Contexte
social et origine des écoles
En
Bassin minier
Troisième partie : l’entre-deux guerres et peu
après
Cours de polonais, école des Gautherets (collection musée)
Quels évènements nouveaux s’étaient
produits après la Grande Guerre ? Ce fut : le déplacement de
l’exploitation minière vers les limites méridionales du Bassin minier
originel ; la création par la Mine, de cités nouvelles, dans cette direction,
et avec des écoles ; enfin, l’accueil qu’elle fit, à partir des années 20,
de mineurs polonais, dont les enfants devaient être enseignés dans leur langue
maternelle, conformément à une convention franco-polonaise, et recevoir ainsi,
à l’école primaire privée, 3 heures de cours en français et 3 heures de cours
en polonais, selon la législation française.
En 1930, parmi les instituteurs et institutrices privés, 47
enseignaient aux écoles de la Mine. Celle-ci, dans ses cités nouvelles, avaient
bâti, vers 1920, des écoles pour garçons et filles aux Baudrats (Sanvignes),
puis, vers 1923, l’école de garçons Sanvignes-Gautherets, et (en contre-bas en
face) l’école de filles de Saint-Vallier-Gautherets, et enfin, vers ces
dates-là, une école à la Saule-Montceau
.
Ecole de garçons de la Mine aux Gautherets (collection musée)
Ces 5 écoles primaires accueillaient la population scolaire
française ou étrangère, habitant aux environs, et précisément, les jeunes
polonais, en des classes, dites : « écoles polonaises », que
dirigeaient, à mi-temps, des moniteurs de leur nationalité, agréés par le
ministre français de l’Instruction publique (enseignant sous l’autorité d’un
maître français). Une classe semblable avait encore été attribuée à ces élèves,
dans une baraque des Georgets (Sanvignes), ou à l’école privée du Magny (Montceau)
ou à la Verrerie de Blanzy, grâce à l’intervention de la Mine[1].
Ecole de filles de la Mine aux Gautherets (collection musée)
Voilà qui portait à 10, en cette année 1930, le nombre des
établissements scolaires primaires, entretenus et surveillés alors, par la
Mine : 7 pour les filles et 3 pour les garçons. Les enfants de toutes
conditions sociales y étaient admis, gratuitement, si leurs parents étaient
employés par la Société minière, moyennant au contraire, une éventuelle
rétribution , s’il en était autrement. Dans le premier cas, ils étaient aussi
appelés à bénéficier d’œuvres sociales, comme celle-ci, fort originale à
l’époque : une colonie de vacances, organisée à Thonon-les-Bains
(Haute-Savoie) !
L’école privée de filles, avenue de l’Hôpital, paraissait la
plus importante par le nombre de ses institutrices titulaires et par son Cours Complémentaire qui permettait aux élèves des écoles privées de
préparer le brevet élémentaire. Dans la deuxième décennie du siècle tout au
moins, quelques élèves douées y préparèrent le brevet supérieur, et l’ayant
obtenu furent heureuses d’y ajouter, grâce à l’intervention sollicitée de
l’Inspecteur primaire, le certificat d’aptitudes pédagogiques, facultatif pour
elles, mais leur permettant d’augmenter un trop modeste traitement[2].
Selon le vœu de la direction de la Mine, les maîtres et les
maîtresses, rétribués par elle, devaient donner un enseignement laïc, conforme
aux programmes officiels ou aux livres d’école qui correspondaient à ceux-ci.
Adjoints et adjointes étaient toutefois amenés à réagir, parfois, contre l’autoritarisme
de tel directeur ou telle directrice, qui usait de ses prérogatives. Les
rapports de ces directeurs ou directrices pour la direction de la Mine,
relatifs aux activités professionnelles de leurs subordonnés, constituaient à
peu près les seuls liens entre ceux-ci et l’ingénieur responsable des écoles,
où on ne le voyait guère faire que de bien courtes visites[3].
Toujours en 1930, poursuivant leurs buts propres, les deux
écoles confessionnelles recevaient des enfants de familles catholiques, dans leurs
classes primaires de Montceau, dirigées, aux Oiseaux (rue de Moulins) par 4
instituteurs et 7 institutrices, et, à Bellevue, par 5 institutrices qui
accueillaient aussi les hôtes de l’orphelinat de Saint-Vallier-Bellevue[4].
(collection musée)
L’école publique, parallèlement, continuait d’occuper
nettement la plus large place dans le Bassin minier, comme a permis de le
supposer l’effectif déjà précisé de son personnel, proportionnel à celui de ses
élèves. Ainsi, pour être encore plus
efficace et respectée, les exigences qu’elle avait pour elle-même ne
contredisait pas son esprit de tolérance laïque. Aucun maître de l’école
publique ne devait, après un délai court, continuer d’enseigner si, à la tête
de sa classe, il ne pouvait obtenir le Certificat d’Aptitudes Pédagogiques, et,
s’il avait à surmonter d’imprévues difficultés, il subissait de ce fait, de pénibles incertitudes.
Dans le quartier montcellien du Bois-du-Verne, aucune
« école polonaise » n’est recensée officiellement bien qu’il existe deux photographies prises
par les autorités polonaises sur lesquelles figurent 2 classes de filles dont
le maître est M. Lubowicz et identifiées « Cours dans une école polonaise
Bois-du-Verne (district de Lyon) »[5].
« Cours dans une école polonaise Bois-du-Verne (district de Lyon) », 1932, l'instituteur est Monsieur LUBOWICZ (galeria.notrepolonia.com)
A l’école publique de garçons de ce quartier, les petits
Polonais affluaient avec les petits Français, plus nombreux que leurs camarades,
de cinq à dix autres nationalités recensées. Quel fut l’émoi de ce jeune
instituteur, presque frais émoulu de l’Ecole Normale, quand vint à lui échoir
la 10e des classes de 40 élèves : un cours préparatoire de
redoublants, fils d’étrangers, attardés le plus souvent d’un an. Quelle mise à
l’épreuve de la pédagogie active à laquelle il voulait croire ! Enfin,
après 6 mois d’efforts raisonnés, quelle confiance apparaissait chez ses jeunes
disciples souriants, et chez lui-même… Tous ses petits ou presque, avaient
appris les éléments indispensables de la langue française et de la lecture…
c’était en 1933[6]…
Registre matricule de l’école polonaise de filles des Gautherets, ouvert par l’Inspecteur Chlique en 1924 (cliché D. Busseuil)
Registre matricule de l’école polonaise de filles des Gautherets, liste des employées de la Mine (cliché D. Busseuil)
Vers une nationalisation forcée des
écoles de la Mine
Dès ses débuts, le gouvernement de la Quatrième République
(1944-1958) décida la nationalisation des Houillères (1944)[7] puis commença celle de leurs écoles.
