lundi 8 avril 2024

Roger Denux, instituteur-écrivain

 

Roger Denux

Né à Montceau-les Mines et mort à Saint-Vallier

(6 février 1899-16 août 1992)

Bulletin n°86 de l’amicale, cinquantenaire de la promotion 15-18, 1965 (collection musée)

Connaissez-vous Roger Denux instituteur-écrivain ?

La bibliothèque municipale d’Ecuisses porte son nom depuis 2004, il reçut le prix Furtado de l’Académie française en 1961 pour son livre Il pleut sur mon jardin. Régis Messac (1) dira  de ce montcellien dont le vrai nom est Adrien François Roger Boeufgras (9e au 3e rang sur la photo) : « Un de ces instituteurs, plus nombreux qu’on ne pense, qui entretiennent, dans ce qu’on appelle d’ordinaire « un trou perdu », une activité intellectuelle que bien des soi-disant « maître de la culture » pourraient leur envier. » Il fit son Ecole Normale à Mâcon avec son camarade Claudius Pariat (4e au 2e rang) autre figure montcellienne (2).



Extrait du bulletin de l’Amicale n°48, année 1920 (collection musée)

Adrien Boeufgras, fils d’Adrien Boeufgras, employé aux Mines de Blanzy et de Joséphine Gauthier, intégra donc la promotion 1915-1918 de l’Ecole Normale de Mâcon à la rentrée 1915. Le 17 avril 1918, il fut incorporé au 56e RI à Chalon-sur-Saône. Passé au 163e RI, il fut démobilisé le 28 mars 1921. Lieutenant de réserve, il devait être rappelé sous les drapeaux en septembre 1938, puis du 2 août 1939 au 13 août 1940. Après les péripéties de la Grande Guerre, il exerça enfin son métier de maître d’école comme adjoint à l’école du Bois-du-Verne (Montceau-les-Mines). Il sera nommé ensuite au poste de chargé d’école à Cuzy (71) de 1923 à 1932, avant d’être nommé à Ecuisses-7 Ecluses (71) de 1932 jusqu’à sa retraite en 1954-55, lieu où il résidera pendant 60 ans. Dès lors, il consacrera le reste de sa vie à l’écriture. Il terminera sa carrière titulaire de la Médaille d’Argent et Officier des Palmes académiques. Madame Boeufgras fut directrice d’école et prit sa retraite deux ans avant lui.

Un instituteur syndicaliste, écrivain, serviteur de la langue française

Il fut membre du Bureau National du Syndicat National des Instituteurs et secrétaire de la Commission pédagogique. Son engagement au sein de ce syndicat l’amènera à participer à deux congrès de la Fédération internationale des associations d’instituteurs en tant que membre de la délégation du SNI : un à Stockholm en 1949 et un autre à Amsterdam en 1950. Toujours au sein du SNI, son statut de membre de la Société française de pédagogie le conduisit à prononcer nombre de conférences dans plusieurs villes de France.  




Roger Denux participa à la création de la Revue mensuelle de Culture populaire, de Littérature et d’Art Les Primaires, en compagnie de Régis Messac (déjà cité) et de René Bonissel (qui prendra plus tard, de 1944 à 1953, la direction du journal syndical L’Ecole Libératrice). Denux, en syndicaliste engagé et instituteur proche des « instituteurs libertaires » qu’il était, sera codirecteur de la revue de 1925 à 1940.

Passionné de littérature et homme de lettres, il fut l’auteur de poèmes, de romans, d’essais, d’anthologie, de souvenirs ou encore de manuels scolaires. Membre de l’Académie du Morvan, il fonde, en 1968, le prix littéraire du Morvan. Il fut membre de l’Académie des Sciences Arts et Belles-lettres de Dijon. Spécialiste de cet auteur, il fut aussi membre de la Société Chateaubriand, ainsi que vice-président de la Société des Auteurs de Bourgogne.

Il ne semble pas inutile de rappeler ici qu’Adrien Boeufgras fut le parolier de l’Hymne des Normaliens dont son camarade Claudius Pariat fut le compositeur. 



(collection musée)

Augustine et Claudius Pariat (collection Daroux) : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2021/06/claudius-pariat-defenseur-de-la-cause.html#more

Souvent récompensé, à juste titre, Adrien Boeufgras, alias Roger Denux sera lauréat du prix Auguste Furtado de l’Académie française en 1961 pour son livre Il pleut sur mon jardin, il obtiendra le prix Albert-Marfant, en 1975, sera deux fois lauréat de l’Académie de Toulouse, en 1975 et 1981. Dans les années 60, il fut membre de la Commission ministérielle d’études orthographiques. Il fut nommé Chevalier des Arts et Lettres en 1978 et Chevalier, puis Officier de la Légion d’honneur en 1978.  Il décédera le 16 août 1992.  

