugonnier, Directrice honoraire de l’Ecole Normale d’institutrices et M. Bouvet, professeur agrégé de lettres, fils de Jean Bouvet. La ville de Mâcon, dans le but d’honorer la mémoire de celui qui avait siégé durant une longue période  en son Conseil Municipal, avait décidé de donner son nom à la rue précédemment dénommée rue de l’Asile départemental. Ce fut M. Escande, Maire, qui apporta à Jean Bouvet, l’hommage reconnaissant de la cité. » (7)


La direction de Monsieur Joseph Simon (1960-1966)

C’est dans une Ecole Normale rénovée que Monsieur Simon fit sa rentrée après avoir quitté la direction de l’Ecole de Rodez. C’est à lui qu’incomba, l’année de son départ de fêter la dernière grande commémoration que l’Ecole de Mâcon aura connu : la célébration du centenaire des bâtiments, le 8 septembre 1966. Notons qu’il le fit en présence de son successeur, déjà arrivé. La grande salle de l’Ecole accueillit, une nouvelle fois, de nombreuses personnalités : M. Vimeney, Préfet de Saône-et-Loire, M. Bouchard, Recteur de l’Académie de Dijon, M. Escande, Maire de Mâcon. La manifestation se termina par un grand banquet traditionnel, servi dans le cadre grandiose du Centre nautique.


Extrait du bulletin de l’Amicale n° 88, 1967

A l’occasion de cette commémoration, outre la rétrospective consacrée à la vie de l’Ecole depuis sa fondation, à travers une très intéressante exposition, la maquette et les plans d’une future Ecole Normale dont la construction était envisagée au nord de la ville, furent présentés. Projet qui resta sans lendemain… M. Simon quitta l’Ecole de Mâcon dans les jours qui suivirent pour rejoindre l’Ecole Normale d’Orléans, où il décéda subitement, le 27 janvier 1967.


Une nouvelle Ecole Normale d’Instituteurs à Mâcon ? L’arlésienne ! Depuis 1961, on parlait de la construction d’une vaste Ecole Normale neuve aux lisières nord de Mâcon. En effet, le projet d’agrandissement de l’Ecole de la rue de l’Héritan avait été refusé par le ministère et la visite du Ministre de l’Education Nationale Royer fut suivie d’une déclaration pleine d’espérance : «  Si nous pouvions hâter l’Ecole Normale de Mâcon, je crois que ce serait un résultat heureux de cette réunion (...) il semble que la première tranche de travaux pourrait être financée en 1962. » Aussitôt, le Préfet demande à l’Assemblée départementale de budgéter 200 000 NF pour l’acquisition d’un lot de 7 hectare au nord de Mâcon, pour la nouvelle construction (source : article de M. Simon dans le bulletin de l’Amicale n° 83 de 1962).  Les choses vont bon train et une description complète du projet est présentée dans le bulletin de l’Amicale n° 84 de 1963 :




Une histoire heureusement engagée en quelque sorte. Le rapport de M. Simon de 1964 se veut plus nuancé : « L’année 1963 n’a pas permis d’avancer beaucoup vers la solution. Deux obstacles viennent, provisoirement, ralentir l’élan pris. Le premier, qui en serait étonné, est d’ordre budgétaire. Le second est plus sérieux, puisqu’il s’agit de la structure même du futur établissement ». (source : article de M. Simon dans le bulletin de l’Amicale n° 85 de 1964). Perspectives inquiétantes bien que non définitives.


En 1965, l’espoir renait faiblement : le projet de construction a fait l’objet d’une décision favorable de financement, mais il ne faut pas s’attendre à la pose de la première pierre avant au moins 2 ans, deux difficultés persistant : le département n’a pas encore pu acquérir la totalité du lot des 7 hectares prévus pour la construction, et les conditions de fonctionnement des Ecoles Normales après la mise en place de la nouvelle réforme restent à définir. (source : article de M. Simon dans le bulletin de l’Amicale n° 86 de 1965). L’année suivante, si sur le plan départemental le nécessaire a été fait pour l’implantation, il n’en va pas de même du côté de l’Etat qui met moins de hâte à confirmer ses engagements. Il semble que la future structure des Ecoles Normales pose toujours des problèmes : alors que le projet de reconstruction table sur une formation professionnelle de deux ans, la future réforme ne prévoit qu’un an de séjour à l’Ecole Normale. Il se précise que les Ecoles Normales seront donc appelées à disparaître sous leur forme départementale actuelle, ce qui s’avèrera définitif, plus tard, avec la création des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres. Alors que l’année 1966 fêtera en grande pompe le Centenaire des bâtiments de la Roupane, M. Simon aura tiré sa révérence et M. Diot, nouveau Directeur de l’Ecole, ne fera plus aucune allusion à la nouvelle Ecole Normale de Mâcon nord, se contentant d’énumérer les travaux d’entretien de la vieille école… (source : article de M. Diot dans le bulletin de l’Amicale n° 88 de 1967)