Cette dernière mesure ne devint effective, pour le département de
Saône-et-Loire, que le 1er octobre 1947. Dans le Bassin minier, elle
ne concerna que les écoles de la Société des Mines de Blanzy et non les écoles
confessionnelles indépendantes de celle-ci[8]. Quant aux cours donnés en langue
polonaise, les élèves, encore intéressés par eux, ne purent désormais les
suivre que les jeudis, jours de congés
hebdomadaires, ou après leurs classes d’enseignement primaire français.
Registre matricule de l’école polonaise de filles des Gautherets devenu école publique de filles en 1947, liste des maîtresses nommées cette même année en remplcement du personnel de la Mine (cliché D. Busseuil)
Les instituteurs et institutrices privés furent accueillis
par l’Inspecteur d’Académie afin d’être « intégrés
dans les cadres de l’enseignement public », sous réserve de remplir « les conditions exigées par la
loi » : posséder le titre de capacité, le Brevet Elémentaire ou
même le Brevet Supérieur, ce fut le cas de 19 titulaires et de 17 stagiaires[9].
Avoir le Certificat d’Aptitudes Pédagogiques ou bien l’obtenir en dirigeant une classe, dans un délai accordé
de 3 ans ne fut le cas que de peu des maîtres ou des maîtresses concernés.
Parmi les institutrices, par exemple, seules les plus jeunes y parvinrent[10]. Certaines institutrices avaient
refusé d’entrer dans l’enseignement public, mais d’autres, comme les
instituteurs privés, avaient dû, pour un certain nombre d’entre elles et
d’entre eux, avoir le C.A.P. en définitive, et la certitude, après le vif
espoir, de demeurer des enseignants, en touchant un traitement presque doublé[11] (sans chiffrer toutefois les
avantages accordés naguère par l’ancienne Société des Mines : chauffage et
soins médicaux gratuits, indemnité de logement…). Enfin sauf exception, ils
allaient donner l’impression de se trouver satisfaits parmi de nouveaux
collègues, que l’Inspecteur d’Académie A. Coche, leur avait annoncé comme « la grande famille
universitaire »[12].
Ecole ménagère de Montceau, années 30 ? (collection privée)
Existant dans le cadre des activités sociales de la Mine,
l’Ecole ménagère, ouverte aux filles après leur scolarité obligatoire, n’avait
pas été englobée dans la nationalisation des écoles primaires, mais la seule
école technique de la Mine l’avait été. Fort importante, celle-ci était le
Centre d’Education professionnelle pour la Formation de jeunes Mineurs, que les
procédés nouveaux d’extraction du charbon avaient conduit l’entreprise, encore
privée, à créer en 1943. Une ordonnance de 1945 obligea chaque houillère
nationalisée à avoir un tel Centre, et celui-ci, pour la Saône-et-Loire, était
rattaché au secrétariat de l’Inspection départementale de l’Enseignement technique qui était un service annexe de
l’Inspection académique[13]. Longtemps après la nationalisation,
l’expression populaire parla de cet établissement comme d’une « école de
la Mine », ce qu’elle n’était plus.
Ancienne école de garçons de la Mine dite « de la 9e Ecluse », base du nouveau Centre d’Education professionnelle (collection musée)
Installé au lieu-dit « la 9e Ecluse du Canal
du Centre », logé d’abord dans un baraquement, le Centre de Montceau
occupa enfin un bâtiment que l’on construisit sur la base de l’ancienne école
de la Mine, réaménagée, rehaussée d’un 2e étage aux ailes et d’un 3e
étage au milieu. Il fut bâti dans un style austère, caractéristique des années
de son édification, de 1946 à 1948, « avec
ses arêtes droites, substituées, par exemple, aux arcs des anciennes
fenêtres »[14]. Fonctionnels et spacieux, les
locaux permettaient de faire face aux besoins accrus de main-d’œuvre mieux
exercée. Il comprenait des salles de cours, pour un enseignement général[15] ou technologique et des ateliers :
avec forge, menuiserie, galerie de mine reconstituée, stade…
Le bâtiment originel avait été construit en 1865 pour les mines de Blanzy, comme école pour les frères de la communauté chrétienne qui logeaient, ainsi que les sœurs, dans un bâtiment proche existant déjà, côté quai Jules Chagot. Derrière, on trouvait les bâtiments de la gendarmerie à cheval, dont les dépendances et les écuries étaient adossées à l’avenue des Alouettes. Après la Grande Guerre, l’école des frères fut transformée en école ménagère réservée aux filles du personnel de la Mine et les dépendances rénovées devinrent gymnase pour la société « L’Espérance ». Durant la Seconde Guerre mondiale, l’école ménagère fut occupée par les troupes allemandes et fut transférée dans un autre bâtiment appartenant à la Mine, rue du Bois (proche de l’actuel collège Jean Moulin).
Le nouveau Centre d’Education professionnelle construit sur la base de l’ancienne école (collection musée)
La Seconde Guerre Mondiale terminée, le gouvernement de la
Quatrième République avait donc donné l’ordre de gagner « la bataille du
charbon », c’est-à-dire d’en augmenter sensiblement l’extraction. Aussi,
en 1945, les Houillères du Bassin de Blanzy furent amenées à employer environ
12 000 personnes, et, en complément d’une main-d’œuvre française augmentée
et d’une main-d’œuvre polonaise diminuée par certains rapatriements, elles
durent recourir à d’autres étrangers : des Italiens ou des Portugais, puis
des Allemands même, ex-prisonniers de guerre[16]… Les Houillères exigeaient que cette
main-d’œuvre soit efficace et la mettait à l’épreuve dans la carrière Saint-François
(Montceau). De plus, elle la préférait instruite. Aussi, entre 1947 et 1953,
son Centre d’Education Professionnelle reçut jusqu’à 700 apprentis mineurs
différents au cours d’une même année[17].