Extrait de la rubrique Nécrologie du bulletin n°16 de l’Amicale, 1992-1993 (collection musée)

Un auteur prolifique

Quelques-unes de ses œuvres :

  • Cendres douloureuses (1921)
  • Sainte odeur de la vie (1924)
  • L'Aube sur les morts (1931)
  • Le Magister (1934)

  • Pour quelques-uns (1937)




  • Le Drame d’enseigner (1944)






  • Ces roses-ci (1947)

  • Six de mon village (1948)

Dédicace du livre

  • Il pleut sur mon jardin (1960)
  • Le Vin du souvenir (1964)
  • Feuilles volantes (1965)




  • Des Goncourt Essai
  • L’école et les Maîtres dans le journal de Jules Renard Essai
  • Pour la réforme de l’enseignement : le cycle d’orientation Etudes traduites en allemand par H. Rodenstein





Sources :

-       Bulletins de l’AVNP (Amicale des anciens élèves de l’EN de Mâcon).

-       Documentation musée.

-       « Un homme de belles-lettres : Roger Denux », Images de Saône-et-Loire, n° 36, janvier 1978, pp. 14-15.

-       La BNF pour la bibliographie.

-       Différents articles du blog du musée (notamment de la rubrique « Commémoration »).

-       https://www.le-livre.fr/auteur/denux-roger-(pr%C3%A9sent%C3%A9s-et-choisis-par)?select_base=0

Patrick PLUCHOT

(1) :

« Fils d’une institutrice et d’un inspecteur du primaire (..) écrivain et militant pacifiste (..) Mobilisé en août, Messac est blessé à la tête le  et trépané. Durant la Seconde Guerre mondiale, alors que, selon son expression, « la ronde infernale autour du globe est commencée, cette fois pour de bon », Régis Messac rédige Pot-pourri Fantôme, une chronique des années de guerre et d’Occupation de 1939 à 1942. Ce pamphlet contre le régime de Vichy est salué par la critique comme « la meilleure peinture littéraire jamais réalisée sur cette période », comme un réquisitoire « où gronde la révolte d’un esprit libre devant la servitude », un livre qui « appartient au petit nombre des documents précieux de l’histoire immédiate que l’Histoire conformiste laisse disparaître quand elle n’a pas contribué à leur anéantissement. » Simultanément, Régis Messac s’engage dans la constitution d’une fraction du Front national, un mouvement de résistance d’obédience communiste, qui s’est développé dans la Manche à partir de 1941. Arrêté à Coutances le lundi , il est détenu à la prison de Saint-Lô jusqu’au . Condamné à un an de prison le  précédent, il est déporté Nacht und Nebel  pour être rejugé en Allemagne par le Tribunal du peuple à Breslau. Au cours de son périple, il connaît successivement la prison de Fresnes ( – ), le camp de concentration de Natzweiller-Struthof, en Alsace ( – ), le pénitencier de Brieg, en Silésie ( – ), le camp de concentration de Gross-Rosen (à partir du ). La dernière trace avérée de son existence porte la date du  au camp de Gross-Rosen. On peut cependant penser qu’il a pu être évacué, en février, sur le camp de Dora (auquel cas il aurait été contraint de participer aux marches de la mort), voire, en mars, du camp de Dora sur le camp de Bergen-Belsen. Le témoignage des compagnons d’infortune de Messac, rescapés de l’enfer concentrationnaire allemand, confirme l’attitude de dignité exemplaire de « cet intellectuel aux mains blanches, qui n’avait jamais manié la pioche », qui s’employa à venir en aide à ses camarades, à intervenir dans les conflits les opposant aux Allemands, à protéger les plus vulnérables au péril de sa vie. Porté disparu, la date fictive de la mort de Régis Messac est fixée au  » (Wikipédia)

(2) : Voir l’article du blog : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2021/06/claudius-pariat-defenseur-de-la-cause.html#more

(3) : Adrien Boeufgras fit partie de ce qu’on a appelé « les promotions de la Grande Guerre », durement touchée par le conflit, dont la sienne, la « 15-18 ».

« C’est le 27 juillet que s’ouvrit le concours d’entrée de 1915, auquel prirent part 50 candidats pour 35 places offertes. Sur les 35 admis, l’un, BERTHILIER  Marcel, reçu n° 25, n’entra pas à l’Ecole en octobre, et la promotion compta donc à la rentrée 34 élèves seulement.