  La direction de Monsieur Henri Diot (1966-1969)

M. Diot arrivait des pays d’Outre-mer où il avait déjà mené une longue carrière, notamment en dirigeant les Ecoles Normales de Dakar et Porto-Novo. Il était ancien normalien de l’Ecole de Moulins. Il ne resta que peu de temps dans notre département avant d’être nommé à la direction de l’Ecole Normale de Troyes, ville dont il fut, parallèlement, l’adjoint au Maire pendant plusieurs années.

La direction de Monsieur Kantorowitz (1969-1976)

 M. Kantorowitz avait gravi tous les échelons du métier. Il fut Instituteur au début de sa carrière, avant de devenir élève-inspecteur à l’Ecole Normale Supérieure de Saint-Cloud. Sa première nomination en tant que tel fut Wissembourg avant d’accéder à la direction de l’Ecole Normale de Mâcon. Il fut le premier directeur de l’Ecole Normale mixte en 1976.

La direction de Monsieur Gilbert Chambon (1977-1982)

 Nommé à la rentrée de septembre, M. Chambon arrivait de l’Ecole Normale de Châlons-sur-Marne où il était Directeur adjoint. Auparavant, il fut Normalien d’Avignon, professeur d’Anglais et I.D.E.N à Florac en Lozère.

La direction de Monsieur Mouzat (1982-1985)

Ancien Normalien de la Corrèze, M. Mouzat a exercé toutes les fonctions de la carrière enseignante, passant d’instituteur à directeur d’école puis P.E.G.C (professeur d’enseignement général de collège), principal de C.E.S (collège d’enseignement secondaire), inspecteur-professeur, titulaire d’un doctorat d’Etat en biologie, il fut attaché auprès du Recteur de l’Académie de Clermont-Ferrand. 


A partir de 1985 : les grands changements

Madame Anne Marie Houillon, fut nommée en 1985 à la Direction de l’Ecole de Mâcon. Passée par l’Ecole Normale, elle avait été auparavant professeure de philosophie, inspectrice des écoles maternelles, puis IEN à Auxerre, Directrice adjointe de l’Ecole Normale de Dijon. Elle sera la dernière Directrice de l’Ecole Normale mixte de Mâcon et c’est à elle qu’incombera le remplacement de la vieille Ecole par l’IUFM (Institut Universitaire de Formation des Maîtres) en 1991. Elle sera IA-IPR (Inspectrice d’Académie-Inspectrice Pédagogique Régionale), cumulant de nombreuses activités associatives parmi lesquelles de hautes fonctions à la Ligue de l’Enseignement.

Monsieur Jacques Broyer fut nommé Directeur de l’IUFM de Mâcon en 1997 : « Après Anne-Marie Houillon et moi-même à Mâcon, furent nommés Roger Guillon, puis Jean-Michel Sandon, M. Barraud et enfin Aurélie Varot pour occuper les postes des établissements successifs (IUFM, ESPE, INSPE). »




Jacques Broyer

Roger Guillon




Jean-Michel Sandon

En complément

J’entrais personnellement à l’Ecole Normale de Mâcon dans la promotion 1976-1978. En cette année 1976, sur la demande du Conseil général et après consultation du Conseil départemental de l’enseignement primaire, le sort de l’école normale de garçons est scellé ; l’ensemble des maîtres et maîtresses seront désormais formés dans les locaux de l’ancienne Ecole Normale de filles de la rue de Flacé qui deviendra Ecole Normale mixte. Ce changement aura pour effet, en 1978, le « redéploiement » des postes et la suppression de 7 postes de professeurs. Fin 1980, le Conseil général a permis de réaliser une remise à neuf totale de l’Ecole Normale mixte (toiture, façade, menuiseries, peintures et tentures intérieures), ainsi qu’un réaménagement de l’ancien externat qui abritera, à terme, les salles d’histoire-géographie, le secteur audiovisuel et le secteur informatique, quelques chambres étant prévues au dernier étage. En 1992, disparaît l’Ecole Normale mixte de Mâcon pour voir naître le Centre Universitaire de Formation des Maîtres de Mâcon (IUFM) dont Madame Houillon, jusqu’alors directrice de l’Ecole Normale Mixte, prend la charge (6).  La fin des IUFM et la période qui suivit méritera de faire l’objet d’une prochaine étude. Nous arrêterons là notre exploration du passé, pour cette fois, à l’aube des années 2000, dont voici la synthèse :