Ces adolescents, souvent fils de mineurs et âgés au moins de
14 à 17 ans, étaient embauchés à la Mine, afin d’y travailler en surface
seulement, selon les lois sociales, jusqu’à l’âge de 16 ans. Ils étaient
libérés, de temps en temps, de leurs activités professionnelles, « au
jour » ou « au fond », pour venir au Centre s’initier ou
compléter leur initiation au métier de mineur. Après avoir subi des tests, ils
se retrouvaient répartis en sections de 100 à 150 individus, de niveau voisin,
qui recevaient un enseignement, alternativement, un jour par semaine (semaine
qui comprenait alors 6 jours de travail). Au bout de 3 ou 4 années
d’instruction, le Certificat d’Aptitude
Professionnelle (C.A.P.) du mineur sanctionnait le succès de
l’apprentissage, pour le bon ouvrier[18].
Le Centre d’Education professionnelle, au deuxième plan : le puits des Alouettes (colection musée)
A la fin des années 50, la diminution du nombre des élèves du
Centre d’Education Professionnelle commença, tandis que l’effectif des
personnes employées aux Houillères du Bassin de Blanzy en 1957, s’abaissait aux
environs de 8 000[19]. Autour de cette même année, d’autre
part, un Certificat d’Aptitudes Professionnelles ayant été créé pour les
électromécaniciens de mine de houille, le Centre, selon les besoins des
Houillères de Montceau, prépara annuellement de 10 à 15 apprentis, capables de
se spécialiser dans les questions d’électricité et de mécanique dont la
connaissance était exigée pour l’obtention du diplôme[20].
Bientôt, une « Ecole de Maîtrise » fut créée au
Centre, selon les instructions reçues par ce dernier, afin de former des chefs
de postes et des chefs d’ateliers qui auraient la possibilité de compléter leur
savoir à l’« Ecole Supérieure de Maîtrise » de Saint-Etienne, ouverte pour
le groupement des « Houillères de Bassin Centre-Midi », (groupement
créé le 1er janvier 1969[21]).
Ecole supérieure de Maîtrise de saint-Etienne (picclick)
Qui plus est, pendant une période seulement, alors que le
Baccalauréat n’était pas exigé avec ses deux parties, le Centre d’Education
Professionnelle de Montceau sut instruire particulièrement quelques uns de ses meilleurs élèves, en
mathématiques, sciences physiques et chimiques et autres, de manière à les
élever vers le niveau du Baccalauréat C et du concours d’entrée à une école
technique réputée de Douai (département du Nord).
1954 École des Mines de Douai (picclick)
Celle-ci, destinée d’abord, dans la région minière du Nord, à
former les porions, c’est-à-dire des chefs de postes[22], puis des chefs porions,
c’est-à-dire des maîtres-mineurs, avait perfectionné son enseignement, jusqu’à
devenir une Ecole d’Ingénieurs des Mines. Ce fut, du reste, avec ce titre
d’Ingénieur des Mines, qu’une douzaine, au moins d’élèves, venus du Centre de
Montceau, en sortirent après y avoir suivi 4 années de cours[23]. Des fils de mineurs, par exemple,
avaient pu terminer ainsi avec succès leurs études d’ingénieurs, grâce à la bourse
que leur avait accordée la direction des Houillères du Bassin de Blanzy, sous
la condition d’avoir contracté l’engagement de travailler 10 années à leur
service[24]. Ici se termine cette étude sur le
Centre montcellien, aux années 60[25].
Rendue disponible par la nationalisation des écoles des
Houillères le 1er octobre 1947, leur école de filles de l’avenue de
l’Hôpital, à Montceau, fut de suite occupée par le Cours Complémentaire de
Montceau. Il fut désormais séparé de l’Ecole primaire publique de filles de la
rue Carnot, rue principale de la ville. Il commença la croissance
« spectaculaire » d’un établissement, de plus en plus destiné au
second degré, bientôt transformé en Collège d’Enseignement Général (sans doute
en 1960, à l’entrée en vigueur de la réforme Berthoin) et, après l’adjonction
de vastes locaux, bâtis à l’emplacement du hameau du « Montceau », il
devint, en octobre 1970, le « collège Saint-Ex » du nom du célèbre
écrivain aviateur. Il deviendra un « collège unique » à la suite de
la loi Haby de 1975.
1-Ancienne école de filles de la Mine devenue cours complémentaire
Cette évocation de la naissance du collège Saint-Exupéry ne
serait pas complète sans rappeler le souvenir d’une grande figure locale et
nationale du syndicalisme enseignant, celle de Jeanne Lordon. De 1957 à avril
1960, elle dirigea le cours complémentaire de filles, avenue de l’Hôpital, tout
en enseignant le français et la morale en classe de 3e. Elle
assurait, parallèlement, la préparation des élèves au concours d’entrée à
l’Ecole Normale de Mâcon. A partir de 1958, elle conserva la direction du seul
cours complémentaire qui devint C.E.G (Collège d’Enseignement Général) avant de
prendre le nom de collège Saint-Exupéry.
Jeanne Claudia Lordon avec ses élèves, lors de son départ en retraite (collection musée)
Qu’était devenue l’Ecole Primaire Supérieure de garçons,
compte tenu des promesses de ses modestes débuts ? Au début du 20e
siècle, après une période de déclin, elle avait bénéficié d’un climat politique
plus propice, né des grèves de 1899 et 1901 et de l’élection en 1900 d’une
municipalité montcellienne socialiste qui accorda la gratuité des fournitures
scolaires. Les enfants d’ouvriers prirent mieux le chemin de l’Ecole Primaire
Supérieure. Puis, les progrès, déjà signalés, qu’elle réalisa dans ses
enseignements, général et technique, la favorisèrent. En 1912, elle reçut 241
élèves, dont près de la moitié en sa 1ère année, signe encourageant.
Mais la Grande Guerre finit par la remettre en difficulté, notamment à cause de
la mobilisation de ses maîtres, dont le directeur et deux professeurs moururent
aux combats[26].
(collection musée)
Dans l’après-guerre, la vie reprit avec des exigences
techniques accrues ; aussi, en 1923, la section industrielle de l’Ecole
Primaire Supérieure fut transformée en Ecole Pratique de Commerce et
d’Industrie, elle-même rattachée à la Direction de l’Enseignement technique. Ce
groupe de sections permettait à des élèves d’obtenir les Brevets d’Enseignement
industriel ou commercial et le Certificat d’Aptitude professionnelle, afin de
pouvoir se placer immédiatement, dès la sortie de l’école, à l’atelier ou au
magasin. Quant à la section générale, elle préparait des élèves au Brevet
Elémentaire ou bien au concours d’entrée à l’Ecole Normale d’Instituteurs,
comme à ceux de diverses administrations.
(collection musée)
La section commerciale fut heureusement géminée en 1930. La
Deuxième Guerre Mondiale fit échouer un projet de construction pour 550 élèves.
