Qui connaît « Mademoiselle » Brès ?
Un modèle de vertu républicaine
Henriette
Suzanne Brès, dite « Mademoiselle Brès » de par son célibat assumé,
naquit à Loriol (Drôme) le 28 janvier 1855 et mourut à Paris le 14 juin 1919. Elle
fut la troisième figure des fondatrices de l’école maternelle après Marie Pape-Carpantier
et Pauline Kergomard (voir sources). Auteure
d’ouvrages de pédagogie, elle consacra sa carrière aux jeunes enfants et aux
écoliers. Elle produisit un nombre considérable d’ouvrages d’apprentissage de
la lecture, de l’arithmétique, de la science, de l’histoire, de la géographie
ou encore de la religion.
Un
caractère affirmé pour une carrière exemplaire
Fille de notaire et issue de
la haute bourgeoisie du négoce par sa mère, Henriette Brès fit ses études à la
prestigieuse École Secondaire et Supérieure de jeunes filles de Genève, de même
que sa sœur Julie qui y suivit pendant deux ans des cours de pédagogie et de
sciences, s’initiant notamment à la méthode Fröbel qui influencera toute la
réflexion française sur l’école maternelle.
Henriette sortira de cette
école munie du Brevet supérieur qui lui permit, dès son retour en France, de présenter
et d’obtenir le Certificat d’aptitude à la direction des écoles maternelles, le
1er octobre 1881. Ainsi diplômée, elle est nommée, la même année, à
la direction d’une école maternelle modèle, nouvellement créée à Montélimar.
Travailleuse acharnée à l’esprit vif, à seulement 27 ans, elle obtient, en
octobre 1882, le Certificat d’aptitude à l’inspection des écoles maternelles.
Elle poursuit alors son
ascension en étant nommée, le 9 décembre 1882, Surveillante générale chargée de
l’enseignement du français au Cours normal des Directrices d’écoles maternelles
de Paris. Elle occupera ce poste jusqu’au 1er août 1889, date à
laquelle cet établissement fut supprimé. Dès octobre de cette année-là,
désireuse de poursuivre sa formation, elle entra à l’École Normale supérieure
de Fontenay-aux-Roses comme élève libre externe. Elle y prépara le Certificat d’aptitude
à l’inspection des écoles primaires et à la direction des École Normales, qu’elle
obtint en 1891.
La
reconnaissance
Elle accèdera au poste envié
d’Inspectrice générale des écoles maternelles le 3 mars 1894, poste qu’elle
occupera jusqu’à son admission à la retraite le 28 juillet 1917. Elle est alors
Officier de l’Instruction publique. Peu de temps avant son décès (le 14 juin
1919), le Président, sur recommandation du Ministre des Beaux-Arts Louis
Lafferre, signe le décret de nomination d’Henriette Brès au grade de Chevalier
dans l’Ordre de la Légion d’Honneur, le 19 février 1919. Elle n’eut pas l’opportunité
d’être honorée officiellement de cette décoration car son Brevet ne sera édité et
son diplôme remis à sa sœur qu’en novembre 1919.
Une
entorse à la laïcité peut-être ? Ou une transition compliquée…
Si
Henriette Brès travailla beaucoup avec Pauline Kergomard, grande féministe et
défenseure de la laïcité, appartenant comme elle à l’école fröbellienne, elle
resta vraisemblablement marquée par l’éducation religieuse de son époque. Il
faut dire que la laïcisation de l’enseignement, promise par les lois Ferry,
portait en elle un paradoxe. Alors même que Jules Ferry avait refusé que la
notion de « Devoirs envers Dieu » soit introduite dans sa loi de
1882, cette notion figure cependant dans le programme de morale publié juste
après, sur injonction du Conseil supérieur de l’Instruction publique, alors « composé surtout d’universitaires
spiritualistes – donc déistes- à l’image de ce qu’était alors la plupart des
enseignants de l’École publique », d’après Claude Lelièvre. Le programme en question précise
cependant que ces « devoirs » sont limités à deux points : « ne pas prononcer légèrement le nom de
Dieu » et associer « à l’idée
de la Cause première et de l’Être
parfait, un sentiment de respect et de vénération. » Il est précisé
que, quelle que soit la religion de l’élève, « l’instituteur s’attache à faire comprendre et sentir à l’enfant
que le premier hommage qu’il doit à la divinité, c’est l’obéissance aux lois de
Dieu telles que les lui révèlent sa conscience et sa raison. » En
1901, la Ligue de l’enseignement proposera la suppression de cet enseignement,
en vain, le refus de Ferdinand Buisson fut catégorique. Les devoirs envers Dieu perdureront
jusqu’au Régime de Vichy, avec Jérôme
Carcopino qui les remplacera par « les
valeurs spirituelles, la Patrie, la civilisation chrétienne ». Tout
cela disparaîtra définitivement à la Libération.