Le mot de la fin

Ce bref historique des Ecole Normales de Mâcon s’inspire largement des travaux déjà effectués par nos anciens dans les bulletins de l’Amicale du siècle dernier. Il s’inspire aussi d’un texte de manuscrit appartenant au fonds Gillot du musée, qui fut publié en 1987 aux éditions Horvath sous le titre En Saône-et-Loire, notre école au bon vieux temps. Pierre Gillot y précise ses sources :


Bibliographie proposée dans le livre édité par Horvath. Erratum lire première ligne : 1884-1984 (collection musée)

Cet historique prend aussi en compte les travaux, quelques années auparavant, de R. Bidot (promotion 1923-1926 de l’école Normale de Mâcon, secrétaire de l’Amicale en 1957) qui avait entrepris le même travail pour la brochure du centenaire de l’Amicale (cité en tête de bibliographie), ayant  vraisemblablement utilisé les mêmes ressources des anciens bulletins de l’Amicale.


Brochure du centenaire de l’Amicale, 1984 (collection musée)

Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour nos archivistes du musée de la Maison d’Ecole et amis Clotilde et Pierre Gillot, aujourd’hui disparus. Dans leurs aperçus historiques, ils n’auront eu de cesse de vanter l’excellence des formations dans les Ecoles Normales, malgré leur naissance difficile, et l’excellence des professeurs qui y dispensèrent leur savoir, à des promotions de chacune 3 puis 2 ans.

De nos jours, l'Éducation nationale manque cruellement d'enseignants. À tel point qu'elle a organisé, à partir du mois de juin 2022, des sessions de "jobs dating" (terme barbare qui correspond à la triste réalité) afin de recruter des professeurs, dans le premier comme dans le second degré. Cette opération inique a été reconduite en 2023…

Nul doute que Clotilde et Pierre, ainsi que tous les anciens, doivent se retourner dans leur tombe à la vue de ce recrutement express : ½ heure d’entretien, quelques heures de formation et hop ! Devant les élèves… Quel camouflet pour la profession et quel mépris pour nos professeurs dont on nie la réussite à un concours très difficile (niveau bac + 5, Master 2) et dont on nie aussi les compétences acquises durant une longue formation, fondement même du métier (8).  

Patrick PLUCHOT

Sources :

-       Manuscrit Aperçus historiques sur les Ecoles Normales de Saône-et-Loire, Pierre Gillot, 1987.

-       Photographies : archives musée, Amicale des anciens élèves de l’EN de Mâcon ( http://aaeenm.over-blog.com ),  et collections privées.

-       Archives du musée, fonds Ecoles Normales, dont les travaux de R. Bidot, secrétaire  honoraire de l’Amicale, Roger Sebert, Pierre Colomb et Patrick Pluchot pour le bulletin de l’Amicale, 2011 à 2019.

-       Cent ans d’Ecole, publication du Musée de la Maison d’Ecole, 1983, Groupe de travail du musée.

-       CD-ROM Images de l’école, production du Musée de la Maison d’Ecole, 2002, P. Pluchot.

-       En Saône-et-Loire, notre école au bon vieux temps , J. Joly, P. Rivière, P. Gillot, chez Horwath, 1987.

 

(5) : Revoir à ce sujet les articles du blog : Regard sur l’école sous Vichy, juin 40-septembre 45 : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2018/06/lecole-sous-vichy.html ; De Jean Zay au régime de Vichy : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2022/04/de-jean-zay-au-regime-de-vichy.html

 

(6) : Revoir le résumé fait de la journée du 16 mai 1948 dans le cahier des délibérations de l’Amicale des Institutrices dans l’article du blog d’avril 2023 : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2023/04/apercu-historique-de-lecole-normale.html

 

(7) :

BOUVET Jean

à Velleron, Vaucluse, en 1892.


Jean Bouvet fut élève de l’Ecole Normale Supérieure de St-Clou mais ses études furent écourtées en 1914 à la suite de sa mobilisation dans l’Infanterie. Blessé à Verdun, il est replié à l’hôpital de Montceau-les-Mines. C’est à cette période qu’il rencontra son épouse, Marie-Antoinette Genevois (née en 1893 dans cette même ville) et qu’il se maria.