La guerre qui faisait rage exigeait toujours plus de combattants et dès décembre 1915, les deux premiers appelés quittaient la Roupane, le premier trimestre à peine terminé. L’année 1916 voyait partir deux nouveaux camarades, puis six autres répondaient en avril 1917 à l’appel de la classe 1918. En janvier 1918, sept camarades contractaient un engagement volontaire et en avril, les quinze derniers partaient avec la classe 1919.

C’est dire qu’aucun Roupanard de la 15/18 ne put passer ses trois années à l’Ecole et y terminer normalement ses études. Les dernières offensives de l’automne 1918 virent mourir trois camarades de la promotion, tués tout trois en l’espace d’un mois. Par la suite, dix autres sont décédés, ce qui laisse à vingt-et-un le nombre des survivants d’une promotion prématurément éprouvée. Promotion qui fut à l’origine de l’hymne de la Roupane à travers des paroles de Roger Boeufgras et une musique de Claudius Pariat même si elle fut baptisée avec humour « Promotion des Crétins ». Bric-à-Brac, de Roger Denux, Bulletin n° 83 de l’Amicale des Anciens Elèves de l’EN de Mâcon, 1964.

 

« Comment après cela ne pas s’inscrire en faux contre l’infâme calomniateur qui baptisa icelle « Promotion des Crétins » ? Qu’il se montre donc, bonne mère ! Le « clerc » en question, s’il ne craint pas toutefois qu’on lui taille les oreilles en pointe…  Le fait est bien aux vacances de 1917 que cet Hymne des Normaliens naquit de la collaboration de deux gars de notre Promo et qui, d’ailleurs, depuis, ont quelque peu fait parler d’eux.

Promotion des Crétins, si vous voulez, mais qui néanmoins, surent faire leur devoir en des périodes troublées, tragiques…

Comme les promotions précédentes, nous fûmes tous mobilisés, très tôt, avant la fin des études. Appartenant aux classes1917, 18 et 19, certains d’entre nous ont leur nom gravé sur la pierre du souvenir… GIRAULT, LAMBERTET, classe 1918, POTHIER, classe 1919, tués à l’ennemi en 1918. Le capitaine VAUPRE fut blessé en 1940. NAVOIZAT, déporté en 1941, mourut par la suite. HENRY, ROUX furent emprisonnés par les autorités d’occupation. (..)

Tous deux victimes de la dureté des temps [JOBEY et SIGNORET] et des lois d’exception du Régime de Vichy, on nous en a sortis… [de l’enseignement], nous invitant aimablement à tirer nos grègues et à filer vers d’autres cieux… L’ami BOUDOT Gilbert, lui, fut inquiété pour d’autres raisons (demi-porc mis au saloir sans état civil régulier), puis dut disparaître dans la verdure pour sa sécurité personnelle, et par la suite ne rentrera pas dans l’enseignement. Voici d’ailleurs certains passages d’une lettre qu’il m’écrivit naguère à ce sujet, où on reconnaîtra la marque de son esprit caustique :

« J’ai été effectivement révoqué de mes fonctions de secrétaire de mairie pour avoir salé abusivement la moitié d’un élève de Saint-Antoine. C’était sans doute dans cette moitié que s’était logé le Diable, car l’heureux bénéficiaire de la deuxième moitié ne fut pas inquiété. Après ce tour de demi-cochon, je fus frappé d’une mesure de déplacement d’office en raison de mon « attitude politique ». (..) Voilà où peut conduire un cochon. Je dois dire d’ailleurs que dans cette histoire, il y eut plusieurs fameux cochons, dont le seul respectable fut celui qui baignait dans le saloir. J’adresse à sa mémoire un souvenir ému et reconnaissant… et j’espère qu’il est au Paradis des Cochons. Quant aux autres, qui étaient, je crois, de fervents « bien-pensants », je suppose qu’ils ont dû rendre des comptes au Juge Suprême, car ils doivent être, pour la plupart, « salés » eux aussi depuis un certain temps. » Tout ceci, bien sûr, n’a rien à voir avec la chronique du Cinquantenaire, mais révèle par quelles alternatives très peu réjouissantes sont passés certains de nos collègues pendant la période d’occupation). D’après la chronique du Cinquantenaire, Joseph SIGNORET (15/18) Bulletin de l’Amicale des Anciens Elèves de l’EN de Mâcon, n° 86, 1965.

