vendredi 30 octobre 2020

Cahiers de géographie-2

 

La leçon de géographie

(Deuxième partie)

Territoires d’ici ou territoires lointains

La France a une organisation politique et administrative très structurée ébauchée par l’Assemblée Constituante de 1789 qui créa les 83 départements d’origine. L’Empire napoléonien en compta jusqu’à 130 en 1811, qui s’étendaient de l’Elbe au Tibre. On tenta d’appliquer ce modèle à nos colonies qui « n’avaient pas d’organisation politique : l’autorité du chef ne s’imposait pas au-delà de la faible étendue de son pays (..) pas de sécurité : les nègres du Niger étaient pillés par les Touaregs (..) pas de vie économique : l’agriculture était très arriérée », nous leur apportions la civilisation. (La France et ses colonies, Armand Colin, 1925, page 61). 

La France et ses colonies, Cours moyen et Certificat, Armand Colin, 1925


Départements, préfectures, sous-préfectures



Sur la carte des départements (œuvre de la Convention 1792-1795), la France prenait l'allure d'un vaste puzzle, ce qu’elle devint plus tard, dans certains jeux pédagogiques pour les enfants. Une fois encore plane le spectre du Certificat d’études et sa liste fastidieuse des connaissances toujours à mémoriser : la liste des départements, de leur capitale et de leurs sous-préfectures, leur appartenance à telle région.






Les anciens ont conservé longtemps ce savoir qui leur permettait de situer n’importe quelle ville sur le territoire et que les enfants d’aujourd’hui, habitués aux outils numériques, trouveraient ridicule. Ne nous moquons pas trop vite de cette période révolue où les déplacements, uniquement terrestres, dépendaient de la rapidité à lire une carte !








Si quelquefois les questions des examinateurs du « certif » laissaient perplexes : « Citez les préfectures et sous-préfectures des départements français limitrophes de l’Espagne, ainsi que les places fortes protégeant notre frontière du côté de l’Espagne », d’autres relevaient de connaissances ancrées dans l’environnement local : « Dans quel cours d’eau la Bourbince se jette-t-elle ? », la Loire pourrait-on penser ? L’Arroux en réalité. Jacques Gimard, en parlant du Certificat, disait : « Les épreuves montrent que cet examen certifiait un niveau de connaissances acquises, alors qu’aujourd’hui, les examens marquent seulement un niveau d’études », fatale distinction ou heureuse évolution ?





Le temps béni des colonies





Avec la perte de la colonie de Saint-Domingue en 1804, s’éteint le premier empire colonial français (Acadie, Canada, Terre-neuve, Louisiane…). Ce sont donc les conquêtes de Napoléon III et leur consolidation par la Troisième République qui formeront le second empire colonial de la France, tant vanté dans les écoles à partir des lois Ferry.






En cette fin du 19ème siècle, nos colonies représentent le deuxième empire colonial du monde, faisant de la France une des plus grandes puissances mondiales, avec un territoire 22 fois plus grand que sa métropole. De quoi faire rêver les écoliers devant les cartes et les tableaux muraux ou devant les illustrations des manuels de géographie qui présentaient des contrées aussi mystérieuses que lointaines.




Chacun s’imagine alors « homme bleu » des caravanes, chevauchant son chameau dans les vastes étendues désertiques du Sahara ; explorateur pénétrant cette forêt équatoriale africaine peuplée d’oiseaux merveilleux, de boas et de singes ; chasseur de lions dans la savane, entouré d’éléphants et de panthères ; paysan indochinois repiquant du riz dans la boue des rizières ; travailleur antillais récoltant la canne à sucre ou encore, pour les écolières, jeunes filles couronnées de fleurs se prélassant sous les cocotiers tahitiens, quelle chance…






Vision paradisiaque d’une réalité somme toute moins glorieuse si l’on observe la face cachée de la colonisation. Le Tour de la France par deux enfants  ne nous rappelle-t-il pas, page 188 de son édition de 1904, qu’il y a quatre races d’humains : la race blanche, « la plus parfaite des races humaines », la race noire en Afrique, la race jaune en Asie, la race des indiens à peau rouge et que tous ces gens qui peuplent nos colonies travaillent à notre richesse nationale en produisant le thé, le riz, le cacao, le coton, les arachides et tous les produits indispensables à notre vie quotidienne.