En 1920, il est nommé professeur d’histoire à l’Ecole normale de Bonneville, puis aux Ecoles Normales de Mâcon en 1922, jusqu’à leur fermeture par le gouvernement de Vivhy en 1941, date à laquelle il continuera d’enseigner au Collège moderne de garçons (avec son ancien élève et collègue Marcel Vitte). En 1923, pacifiste convaincu, il publie, sous le pseudonyme de André Jean, Les Cantilènes Rouges, un recueil de chants sur les souffrances endurées durant la Grande Guerre :

« Les poètes maudits sont ceux qui, dans leur chambre,

Devant le papier blanc et le feu flambant clair,

Bien repus, honorés, assurés d’être lus

Par un public servile, osent chanter la guerre. (…)

Faites taire vos chants ou priez sur les morts

Pleurez, mettez un crêpe à vos lyres, poètes,

Allez voir les tranchées et regardez nos fils

Qui pourissent sous le ciel dur, comme des bêtes.

Regardez les pourrir. Regardez les vivants,

Dites si dans leurs yeux s’est allumée la haine,

S’ils rêvent de tuer, s’ils rêvent de mourir,

S’ils n’ont pas le désir des heures pacifiques.

Les poètes maudits ont demé dans les cœurs

La haine et n’ont récolté que la haine,

Ils ont menti, ils ont injurié l’amour

Et caché lâchement l’horreur du sacrifice. »

 Jean Bouvet

En 1926, il est Secrétaire fédéral de la Fédération départementale de la Ligue des Droits de l’Homme, puis en devient Président en 1934. Il devient en outre secrétaire du Cartel mâconnais pour la paix en 1932. Commissaire départemental des Auberges de Jeunesse, il fonda celles de Crèches, Tournus, Mont-Saint-Vincent et Epinac. Chercheur régionaliste, il publia notamment un article dans le bulletin de la « Physiophile » de Montceau en collaboration avec son ancien élève Henri Parriat (« Notes d’archéologie montcellienne », 1928). Bientôt, le cecond conflit mondial éclate, Jean Bouvet écrit dans une lettre du 2 novembre 1939 : « Nous sommes entrés dans la grande épreuve et ma sensibilité m’y fait plus participer que ma situation peut le laisser croire. J’ai trop souffert moi-même il y a 25 ans pour rester aujourd’hui insensible (…) Résister au flot montant du mensonge et de l’égoïsme, préserver de toute atteinte les vraies valeurs humaines, voilà la règle de conduite pour le temps présent. »

Jean Bouvet, Conseiller Municipal, résistant, patriote, fut lâchement assassiné par la Milice, en 1944, à son domicile de la rue Gambetta à Mâcon (ainsi que six autres personnes, en représailles à l’assassinat de Philippe Henriot) : « Il cherchait par là le chemin de la paix et du bonheur, et il le trouvait dans la connaissance, la compréhension et l’amitié des autres hommes. La veille de sa mort, il me confiait encore son incompréhension des haines présentes et ses espoirs de lendemain meilleur. Il avait cependant le pressentiment de sa mort. Oui, nous aimions Jean Bouvet. » (Discours de Louis Escande, Maire de Mâcon, à l’inauguration de la rue Jean Bouvet, 5 septembre 1957)

Pacifiste, humanisme, poète, ami de Jean Giono, il a marqué de sa rayonnante personnalité des centaines d’institutrices et d’instituteurs de Saône-et-Loire.

« Je rêve un jour où l’homme

Toutes barrières abolies

Vers tous les peuples du monde

S’en ira libre et fraternel »

Jean Bouvet

Sources : documentation Musée de la Maison d’Ecole, « Maîtres et Maîtresse de Saône-et-Loire » (AVNP71).

Après une interruption de sept années (la dernière Assemblée générale avant la guerre et la suppression des Ecoles Normales ayant eu lieu le 4 mai 1939), voici l’hommage des Institutrices, le 20 juin 1946, à l’Assemblée générale des Anciennes Elèves de l’Ecole Normale de Mâcon, hommage à jean Bouvet et aux victimes de la guerre dont le nom ne figurera sur aucune plaque à leur mémoire :






Extrait du registre des délibérations de l’Association des Anciennes Elèves de l’Ecole Normale de Mâcon, 1946 (collection musée)

Source : article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2023/04/apercu-historique-de-lecole-normale.html#more 

 (8) : Création de l’IUFM de Mâcon :



Article du Progrès du 29 mars 1993 (collection musée)

 (7) : Après l’IUFM (1990) et l’ESPE : Ecoles Supérieures du Professorat et de l’Education (2013), entrée en jeu de l’INSPE : Institut National Supérieur du Professorat et de l’Education en 2019 et hausse du niveau de formation :





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