Mais la promesse, pour l’école, d’une transformation radicale de sa structure
fut envisagée. Cette réalisation avait été inspirée par l’idée pédagogique
ambitieuse qu’avait conçue Jean Zay, ministre radical du Front Populaire
(1936-1938). Il avait projeté d’élever le niveau des études et de les
généraliser, grâce à « une école
moyenne, classique, moderne et technique »[27]. Or, le Régime de Vichy (1940-1944),
dangereusement oppressif, devait emprisonner à la maison d’arrêt de Riom, puis
laisser assassiner par la « Milice française », le généreux novateur,
mort pour son idéal d’une France républicaine et laïque[28]. La restructuration de l’E.P.S. de
Montceau n’eut pas lieu…
(collection musée)
Depuis septembre 1940, sous prétexte d’appliquer un projet de
réforme qu’il empruntait à Jean Zay, le ministre de l’Instruction Publique,
Jacques Chevalier, exigeait des instituteurs le baccalauréat et transformait
les seules Ecoles Normales qu’il ne fermait pas, en instituts de formation
professionnelle, tout en combattant l’esprit laïc dans l’école primaire
publique[29]. Mais son successeur n’eut pas son
cléricalisme exacerbé : autre ministre du maréchal Pétain, l’universitaire
Jérôme Carcopino, par sa loi du 15 août 1941, tendait à réaliser, sans détour,
notamment une idée de Jean Zay : intégrer les Ecoles Primaires Supérieures
au second degré en les dénommant « Collèges Modernes ». Ceux-ci
devaient avoir, à l’avenir, des sections classiques comme les lycées, mais pas,
selon cette loi du moins, de classes terminales[30]. En conclusion de cette période
trouble, on notera qu’à la libération, Carcopino sera révoqué de ses fonctions,
emprisonné à Fresne mais bénéficiera d’un non-lieu contesté, ce qui ne
l’empêchera pas de faire une apologie systématique et documentée à l’extrême du
pétinisme en général, dans ses mémoires… Chevalier, son prédécesseur, sera
condamné à vingt ans de travaux forcés et son successeur, Abel Bonnard, sera
condamné à mort par contumace.
(collection musée)
Cependant, en 1942, l’Ecole Primaire Supérieure de Montceau
fut désignée comme Collège moderne, appellation bientôt complétée par le
qualificatif « tehnique » d’où l’expression « Collège
technique ». De plus, la guerre conduisit à ajouter discrètement, une
section de formation professionnelle qui allait devenir plus tard, un Centre
d’apprentissage annexé officieusement au Collège technique… On y dissimula, du
moins au début, des justiciables de la déportation du travail, selon l’auteur
anonyme et bien informé semble-t-il, que résume ce texte. Il précise que,
d’abord, les nouvelles dénomminations de Collège moderne et Collège technique
ne changèrent pratiquement rien[31].
Toujours est-il qu’en 1945, le Collège moderne ouvrait une
section classique en classe de 6e, une classe de seconde pour amorcer
le second cycle et, « devenu
établissement secondaire de plein exercice, sortait en 1948, sa première
promotion de bacheliers 2e partie »[32]. En 1948, au
collège technique, une correspondance fut établie entre ses classes et celles
des établissements du second degré. Déjà les connaissances théoriques exigées
depuis 2 ans, permettaient aux candidats aux Brevets d’enseignement
professionnel, quand ils étaient capables de « poursuivre » jusqu’au
Baccalauréat technique, après ce Collège, de ne pas faire si mauvaise figure
auprès de leurs camarades des lycées[33].
Hôtel de ville et E.P.S. (collection musée)
Ces sections du Collège, dès leur naissance, avaient été
favorables à l’élévation du niveau des études. Les Brevets restaient : le
Brevet d’enseignement industriel (B.E.I) et le Brevet commercial
(B.E.C) ; il s’y ajoutait, accessoirement, les divers Certificats
d’aptitude professionnelles (C.A.P), tous diplômes auxquels préparaient les sections
industrielles garçons et la section commerciale mixte du Collège moderne et
technique. Cette dernière section préparait même à des brevets spécialisés du 2nd
degré. Et, pour ces élèves, en cette période de crise alarmante de main d’œuvre
qualifiée, le Collège de Montceau, par exemple, recevait plus d’offres
d’emplois qu’il ne pouvait en satisfaire ! De particulières demandes
d’ouvriers et d’employés étaient faites par les Houillères du Bassin de Blanzy,
par d’autres industries ou les plus divers patrons[34].
(collection musée)
En 1947, pour le Collège, le Conseil
municipal de Montceau et son Maire, le Docteur Mazuez, proposèrent qu’un
immeuble adéquat fut bâti sur le terrain qu’ils avaient choisi, et qui,
agrandi, finit par convenir au Ministre. La vieille école était beaucoup gênée
dans son développement par la vétusté de ses locaux comme par celle du matériel
d’enseignement industriel, ainsi que par l’inévitable exiguïté de tout
l’établissement, occupé depuis 1886, place de l’Hôtel de Ville, sur terrain
mouvant. Ainsi, le Collège fut transféré sur le plateau de Bel-Air, dominant
l’étang du Plessis, à l’emplacement de l’ancien tissage de la Mine. Il
s’installait dans une vaste construction moderne aux lignes sobrement
élégantes, laquelle était bien aménagée avec « ses nombreuses salles d’études, pleinement éclairées, ses vastes
amphithéâtres, ses ateliers modernement équipés »[35].
Usine de tissage de Bel-Air (collection privée)
(Fonds Gillot)
La première pierre fut posée le 8 juin 1952 et la première
rentrée s’effectua en octobre 1955. Le nouveau collège « moderne et
technique » intègra désormais la section industrielle féminine de la
section professionnelle du cours complémentaire de filles de l’avenue de
l’Hôpital. L’inauguration offcielle eut lieu le 24 juin 1956, en présence du
ministre Billères et, le 1er août 1957, l’établissement obtient le
classement de « Collège National Technique et Moderne ». Il reçut
déjà, depuis 1956, 1 000 élèves de premier et deuxième cycle général, de
second cycle technique et un centre d’apprentissage[36].
Inauguration le 24 juin 1956
(sources lyceehenriparriat.fr)
Le Collège allait devenir, en 1960, le Lycée classique et
technique[37] qui prétendait encore concilier le
développement d’un enseignement secondaire et d’un enseignement technique. En
l’année scolaire 1955-1956, le Collège se divisait encore en Collège classique
et moderne, en Collège technique et en Centre d’apprentissage, mais depuis la
guerre, les services d’orientation professionnelle[38]établissaient au mieux, une
communication entre ces groupes[39]. En 1956, il venait d’accueillir « la section féminine de couture et
d’enseignement ménager que le Cours complémentaire de Jeunes Filles avait
formée »[40]. Il était
d’ailleurs devenu complètement mixte depuis la seconde Guerre mondiale[41].