Source schoolmouv.fr

Le Tour de France par deux enfants, édition 1904 (collection musée)


Si la leçon de géographie n’enseignait pas le respect et la reconnaissance que nous devions à ces peuples, elle ouvrait malgré tout l’esprit de la jeunesse française profonde, à la curiosité de découvrir le vaste monde qui faisait d’ailleurs l’objet de la dernière partie du programme du Certificat. A nouveau, les candidats devaient savoir que l'Everest était le plus haut sommet du monde, que l'Amazone était le fleuve qui a le plus gros débit, que les chutes du Niagara étaient l'une des plus grandes merveilles du monde, que les Américains habitaient dans de gigantesques gratte-ciel et les esquimaux dans des igloos, que la Chine était limitée par une grande muraille, qu'à Benarès, les malades se baignaient dans le Gange… Surgissaient alors un vocabulaire extraordinaire que les écoliers n’oublieraient plus : lac Titicaca, Popocatepelt, Samarkand, Boukhara, Pondichéry, Chandernagor, Karikal, Yanaon, Mahé…






Quelques révisions pour le « certif »

-       Votre frère, appelé sous les drapeaux, se rend de Lille à Strasbourg par chemin de fer : par quelles villes passe-t-il ?

-       Citez les trois grands ports de la région du Nord. Dites ce que vous savez du port de Dunkerque : son importance. Avec quels pays étrangers il est en relation. (session 1932)

-       Croquis de la région du Nord. Placez un grand port de pêche, un grand port de commerce, une grande ville minière, une grande ville textile, un grand centre agricole. (session 1962)

-       Citez 4 grandes villes du monde. (2 pts)

-       Citez 4 cultures tropicales. (2 pts)

-       Nommez un grand fleuve des Etats-Unis d'Amérique avec son principal affluent. (1 pt) (session 1965)

-       Le sommet le plus élevé des Pyrénées françaises (1/2 point par réponse juste) : quel est son nom ? Quelle est son altitude (tolérance 25 m.) ?

-       Dans quelle mer se jette le Danube ?

-       Quelle était la ville préfecture de la Loire-Inférieure ?

-       Quel est le fleuve dont les eaux arrosent Troyes ?

-       Le point culminant de la France de 1815 à 1860 (1/2 point par réponse juste) : Son nom ? Son altitude (tolérance 25 m.) ? (Réponse : la Barre des Écrins (le pic des Ursines), altitude 4102 m (accepté de 4077 m à 4127 m). Explication : en 1815, la Savoie et le Comté de Nice ont été rendus au royaume de Piémont-Sardaigne. Le Mont Blanc n'est donc plus en France. Le plus haut sommet français devient le Pic des Ursines, dans le massif du Pelvoux en Dauphiné, dans la Barre des Écrins, alors juste découverte.

-       Dans quels pays prennent leur source (1/4 de point par réponse juste) : La Garonne ? La Loire ? Le Rhône ? La Meuse ?

-       Un bateau arrive à Marseille après être passé par le canal de Suez. De quel pays peut-il venir (énumérez en quatre) Choisissez deux de ces pays et indiquez pour chacun d'eux les marchandises que le bateau peut en rapporter et les océans qu'il a traversés avant d'arriver au canal de Suez. (1959)

-       Des pèlerins arrivent de Lille à Lourdes. Quel itinéraire ont-ils probablement suivi par la voie ferrée ? Au-dessus de quels fleuves ont-ils passé ? Citez les productions de deux régions (à votre choix) qu’ils ont traversées. (1928)

-       Quels sont les noms des cinq gares importantes en dehors de Paris ?


Globes (collection musée)


Le Certificat d’études 1930, extraits, 2013, Daniel Berlion, instituteur, inspecteur primaire, inspecteur d’académie adjoint à Mâcon, inspecteur d’académie puis vice-recteur.  

Cahier de Simone en 1941


Cahier de Bernard en 1941


Ce chant fit-il partie des épreuves du certificat en 1942 ?



Et cette récitation ?


Cocardes du Certificat d’études (collection musée)




P.P


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