Il n’est
donc pas étonnant que Mademoiselle Brès, dans la confusion ambiante, ait
proposé son Histoire sainte, en 1895, en même temps que, durant une
soixantaine d’années, l’école républicaine et laïque aura dans ses programmes, les
« Devoirs envers Dieu », sans problèmes ou états d’âme majeurs… Curieux
non !
Dans
Mon histoire sainte, Henriette Brès
présente la culture chrétienne aux petits écoliers. Elle y développe des
épisodes de l’Ancien Testament, de la vie de Jésus, du paradis terrestre, de la
crucifixion. Des dizaines de gravures illustrent des passages de la bible, des
miracles jusqu’au combat de Samson contre le lion et évoquent bien d’autres
personnages comme Esther ou Jonas. Les amateurs du genre peuvent encore
acquérir la nouvelle édition de 2013 de cet ouvrage, l’édition originale étant
devenue très rare.
Une auteure
prolixe
Inventaire
des éditions et rééditions des ouvrages de Mademoiselle Brès :
Florilège
Sources et
bibliographie :
- Documentation
musée : articles du blog à revoir :
En marge des tableaux de lecture : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2018/06/les-methodes-de-lecture.html#more ;
Pauline Kergomard : https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2022/02/pauline-kergomard.html#more
-
- Des cours normaux pour la préparation
des directrices d’écoles maternelles, Revue
pédagogique, 1882.
- Archives de la Légion d’Honneur, Fondation patrimoine.
- Brès Suzanne Floride Henriette, persée.fr.
Patrick PLUCHOT
(1) : Friedrich Fröbel, considéré en Allemagne comme le
fondateur de l’école maternelle :
« Le jardin d'enfants de Fröbel. — Ce fut à Burgdorf
(Suisse), en 1836, que Fröbel conçut le projet d'une réforme de l'éducation
ayant pour point de départ « le développement naturel et harmonieux des
facultés chez le petit enfant », et pour but « le progrès et le bonheur de
l'humanité ». Peu après il rentra en Allemagne et s'établit à Blankenburg, près
de Keilhau : là, aidé de sa femme, il réunissait chaque jour pendant un couple
d'heures les petits enfants du voisinage, et il commença la publication d'un
journal hebdomadaire destiné à faire connaître son système d'éducation. En même
temps, il créait son matériel d'occupations et recueillait ou inventait des
jeux gymnastiques et des chants « de balle » et autres. En 1840, il donna à son
établissement le nom de Jardin d'enfants, et choisit, pour en célébrer l'inauguration sous ce nom
nouveau, le jour où l'Allemagne fêtait le trois centième anniversaire de
l'imprimerie (28 juin 1840).
En France, Mme C. Coignet et M. de Bagnaux fondèrent en 1871
une Association pour l'étude et la propagation des meilleures méthodes
d'enseignement dans les écoles et dans les salles d'asile. L'attention de cette association fut attirée sur
la méthode Fröbel par plusieurs de ses membres qui l'avaient vue employer en
Suisse, en Belgique et en Allemagne, et le comité d'études se mit à chercher
les moyens d'adapter à l'enseignement français des salles d'asile les procédés Fröbelliens.
L'association prit alors le nom de Société Fröbel. Aidée par une subvention annuelle que le Conseil municipal de
Paris lui accorda à partir de 1872, elle envoya des personnes compétentes
étudier la méthode en Belgique et en Allemagne ; elle créa une installation
spéciale dans un asile de la rue de Puebla, puis dans l'asile de la rue
Boursault ; elle présenta à l'Exposition universelle de 1878 un modèle de
classe Fröbel, qui lui valut une médaille d'argent, et en 1879 elle publia un
programme pour les écoles enfantines avec adaptation de la méthode Fröbel. En
1880, elle obtint l'autorisation d'expérimenter ce programme dans une salle
d'asile publique à Paris (40. rue Madame).
Pour être dans l'esprit même du créateur du jardin
d'enfants, il doit donc être bien entendu que Fröbel a laissé un exemple à
suivre, et non un crédo à répéter ou des procédés à imiter servilement. L'idéal
du jardin d'enfants n'est pas dans le passé, il est dans l'avenir ; et, pour
l'atteindre, il faut non pas copier docilement un modèle, ce qui conduirait à
la routine et paralyserait l'esprit d'initiative, mais travailler d'une façon
toujours plus parfaite sur les idées fécondes dont Fröbel a fait la base de son
système d'éducation. Comme l'a dit Wichard Lange au centenaire de Fröbel : «
Les grandes lignes seules sont tracées ; la pédagogie a le devoir de bâtir
là-dessus ». Henriette-Suzanne Brès
1855
MERCI MONSIEUR PLUCHOT
RépondreSupprimerQUELLE RECHERCHE!
JB Douteau
Musée dep de l'école publique de Chte Mme
17330 VERGNÉ