En 1956, ses spécialités enseignées dans les sections
industrielles et la section commerciale étaient plus nombreuses que jamais, et
sans doute la base de culture professionnelle, plus solide, au bénéfice des
futurs ouvriers ou employés qualifiés, et peut-être de futurs cadres moyens de
l’industrie et du commerce. Selon les programmes des groupes classiques et
modernes ou bien techniques, la culture générale donnée à de bons élèves,
permettait de les orienter vers des écoles de haut niveau, après l’obtention
par eux du Baccalauréat. Le Collège ne renonçait pas à la tradition de
présenter de bons élèves plus jeunes à l’examen du B.E.P.C et du Concours d’entrée
à l’Ecole Normale d’Instituteurs (ajoutons, sans doute, désormais aussi à
l’Ecole Normale d’Institutrices), les deux écoles ayant été rouvertes, à Mâcon,
à la Libération, et rénovées depuis, dans une certaine mesure[42].
Promotions 1956-1960 de l’Ecole Normale de Mâcon, garçons et filles (collection musée)
En 1956, le collège moderne et technique de Montceau recevait
donc près de 1 000 élèves, dirigés par une jeune et solide équipe de
professeurs entraînés. Mieux que jamais, le Collège de Montceau attirait à lui
une nombreuse population scolaire et asseyait bien mieux sa notoriété que sa
devancière, l’Ecole Primaire Supérieure. Celle-ci déjà, cependant, s’était
ouverte gratuitement (sauf exception parfois, peut-être, pour les fournitures),
aux enfants de toutes les classes sociales. Mais les enfants du peuple, en ce
temps-là, entraient souvent au travail dès la fin de leur scolarité
obligatoire, à 13 ans, ou s’il avaient obtenu le Certificat d’études primaires,
à 12 ans.
Or en 1926, 6 candidats présentés par l’Ecole Primaire
Supérieure au concours d’entrée à l’Ecole Normale d’Instituteurs de Mâcon, tous
reçus, étaient d’assez modestes origines familiales : tous fils d’ouvriers
ou d’ouvrières, à l’exception d’un fils de directeur d’école primaire publique,
toutefois non fortuné. Ils étaient originaires de Montceau(1), de Blanzy (3),
et des alentours : Pouilloux (1), Ecuisses (1). Est-ce parce qu’il était
d’assez humble condition que l’un d’entre eux, Henri Parriat, devait rester fidèle
à ses racines, bien qu’il fût admirablement travailleur et doué pour les
études ?
Un ancien élève de l’E.P.S. passé à la postérité
Admis 1er
au concours de l’Ecole Normale, il demeura, durant 3 années, à un
trimestre près, le major de sa promotion. N’ayant pas prolongé sa scolarité de
brillant élève, et n’ayant pas obtenu d’autre diplôme que le Brevet Supérieur,
titre de capacité exigé alors de l’instituteur, il en exerça les fonctions 2
ans, avant de venir enseigner au cours préparatoire de l’Ecole Primaire
Supérieure, son école d’origine, où l’avait appelé son ancien professeur,
devenu directeur, Monsieur Bonnot. Avec les seules nominations d’instituteur
délégué en cette école (1937), puis de chargé d’enseignement (1939), il
continua d’y exercer ses nouvelles fonctions, en enseignant dans les classes
élevées, avec toute la compétence requise, l’histoire naturelle, la chimie
notamment, alors que la « vieille » E.P.S était transformée en
Collège, en 1942, devenu Lycée en 1960.
Bulletin de l’amicale des Anciens Elèves de l’E.P.S et du Lycée de Montceau-les-Mines, 1976-1977, extrait (collection musée)
Surtout capable de penser par lui-même, en autodidacte
accompli, de son arrivée à l’Ecole Primaire Supérieure en 1932, jusqu’à son
départ du Lycée pour la retraite en 1967, c’est-à-dire pendant 35 ans, il forma
à Montceau « des générations
d’élèves qui ont conservé de lui un souvenir inoubliable » selon
l’expression très juste publiée au lendemain de sa mort, dans l’article d’un
journaliste ému, qui l’avait sans doute bien connu et apprécié[43]. Combien se serait-il encore rendu
utile s’il avait survécu à l’âge de 65 ans !
Il avait acquis une réputation justifiée de savant-chercheur,
soit qu’il ait été à ses heures, historien, iconographe, botaniste spécialisé
dans l’étude des mousses, cumulant encore de nombreuses autres recherches, soit
que par générosité pour ses élèves et par souci de les former sur le terrain,
il fut devenu archéologue, tantôt de la préhistoire, tantôt de la Gaule
Romaine, tantôt de la Gaule Mérovingienne. Il honora son école de ses travaux
et de son dévouement à la cause de l’enseignement public. Pouvait-on faire plus
judicieuse proposition que celle de donner au Lycée de Montceau le nom de Henri
Parriat[44] ?
Bulletin de l’amicale des Anciens Elèves de l’E.P.S et du Lycée de Montceau-les-Mines, 1967-1968, extrait, nomination d’Henri Parriat au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur (collection musée)
Conclusion
Pour terminer cette étude sommaire sur les origines des
écoles du Bassin minier de Blanzy replacées dans leur contexte social, nous ne
dépasserons pas la date anniversaire de la création de Montceau : 1956, le
Centenaire, et la période charnière qui s’en suivit. Depuis le début des années
1960 environ, l’afflux des élèves, « ébranlant les cadres anciens », dans les
établissements scolaires, produisit des
changements profonds qui concernèrent directement le nouveau siècle, jusqu’à
notre époque contemporaine[45]. En effet, l’enseignement primaire,
après le temps des certitudes (1881-1923) qui appliqua sans états d’âme la
vision républicaine des fondateurs de la Troisième République, et le temps des
recherches (1923-1960) où la Grande Guerre avait bouleversé les mentalités,
arriva le temps des inquiétudes mais aussi celui des innovations et des
mutations (1960- ?), objet d’un autre cas d’étude.