Les « mobilisés deux fois » de la promotion 15/18

 

BEUGRAS Edmond-Etienne (15/18) :

Né le 23 mai 1899 à Saint-Marcellin-de-Cray. Mobilisé en avril 1918 au 14ème B.C.A et démobilisé en avril 1921, il est mobilisé à nouveau en 1939 comme lieutenant au 418ème Régiment de Pionniers, il fut fait prisonnier et interné à Lübeck, puis à Feshbeck de juin 40 à août 41.

BOEUGRAS Adrien-François-Roger (15/18) :

Né le 6 février 1899 à Montceau-les-Mines. Mobilisé au 56ème R.I à Chalon-sur-Saône en 1918, puis passé au 163ème R.I, il fut démobilisé le 28 mars 1921. Lieutenant de réserve, il est rappelé sous les drapeaux en septembre 1938.

CLAIR Claude (15/18) :

Né le 13 janvier 1899 à  Brion. Engagé volontaire le 5 janvier 1918, démobilisé le 24 décembre 1920, mutilé de guerre, il est combattant volontaire de la Résistance en 1940-45, il est décoré de la médaille d’argent de la Reconnaissance Française.

 

GRIVEAU Léonard (15/18) :

Né le 20 juillet 1899 à Montceau-les-Mines, il avait préparé le concours à l’E.P.S de Montceau qui fournira 10 élèves-maîtres de la 15/18. Mobilisé en avril 1918, il est libéré en 1921. Il fut mobilisé à nouveau en 1939, fait prisonnier, il s’évadera et sera détaché à l’E.N.P de Chalon.

 

JOBEY François-Robert (15/18) :

Né le 18 juin 1899 à Montceau-les-Mines. Engagé pour 3 ans dans la marine, il fut libéré en 1921. Il est mobilisé de nouveau à Oran en 1939 et démobilisé en octobre 1941. Nommé à l’E.P.S Victor Hugo de Marseille, il est déclaré démissionnaire d’office pour appartenance à une « société secrète », vraisemblablement la franc-maçonnerie. Il fut réintégré le 1er octobre 1944.

 

NAVOIZAT Joanny-Louis-Claudius (15-18) :

Né le 2 mars 1898 à Saint-Christophe-en-Brionnais. Appelé en avril 1917, ilest démobilisé en mai 1921. dès 1940, il prendra une part particulièrement dangereuse aux activités de la Résistance. Arrêté par la Gestapo, interné du 17 avril au 26 juillet 1944, il devait connaître les souffrances de la déportation du 27 juillet 1944 au 27 mai 1945.

 

PARIAT Claudius (15/18) :

Né le 23 mars1899 à Montceau-les-Mines. Incorporé en mars 1918 au  56ème R.I, il est démobilisé en mars 1921. Il est appelé à nouveau en 1939 comme lieutenant au 418ème Régiment de Pionniers. Il fut interné en Suisse et rapatrié en janvier 1941.

PETITJEAN Paul (15/18) :

Né le 26 octobre 1897 à Lessard-en-Bresse. Mobilisé en décembre 1915, il fut envoyé au front comme apirant après un stage à Saint-Cyr. Blessé au poumon, il est  décoré de la Médaille Militaire et de la Croix de Guerre. En 1939, il fut mobilisé comme professeur à l’école militaire d’Autun. Il adhéra, dès sa formation, au groupe de résistance M.L.N de Chalon  et assura le passage en zone libre de nombreux prisonniers évadés.

ROUX Jean-Marie (15/18) :

Né le 19 août 1898 à Marcilly-lès-Buxy. Mobilisé en avril 1917 et démobilisé en 1920, il est titulaire de la Croix de Guerre 1914-18 (3 citations). En 1939-45, il fut combattant volontaire et arrêté à trois reprise par l’occupant.

 

SALLET François-Claude-René (15/18) :

Né le 17 mars 1899 à Romenay. Engagé volontaire le 4 janvier 1918 et démobilisé en 1921, il est rappelé en 1939 comme maréchal-des-logis avant d’entrer dans la Résistance peu après son retour.

 

VAUPRE Antoine (15/18) :

Né le 1er mai 1899 à Igé. Mobilisé en avril 1918, il est libéré en 1921. Il est appelé en 1939 comme capitaine, blessé au combat de Foug, près de Toul et fait prisonnier, il fut rapatrié comme blessé en novembre 1940. Il est décoré de la Croix de Guerre et de la Légion d’Honneur.

Source : article du blog : Les mobilisés deux fois : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2019/02/les-mobilisees-deux-fois.html#more

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