Hommage à Henri Besseige
Montcellien amoureux du Pays Noir
Henri Besseige (1887/1967), en bas, à gauche de cette photo de famille,
comme à son habitude souriant et aimable (collection particulière)
Qui se souvient
encore de l’école de filles de la rue Carnot
Aux origines de Montceau, une seule rue principale
traversait la ville : la rue Centrale, qui allait devenir l’actuelle rue
Carnot, elle était le cœur de la cité minière. Si la première école primaire
publique de garçons avait été construite rue de l’Est (de l’autre côté de la
voie de chemin de fer, à une centaine de mètres) par l’équipe municipale
républicaine du docteur Jeannin, qui avait battu l’équipe Chagot aux élections
de 1878, la construction d’une école des filles avait suivi dans la foulée :
une belle école, identique à la première, presque en face, en « miroir »
comme le soulignait l’architecte.
De mère en fils : l’amour de l’école publique
Madame Besseige (née Pierrette Roy), en fut la
première Directrice dès son ouverture en 1882. Elle fut d’abord chargée de la
classe du Certificat, puis, vers les années 1890, elle prit la classe de Cours
Complémentaire, qui préparait au Brevet Élémentaire et au concours d’entrée à
l’Ecole Normale. Pierrette Besseige exerça ses fonctions jusqu’à son admission
à la retraite en 1911.
C’est dans cette école de filles que naquit Henri
Besseige, le fils de Pierrette, le 19 juin 1887. Sa jeunesse se passa tout
entière dans cette rue Centrale et dans les murs de la grande bâtisse, qu’il
décrit, dans un livre de souvenirs (Au Pays Noir, 1952), comme une « grande maison grise aux multiples
fenêtres, au fronton de laquelle on a gravé, il y a bien longtemps, une
inscription qui tient bon : École communale de filles – 1881 » :
Voir d'autres photographies en annexe (5)
"Neuf
heures. C'est la fin d'une longue journée laborieuse et la veillée s'achève
dans notre grande cuisine. La mémé tricote au coin du feu. (..) Autour de la
longue table rectangulaire baignée par la lueur d'une haute lampe à pétrole, il
y a maman et les deux adjointes que nous avons prises en pension. Mademoiselle
Dauxois, chlorotique et silencieuse, mène une vie effacée. Elle découpe avec
soin, et à tout petit bruit, dans de vieilles couvertures de cahiers,
d'étroites et longues bandes multicolores que les fillettes de la petite classe
tisseront à l'heure du travail manuel. Mademoiselle Rivet, une bouche moqueuse,
des yeux myopes, mais pourtant vifs sous le binocle pédagogique, se montre
aussi expansive que Mademoiselle Dauxois apparaît réservée. Elle mène la classe
du certificat d'études avec décision et belle humeur. La voici qui pouffe en
annotant les rédactions de ses élèves : "Non ! Ces sottes n'en font pas
d'autres ! ". (..)
« L'étude du soir, de cinq à
sept, se passait en petit comité. Maman la réservait à la douzaine d'aspirantes
qui lui paraissaient aptes à réussir au Brevet ou à l'Ecole Normale. J'y étais
admis sans cérémonie. Cela commençait par un exercice scolaire : dictée,
problème ou rédaction. Les problèmes me rebutaient ; mais j'acceptais
volontiers l'épreuve d'orthographe et de composition où, sensiblement plus
jeune, je n'arrivais pas toujours dernier. Pendant la deuxième heure, le
travail était libre. Nous nous rapprochions ; nous nous faisions réciter nos
leçons à voix basse tandis que "La Dame" préparait la classe du
lendemain. (..)
Lorsqu'enfin l'horloge de l'hôtel
de ville laissait tomber sept coups, nous rangions nos affaires. Maman se
levait, recevait et rendait en souriant le bonsoir de ses disciples. Elle
éteignait le gaz, vérifiait le compteur, et nous montions dîner."
(EXTRAIT DE "AU PAYS NOIR", H.BESSEIGE.)
Et
le fils de l’institutrice devint Inspecteur d’Académie
A l’issue de ses études secondaires et du
baccalauréat, Henri Besseige se rend à Paris, en 1905, pour préparer l’École Normale Supérieure
de Saint-Cloud. Il réussit au concours d’entrée et passe alors l’agrégation. Il
commence sa carrière comme professeur de Lycée à Châlons-sur-Marne. Il se marie
le 19 juin 1917 avec Renée Favard. Il devient ensuite le Directeur de l’École
Normale de Lyon. Il terminera finalement sa carrière au Puy, comme Inspecteur
d’Académie. C’est là qu’il prendra sa retraite en 1946. De nombreuses
publications ont marqué sa carrière dans l’Éducation Nationale, notamment des
livres de lecture et d’Histoire (1).
Pendant ses années de retraite,
il continua d’écrire et, en 1952, il publia un premier volume de souvenirs des
années 1890 – 1900 : « Au Pays Noir » (éditions de Haute-Loire,
Le Puy, 1952 ; réédité en 1997 par Le Caractère en Marche éditeur, Génelard, à
l’initiative de l’association « La Mère en Gueule » et commercialisé
par elle). Il continua dans cette voie
en 1958 avec « Bonjour Vieillesse », publié à compte d’auteur,
ouvrage dans lequel il relate sa découverte des Impressionnistes, au Musée du
Luxembourg, pendant ses études à Paris (2).
Henri Besseige termina son œuvre par une biographie
d’Édouard Herriot, « Herriot parmi nous » (éd. Magnard, 1960), «
livre de bonne foi » comme il le disait, où il rend hommage au politique (qu’il
avait connu durant sa carrière) et à l’homme de lettres (3). Henri Besseige est mort à Paris
le 11 janvier 1967, il y a tout juste 50 ans.
Pour l’anecdote, Henri Besseige, toujours fidèle à
la ville qui le vit naître, contribua à la publication de « Montceau a 100
ans » (4) en 1956 (Centenaire de la
commune), en produisant l’extrait suivant de son livre :
(1) :
Quelques exemples de livres scolaires signés Henri Besseige. Ils furent réédités
de nombreuses fois à différentes époques (collection musée) :
(2) :
Quelques ouvrages d’Henri Besseige-écrivain :
(3) :
Couverture du livre « Herriot parmi nous » :
(4) :
Couverture du livre « Montceau a 100 ans » avec sa première dessinée
par « Géo Sargel », pseudonyme d’une autre figure bien connue des
Montcelliens : GEORGES LEGRAS :
(5) :
Photographies de l’école de filles :
P.P
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