Fonds Gillot (collection musée)
Aux années considérées, ces pourcentages de conscrits illettrés
conduisent à une évaluation assez sûre de l’alphabétisation d’une partie de la
population française. Quant à l’ensemble de cette population, on peut dire
qu’elle fut illettrée selon des pourcentages d’analphabètes bien plus
importants. Ces pourcentages nous restent inconnus, malgré l’étude de
signatures, lesquelles ne prouvent pas qu’on savait lire et écrire. Bien
qu’elle paraisse ainsi incomplète, la statistique nous permet de constater la
victoire remportée sur l’ignorance et l’évolution croissante de l’alphabétisme en
France, en particulier depuis 1880 et dans la trentaine d’années où commença
l’école publique laïque[46].
Victoire inachevée cependant car, encore dans les années
1980, selon un test proposé par l’U.N.E.S.C.O., il apparut que « 10 % au
moins » des jeunes français, appelés au service militaire, savaient à
peine lire. Pourquoi ? Echec de l’école dira-t-on déjà volontiers, quand
d’autres voix s’élevèrent pour alerter : « Echec dû à un environnement extra scolaire, quand la radio
diffusion, la télévision et le téléphone se substituent à la lecture ou à
l’écriture, pour certains jeunes, au point qu’ils deviennent inaptes à
assimiler ces deux matières essentielles d’enseignement pour les utiliser
au-delà de leur scolarité. »[47] D’où l’illétrisme d’une importante
minorité des gens. Les enquêtes concluent déjà que l’ignorance de cette minorité
a pu dépendre de la situation sociale et d’une présence hebdomadaire devant le
petit écran de télévision « abusive », au demeurant plus
longue chez les plus humbles que chez les plus aisés…
Dans le Bassin minier, il semble bien que pour l’ensemble, sinon pour la totalité de la population scolaire, la diffusion accrue de l’instruction primaire avait très nettement dépassé le stade de l’alphabétisation. Comme nous l’avons souligné, sous le Second Empire (1852-1870), le nombre de conscrits illétrés fut, à Montceau comme au Creusot, 4 fois moindre que dans les cantons ruraux, sans doute grâce aux écoles patronales. Cependant, en Saône-et-Loire, au début du 20e siècle, l’analphabétisme n’a pas complétement disparu chez les conscrits, comme le met au grand jour la loi de 1910 établissant un examen annuel de leur instruction primaire[48]. Comme le rappelle un rapport établi en 1913, par M. l’Inspecteur d’Académie de Mâcon, le nombre de ces illétrés s’élevait à « une quinzaine par circonscription d’inspection primaire », et, selon les instituteurs consultés, il s’agissait « d’anormaux » qui n’avaient « pu profiter de l’enseignement reçu à l’école » ou « de jeunes domestiques venus de régions arrièrées et qu’un faux amour-propre » tenait « éloignés des cours d’adultes ». Non pas que l’école publique se fut désintéressée de ces illétrés, même anormaux[49] ! Il faudra cependant attendre l’après Grande Guerre pour que la conception de l’aide aux enfants déficients évolue et que les maîtres spécialisés soient formés différemment[50].
(collection musée)
En tout cas, la fréquentation scolaire étant considérée par
M. l’Inspecteur Sarthou, comme essentielle à ce sujet, il signalait qu’elle
était « bonne » dans les villes du département, si, toutefois, elle
n’était qu’« à peu près bonne » dans le Charolais, et encore
insuffisante dans le Morvan… Alors qu’il avait une haute idée de l’école
laïque, et un rôle persuasif auprès des parents[51], on peut croire que l’Instruction
n’avait nullement démérité à ce sujet, et qu’elle devait continuer de mériter
cette confiance, au 20e siècle, dans le Bassin minier, où elle
allait avoir une importance essentielle. De plus, la loi sur les allocations
familiales, votée en 1939, allait, si elle était utilisée à bon escient,
pouvoir empêcher l’absentéisme à l’école. Alors, pour les Français recensés
(sans doute les conscrits), le taux des illétrés qui était de 6,20 % en 1939,
tomba à 3,4 % en 1951[52].
Léonard Arnoux, paysan-mineur pauvre dans sa maison à Sanvignes, cliché non daté (vers 1880 ?), présenté en contre-exemple par la Compagnie des mines de Blanzy dans son album pour l’Exposition universelle de 1889, dans lequel elle vante les constructions modernes de ses cités ouvrières.
Que penser enfin de la disparition progressive du patois
parlé dans le Bassin minier, jusqu’après les années 1950 ? On peut croire
qu’il était très répandu en 1901, malgré les sanctions prises à l’école contre
les réfractaires. Ce qui semble l’attester, ce fut le refus d’émigrer de 450
ouvriers, renvoyés de la Mine à cette date[53]. Selon un auteur : « La plupart préfèrent rester à
Montceau et végéter dans des conditions misérables » à cause d’un
amour profond de leur « pays noir », celui de leur enfance[54]. Mais le charme de vivre dans une
ville, alors fort polluée au demeurant, ne pouvait suffire pour y maintenir un
gagne-petit. Rapportons nous en plutôt à un autre auteur plus réaliste :
« Il fallait quitter Montceau et
surmonter les difficultés du patois et de l’accent du terroir ! ». Admettons
donc le handicap que représentait les particularités du « parler »
montcellien pour la réinsertion des gens du pays en ce début de 20e
siècle[55].
Emprunts et accointances du montcellien (JPV, Dict., 1997). Illustration J.-P. V. (CLP)
Que l’on ait craint, en s’expatriant en France, de paraître
ridicule par son parler, rien d’étonnant à cela : le patois montcellien
était le fruit d’une grossière déformation du français et d’un curieux mélange
d’autres patois véhiculés par des campagnards venus d’autres contrées pour
grossir les rangs des mineurs locaux. Cela restait un défi pour l’instituteur
des années 1930, qui avait appris à connaître ce langage, comme enfant du
peuple qu’il avait été, bien que devenu insensible au pittoresque de son
vocabulaire et de sa prononciation. Il rencontrait, dorénavant et à cause de lui,
des difficultés à enseigner la langue française ! Ce fut un lent processus
que d’imposer la langue française à tous. Depuis le retour des Républicains en
1870, en passant par les lois Ferry, le provincial « patoisant »
était devenu un indigène dans la République, une sorte de
« colonisé », sans commun rapport avec nos territoires conquis,
évidemment, puisque tout de même citoyen à part entière. L’école obligatoire
imposa de désapprendre le patois au profit du français, à coup de bonnets d’âne !
Quand le patois était inscrit dans la tradition : sa majesté Dévidaire 1er et la cavalcade du Comité permanent des fêtes de Montceau, présidé par le Docteur Laroche virent le jour en 1924 et perdurèrent jusqu’en 1936, mais ne survécurent pas à la Seconde guerre.
