Meilleurs vœux 2023
Liberté,
égalité, fraternité, laïcité et démocratie
Quand,
au seuil de cette nouvelle année, deux grands hommes nous rappellent que l’éducation
est le seul rempart contre l’obscurantisme… à méditer.
Lettre
de Jean JAURES
Aux
Instituteurs et Institutrices
Vous
tenez en vos mains l’intelligence et l’âme des enfants ; vous êtes responsables
de la patrie. Les enfants qui vous sont confiés n’auront pas seulement à écrire
et à déchiffrer une lettre, à lire une enseigne au coin d’une rue, à faire une
addition et une multiplication. Ils sont Français et ils doivent connaître la
France, sa géographie et son histoire : son corps et son âme. Ils seront
citoyens et ils doivent savoir ce qu’est une démocratie libre, quels droits
leur confère, quels devoirs leur impose la souveraineté de la nation. Enfin ils
seront hommes, et il faut qu’ils aient une idée de l’homme, il faut qu’ils
sachent quelle est la racine de toutes nos misères : l’égoïsme aux formes
multiples ; quel est le principe de notre grandeur : la fierté unie à la
tendresse.
Il
faut qu’ils puissent se représenter à grands traits l’espèce humaine domptant
peu à peu les brutalités de la nature et les brutalités de l’instinct, et
qu’ils démêlent les éléments principaux de cette œuvre extraordinaire qui
s’appelle la civilisation. Il faut leur montrer la grandeur de la pensée ; il
faut leur enseigner le respect et le culte de l’âme en éveillant en eux le
sentiment de l’infini qui est notre joie, et aussi notre force, car c’est par
lui que nous triompherons du mal, de l’obscurité et de la mort.
Eh
quoi ! Tout cela à des enfants ! — Oui, tout cela, si vous ne voulez pas
fabriquer simplement des machines à épeler. Je sais quelles sont les
difficultés de la tâche. Vous gardez vos écoliers peu d’années et ils ne sont
point toujours assidus, surtout à la campagne. Ils oublient l’été le peu qu’ils
ont appris l’hiver. Ils font souvent, au sortir de l’école, des rechutes
profondes d’ignorance et de paresse d’esprit, et je plaindrais ceux d’entre
vous qui ont pour l’éducation des enfants du peuple une grande ambition, si
cette grande ambition ne supposait un grand courage. […]
Sachant
bien lire, l’écolier, qui est très curieux, aurait bien vite, avec sept ou huit
livres choisis, une idée, très générale, il est vrai, mais très haute de
l’histoire de l’espèce humaine, de la structure du monde, de l’histoire propre
de la terre dans le monde, du rôle propre de la France dans l’humanité. Le
maître doit intervenir pour aider ce premier travail de l’esprit ; il n’est pas
nécessaire qu’il dise beaucoup, qu’il fasse de longues leçons ; il suffit que
tous les détails qu’il leur donnera concourent nettement à un tableau
d’ensemble. De ce que l’on sait de l’homme primitif à l’homme d’aujourd’hui,
quelle prodigieuse transformation ! et comme il est aisé à l’instituteur, en
quelques traits, de faire sentir à l’enfant l’effort inouï de la pensée humaine
! […]
Je
dis donc aux maîtres, pour me résumer : lorsque d’une part vous aurez appris
aux enfants à lire à fond, et lorsque d’autre part, en quelques causeries
familières et graves, vous leur aurez parlé des grandes choses qui intéressent
la pensée et la conscience humaine, vous aurez fait sans peine en quelques
années œuvre complète d’éducateurs. Dans chaque intelligence il y aura un
sommet, et, ce jour-là, bien des choses changeront. »
Jean
Jaurès, La Dépêche, journal de la démocratie du midi, 15 janvier 1888
Hommage à Samuel Paty :
Maître Robert Badinter s'adresse aux élèves et aux
professeurs
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