Le patois montcellien déclina inéxorablement durant la
deuxième moitié du 20e siècle, jusqu’à disparaître ou n’être plus
parlé ou compris que par quelques vieilles personnes, quelques nostalgiques ou
quelques amoureux du patrimoine culturel immatériel*. N’a-t-on pas ici la preuve de la diffusion accrue de
l’instruction primaire ? L’influence de l’école maternelle sur l’enfant
fut déterminante pour la formation initiale du langage correctement exprimé,
avant que celle-ci ne soit poursuivie tout au long de la scolarité et, depuis
les années 1940, la radiodiffusion[56].
A Pierre Gillot,
in memoriam.
Patrick PLUCHOT
* Notons ici la sortie récente d’un album de Tintin « Les pendouillons
d’la Castafiore », traduit de l’original en patois montcellien, par
Jean-Pierre et Marie-Claude Valabrègue et Josiane et Jacques Lamborot. En
vente en différents points de Montceau
Cliquez ici pour voir la vidéo
Sources et bibliographie :
- Fonds Gillot :
« Origine des Ecoles du
Bassin minier de Blanzy, dans leur contexte social, de 1832 à 1956, environ », textes et témoignages oraux recueillis
par P. Gillot.
- Docteur Léon Laroche : « Montceau-les-Mines, quelques aperçus
sur l’histoire de la ville et de son exploitation houillère » (1924) ; "Notice
historique de Sanvignes", 1929.
- Docteur Beaubernard :
« Conférence à
Montceau-les-Mines », le 9 février 1979.
- A. Fargeton : « Les grandes heures du Creusot au
temps des Schneider ».
- Abbé J. B. Chaillet : « L’abbé
Béraud », 1932.
- J. Vacher : revue « La Physiophile » de
Montceau-les-Mines, n°88 de juin 1978 et n°89 de décembre 1978.
- Antoine Prost :
« Histoire de l’Enseignement en
France, 1800-1867 ».
-
Amédée Burat : "Société
des houillères de Blanzy, situation de ses établissements en
1877", 1878.
-
Lucien Peyronnard : « Le charbon de Blanzy, la famille Chagot et
Montceau-les-Mines : histoire économique, politique et sociale du pays
Montcellien de 1769 à 1927 »,écomusée, 1981.
- Bulletins de l’Instruction Primaire de Saône-et-Loire de la collection du musée.
- Publication du musée : « Cent ans d’école »,
31 juillet 1981.
- Publication du musée : « La Maison
d’Ecole, 140 ans d’histoire », cahier n°2, 2022.
- P. Pluchot :
« Les fondement de la laïcité,
période 1789-1905 », 2003 ; « Quelle
école avant 1880 ? » Article AAEENM, 2005 ; « Les écoles de Saint-Vallier » Article
AAEENM, 2006 ; « 1899-1999,
Centenaire des mouvements sociaux, naissance de l’école publique à
Montceau-les-Mines », 2008.
- Ministère de l’Instruction Primaire : « Enquête
relative à la situation des écoles en France et en Algérie », 1884.
- Henri Besseige :
« Au pays Noir, récits du vieux
Montceau », 1952.
- « Montceau a Cent ans », 1956.
- Jean
Bron, ancien professeur au lycée de Montceau, « Histoire du Mouvement ouvrier
français », tome I.
- Articles du blog
cités :
https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2018/01/historique-des-ecoles-de-la-mine.html#more
https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2020/05/labbe-francois-beraud-cure-de-blanzy-et.html
https://musee-ecole-montceau-71.blogspot.com/2018/02/historique-de-lecole-publiqu-montceau.html
[1]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°528 de 1930, plus différents témoignages oraux et Code
Soleil 1954 citant les circulaires de 1925, page 282. Voir aussi les
articles du blog du musée : Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: Les écoles polonaises
(musee-ecole-montceau-71.blogspot.com) et Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: Les écoles polonaises
(musee-ecole-montceau-71.blogspot.com).
[2]D’après des
témoignages de maîtres ou maîtresses privés et d’une de leurs élèves.
[3]D’après des
témoignages verbaux.
[4]Bulletin de
l’Instruction Publique n°528 de 1930, pour les nombres d’enseignant(e)s
titulaires, calculés d’après les listes précitées d’électeurs et d’électrices
et d’après un témoignage oral d’une ancienne élève.
[5]Voir à ce sujet
l’article du blog du musée de la Maison d’école : Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: L'immigration polonaise entre les deux guerres
(musee-ecole-montceau-71.blogspot.com)
[6]D’après un témoignage
écrit.
[7]Les Houillères du
Bassin de Blanzy furent nationalisées en 1946 par la loi du 17 mai qui fondait
l’établissement « Charbonnage de France ».
[8]Bulletin de l’Instruction
Primaire n° 664 de 1947.
[9]19 titulaires dont 5
instituteurs et 14 institutrices, et, parmi celles-ci, 4 ayant le B.S (Brevet
Supérieur), à l’exclusion de tous les autres titulaires et stagiaires.
[10]D’après des
témoignages verbaux.
[11]Le Bulletin de l’Instruction
Primaire n°677 de 1948, donne les traitements de 1945 à 1948 pour
l’enseignement public.
[12]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°664 de 1947 et témoignages oraux. En 1948,
l’enseignement public de Saône-et-Loire, 765 instituteurs et 1 344 institutrices,
total 2 169.
[13]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°692 de 1950 et d’après un témoignage oral.
[14]D’après les
témoignages de M. J. Brisepierre, ancien chef du centre et de l’architecte
Dechassat.
[15]Notamment préparation
au Certificat d’Etudes Primaires Elémentaires des élèves âgés de 15 ans, en vue
d’un apprentissage d’employé de bureau ou d’ouvrier.
[16]Voilà pourquoi les
Allemands sont restés si nombreux à l’époque au Pays Noir, y fondant même une
association.
[17]D’après des
témoignages verbaux dont principalement celui de l’ancien chef du Centre
d’Education Professionnelle J.
Brisepierre.
[18]Toujours d’après les
mêmes témoignages.
[19]Suite du témoignage
oral de J. Brisepierre, ancien chef du Centre.
[20]Idem.
[21]Idem.
[22]Le nom picard de
« porions » était passé dans le langage des mineurs du Bassin minier
de Blanzy, après la venue auprès d’eux, pendant la Grande Guerre, d’immigrés,
mineurs du Nord, dont quelques familles, par ailleurs, restèrent au Pays Noir après le conflit. Voir à ce
sujet, l’article du blog du musée de la Maison d’Ecole sur le parrainage de la
ville de Harnes (Nord) par la ville de Montceau : Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: La rue de Harnes au Bois-du-Verne
(musee-ecole-montceau-71.blogspot.com)
[23]Suite du témoignage
oral de J. Brisepierre, ancien chef du Centre.
[24]Fin du témoignage
verbal de M. J. Brisepierre qui dirigea pendant une trentaine d’années le
Centre montcellien. Témoignage recueilli par Pierre Gillot pour le musée de la
Maison d’Ecole.
[25]L’épuisement rapide du
gisement dans le Bassin minier de Blanzy, la faible rentabilité et la mauvaise
qualité de la houille, maigre, avec forte teneur en cendre, n’incitèrent pas à
prolonger l’exploitation. Déjà le Centre d’Education Professionnelle, après
avoir abandonné la 9e Ecluse, s’installa auprès de la Direction de
la Mine et se borna à former quelques électromécaniciens. Fin mai 1979,
l’effectif total des personnels employés aux Houillères de Blanzy était de
2772.
[26]Bulletin de
l’Instruction Publique n°392 de 1914 et d’après « Montceau a cent
ans », pages 79 à 88, article « De l’E.P.S au Collège ».
[27]D’après Antoine Prost,
op cit, page 419.
[28]D’après G.
Blond : « Pétain », ouvrage partial mais très précis, consulté
pour l’impression d’ensemble sur le Régime de Vichy, et « 2e
Guerre mondiale », Historia, page 699 du tome 2. Voir l’article du blog du
musée de la Maison d’Ecole sur l’école sous Vichy : Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: L'école sous Vichy
(musee-ecole-montceau-71.blogspot.com) et Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: De Jean Zay au régime de Vichy
(musee-ecole-montceau-71.blogspot.com)
[29]D’après Antoine Prost,
op cit, pages 420 à 448 et pages 474, 475, 510.
[30]Idem.
[31]D’après
« Montceau a cent ans », page 38.
[32]Idem.
[33]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°676 de 1948 et témoignage de R. Dubreuil, Directeur du
Collège moderne de Montceau-les-Mines.
[34]D’après le témoignage
de R. Dubreuil.
[35]D’après
« Montceau a Cent Ans », pages 84 et 88. C’était une municipalité
socialiste qui proposa la construction, 49, rue de Gourdon, à Montceau. Quant à
l’ancien bâtiment de la vieille Ecole Primaire Supérieure, il fut démoli en
1956.
[36]
Sources site du lycée
Henri Parriat : en 1968 aura lieu la séparation définitive des collèges et
des lycées. L’établissement perdra donc son premier cycle au bénéfice des
nouveaux collèges (CES et CEG) créés sur Montceau. En 1977, le centre
d’apprentissage industriel devient lycée professionnel et s’installe à Blanzy.
Le lycée portera officiellement le nom d’Henri Parriat en 1987.
[37]Le titre et la date
sont consignés dans les archives du lycée.
[38]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°676 de 1948 et témoignage de R. Dubreuil.
[39]D’après
« Montceau a Cent Ans », op cit, page 88.
[40]Idem.
[41]D’après le témoignage
de R. Dubreuil.
[42] D’après
« Montceau a Cent Ans » et le Code Soleil de 1954 : « pour
se présenter au concours de l’Ecole Normale depuis 1951, le Brevet Elémentaire
n’est plus valable étant remplacé par le B.E.P.C (Brevet d’Etudes du Premier
Cycle) », page 253.Sans qu’il eut rétroactivité, les anciens titres de
capacités pour enseigner se trouvaient supprimés en 1951, seul subsistait le
baccalauréat, page 197. Au sujet de l’Ecole Normale d’Institutrices de Mâcon,
voir l’article du blog du musée de la Maison d’Ecole : Blog dédié au Musée de
l'école à Montceau-les-Mines: Aperçu historique de l'Ecole Normale
d'Institutrice de Mâcon (musee-ecole-montceau-71.blogspot.com)
[43]Citation empruntée à
un article anonyme paru dans le « Dauphiné libéré », le 25 décembre
1975. Né à Montceau-les-Mines le 30 janvier 1910, Henri Parriat y est décédé le
24 décembre 1975. C’est en 1987 que le Lycée de Montceau prit officiellement son
nom.
[44]Une étude complète sur
la vie d’Henri Parriat est disponible dans la revue La Physiophile, n°83 de
1975, notamment.
[45]D’après Antoine
Prost : op cit, page 433, chapitre XVIII : « L’explosion
scolaire et l’ébranlement de la société enseignante », dans
« Histoire de l’enseignement en France : 1800-1967 ».
[46] Dans la revue
« Pourquoi ? », septembre-octobre 1981, n°168, article
« Temps libre ».
[47] « Le Monde »
des 11 et 12 octobre 1981, article « Les illettrés invisibles ».
[48]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°348 de 1910.
[49]Bulletin de
l’Instruction Primaire n° 385 de 1913 : statistique demandée par le
Ministre, des enfants anormaux inscrits dans les écoles publiques ou privées.
[50] Les premières classes
spéciales renommées par la suite « classes de perfectionnement »
furent créées par la loi de 1909 qui marqua le début de l’enseignement spécial.
Un corps d’enseignants spécialisés était alors formé en 4 mois au C.A.E.A
(Certificat d’Aptitude à l’Enseignement des Arriérés)… Décret du 14 août 1909.
[51]Bulletin de
l’Instruction Primaire n°392 de janvier 1914 : « Rapport sur la
situation matérielle et morale de l’enseignement primaire dans le département
de Saône-et-Loire pendant l’année scolaire 1912-1913 », par l’Inspecteur
d’Académie Sarthou.
[52]D’après une statistique
du ministère de l’Education Nationale, dans « L’école publique » Tome
I, Editions Rombaldi.
[53]Ouvriers renvoyés
suite à la grève du 21 janvier au 26 mai 1901, déclenchée à cause de cette
menace de renvois qui dépassèrent le chiffre ci-dessus, cité alors.
Waldeck-Rousseau avait refusé d’intervenir.
[54]Docteur Laroche :
op cit, page 153.
[55]Docteur
Beaubernard : op cit, « La grande grève de 1901 ».
[56]On peut découvrir le
pittoresque du patois montcellien en relisant, entre autres, « Les oies de
papa » par P. Jarjaille dans « L’Espoir » du 23 mai 1949.
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